« L’île de Mayotte subit un affaissement qui vient s’ajouter à la montée des eaux mondiales due au réchauffement climatique. Cela engendre une érosion du trait de côte qui doit absolument être prise en compte dans l’élaboration de tous les projets de développement de l’île. C’est un cas d’école », a déclaré Guillaume Vuilletet, le rapporteur de la commission d’enquête sur les risques naturels en outre-mer au sein de l’Assemblée nationale. Le député, accompagné de Mansour Kamardine, lui-même président de cette commission, ainsi que d’un administrateur de l’Assemblée, étaient sur l’île aux parfums ces mardi 26 et mercredi 27 mars afin notamment de lister tous les risques naturels auxquels elle est exposée. « Il faut se préparer aux aléas auxquels Mayotte sera susceptible de faire face dans les années à venir. La présence du volcan sous-marin est évidemment centrale, mais le réchauffement climatique a pour effet d’accentuer l’intensité des évènements susceptibles de se produire, d’où la nécessité d’une bonne anticipation », a expliqué le député Guillaume Vuilletet.
A l’érosion du trait de côte vient s’ajouter les risques de glissement de terrain, particulièrement exacerbés par la présence de nombreux habitats informels, une sècheresse risquant de provoquer des feux de forêt, mais aussi une pénurie d’eau comme nous avons pu le constater au cours de ces derniers mois. « Ce territoire présente une fragilité certaine. Nous devons donc anticiper, traiter et assurer la résilience, c’est-à-dire un retour à une vie normale après le passage des aléas », a détaillé le rapporteur.
Quid de l’aéroport de Pamandzi étant donné l’affaissement de l’île ?
Si l’Arlésienne de la piste longue a encore été promise aux Mahorais par Emmanuel Macron lors de sa visite officielle sur l’île en 2019, les choses ne sont pas aussi simples. En effet, il n’y aurait aucun intérêt à construire une piste longue à l’aéroport de Pamandzi si ce dernier risque effectivement d’être submerger par les eaux d’ici quelques dizaines d’années. A l’époque de l’effervescence suite à la découverte du volcan sous-marin et de l’affaissement de l’île, d’aucuns avaient proposé de déplacer l’aéroport dans les terres et le village de Combani avait été évoqué pour l’accueillir. Si l’opinion publique s’est lassée de cette question avec le défilé des années, il n’en est rien pour le Gouvernement qui, selon Guillaume Vuilletet, devait « rendre sa décision à ce sujet (NDLR : le déplacement ou non de l’aéroport) fin mars 2024 ». Or, nous y sommes et toujours pas de nouvelles. « Bon, ce ne sera sans doute pas fin mars, mais ce qui est sûr c’est que cela sera très prochainement », concède-t-il. Le site de l’aéroport de Pamandzi est d’ailleurs l’un de ceux que la commission d’enquête a visité lors de sa venue sur l’île aux parfums.
Le fond Barnier ne fonctionne que si les biens sont assurés
Si notre rédaction avait évoqué dans un précédent article une sous-utilisation du fond Barnier, dédié aux catastrophes naturelles, à Mayotte, Guillaume Vuilletet pointe du doigt le problème de l’assurance : « Le fond Barnier ne fonctionne qu’avec les biens assurés. Or à Mayotte, assurer ses biens n’est malheureusement pas encore un réflexe et c’est un problème majeur ». Par ailleurs, se préparer aux aléas naturels coûte très cher. A titre d’exemple, Guillaume Vuilletet nous indique que la restauration d’une digue détériorée à Bouéni, que la commission d’enquête est allée visiter au cours de son séjour, s’élèverait à 1,2 million d’euros. Où trouver cet argent ? L’Etat a des pistes de financement, un projet de loi ayant été déposé suite au passage du cyclone Irma à Saint-Martin concernant la gestion des risques naturels dans les outre-mer.
La visite de la commission d’enquête avait aussi pour mission de vérifier si des lieux avaient été prévus pour se réfugier en cas de catastrophe naturelle et si suffisamment de communication avait été faite autour d’eux. Elle a également étudié la nécessité de reconduire le plan Orsec de 2019. « Quels sont les plans à réactualiser ? Quels sont les endroits où il est possible de construire et ceux qui présentent trop de risques d’aléas ? C’est tout cela que nous sommes venus constater de visu lors de notre déplacement », a précisé le rapporteur de la commission d’enquête avant de s’envoler, avec ses collaborateurs, pour La Réunion.
Toutes les données récoltées au cours de ces déplacements seront synthétisées et analysées très prochainement afin d’améliorer la gestion des risques naturels dans les outre-mer en fonction des spécificités de chaque territoire.
Nora Godeau