« C’est un poisson d’avril ? », s’est étonnée Laure Dommergues, 37 ans, quand l’une de ses connaissances lui a annoncé sa victoire par téléphone. Prise par des obligations personnelles, elle n’avait en effet pas pu rester jusqu’à la fin de l’évènement. C’est peu dire que cette vétérinaire du cabinet de Cavani ne s’attendait guère à sa victoire, et pourtant ! Venue pour le plaisir de l’exercice, elle s’est brillamment illustrée dans la catégorie « adultes » de l’évènement et a donc gagné un billet d’avion afin de participer à la grande finale qui aura lieu le 27 avril prochain à Paris. « J’ai trouvé cette dictée moins difficile que la dictée Bolée à laquelle j’avais participé il y a quelques années, mais je ne pensais pas que cela m’aurait empêché de faire des fautes quand même », affirme cette Mahoraise d’adoption vivant depuis une dizaine d’années sur le territoire. Appliquant à la lettre la devise de l’évènement : « un esprit sain dans un corps sain », c’est d’ailleurs en vélo depuis Tsingoni qu’elle s’est rendue à l’université de Mayotte, à Dembeni, pour participer à cette dictée.
Ce n’est toutefois pas la seule femme à s’être illustrée brillamment lors de cet évènement puisque tous les premiers prix ont été obtenus par des femmes : aussi bien dans les catégories « primaires », « collège », « lycée » que dans la catégorie « adultes ». Dans cette dernière, les deuxième et troisième places ont également été remportées par des femmes. L’ironie, que n’a pas manqué de relever à plusieurs reprises Abal-Kassim Cheik Ahamed, le président de l’université de Mayotte, est que le texte de la dictée en question était extrait d’un roman d’Albert Camus intitulé Le premier homme. Si ce dernier, évoquant les joies d’un petit garçon lors de ses parties de football pendant les récréations, n’était pas d’une difficulté extrême, il comportait néanmoins de très longues phrases qui semaient parfois le doute sur les accords à faire et comportait également quelques « pièges ». Sans compter qu’à cet exercice de dictée est venu s’ajouter un autre : celui de savoir orthographier correctement certains mots rares tels que « ambages », « éphéméride », « truculence » ou encore « velléité ». Des mots peu usités que seuls des lecteurs assidus sont en mesure de connaître !
Le texte était le même pour toutes les catégories, mais les primaires n’avaient que le premier paragraphe à faire, les collégiens le premier et le second et les autres le texte dans son ensemble, avec une distinction entre les lycéens et les adultes. Un bel exercice qui a réuni toutes les générations de l’île en se voulant également inclusif puisque 3 non-voyants de l’association ADSM ont participé à cette dictée dans sa version braille ! Samuel, l’un des non-voyants présents, a d’ailleurs prononcé un beau discours à la fin de l’évènement appelant à « briser le tabou du handicap à Mayotte ».
Nora Godeau