Nouveaux cas de choléra : le CHM réorganise ses effectifs

26 cas sont désormais identifiés. Ce qui incite les autorités à ouvrir une 2ème "unité choléra" et à mettre en place des opérations "coup de poing" de vaccination. En attendant l'arrivée de renforts de soignants, seuls deux dispensaires resteront ouverts pour optimiser le personnel existant.

Si vendredi les autorités de santé annonçaient quatre nouveaux cas de choléra, un homme, une femme et son bébé, et une 2ème femme dans la commune de Koungou, s’ajoutant aux dix précédents cas importés déclarés, ce dimanche, le nombre de malades identifiés étaient au nombre de 26.

Olivier Brahic avait déclaré que les trois personnes porteuses du choléra allaient « bien » et qu’elles étaient hospitalisées au CHM. 

« Une situation très compliquée aux Comores »

Jugeant que le contexte restait fragile, le directeur de l’ARS Mayotte rappelait cependant que l’Union des Comores faisait face à une « situation très compliquée », où 2584 cas de choléra avaient été confirmés, dont 1826 cas à Anjouan, d’après les dernières données en date du 24 avril 2024, et où 61 décès avaient été déplorés. 

À Mayotte, pas d’épidémie mais « une situation particulière à Koungou »

Urgences, chm
Encore à ce stade, en cas de symptômes du choléra, les autorités sanitaires recommandent avant tout de s’isoler et d’appeler le 15

Alors que les dix premiers cas de choléra identifiés à Mayotte étaient des cas importés, puisque les personnes infectées avaient voyagé dans les 15 jours précédents leurs symptômes, les 4 nouveaux cas de choléra avaient été classés comme des cas autochtones, ne laissant aucun doute sur sa possible propagation. Autrement dit, ces quatre personnes touchées n’avaient pas voyagé dans les 15 jours avant le début de leur maladie, puisqu’elles se trouvaient à Mayotte. Concrètement, la bactérie vibrio cholerae à l’origine du choléra, serait donc bien présente sur le territoire mahorais.

Si vendredi, pour Olivier Brahic il n’y avait « pas de caractère épidémique du choléra à Mayotte mais une situation particulière dans une commune qui demandait une vigilance renforcée avec des mesures de gestion de type opération coup de poing » en raison de trois cas autochtones sans lien entre eux, la situation a donc évolué depuis.

Mais où se trouve-t-elle cette bactérie ? 

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Face aux 4 premiers cas autochtones de choléra, l’ARS a réalisé des prélèvements sur les cours d’eau pour identifier l’origine de la contamination

Si la transmission du choléra est souvent liée à un manque d’accès à une eau potable et à des installations d’assainissement, le Directeur de l’ARS a été formel : « L’eau véhiculée par la SMAE n’est pas vectrice du choléra (…) elle est potable et très surveillée. « En revanche, dans le cadre d’une surveillance environnementale, les équipes de l’ARS mobilisées sur le choléra ont réalisé, jeudi 25 avril, des prélèvements dans des cours d’eau de Koungou, qui seront analysés par un laboratoire de La Réunion, « pour voir si on trouverait la bactérie dans ces eaux » pour reprendre les mots de Olivier Brahic. En effet, les principaux réservoirs de la bactérie du vibrio cholerae sont les êtres humains et les milieux aquatiques, telles que les eaux saumâtres et chaudes. À l’heure actuelle, les résultats de ces investigations n’ont pas encore été communiqués.

Opération coup de poing vaccination 

Pour vacciner les personnes du secteur de Koungou où ont été identifiés les nouveaux cas, l’ARS a déployé une « opération coup de poing » en vaccinant les personnes vivant sur le secteur concerné, « pour que les personnes soient immunisées et étouffer la contamination. » À ce stade, 1000 personnes ont déjà été vaccinées. Cette campagne de vaccination va être réalisée sur trois points mobiles « dans les trois prochains jours ».

Suite à une alerte émise par Santé publique France jeudi 25 avril au soir, un renfort de vingt médecins et infirmiers sera prochainement attendu sur le territoire en soutien de ces opérations de vaccination, des actions de type « porte à porte » auprès des habitants du quartier, mais aussi le Centre hospitalier de Mayotte dans la prise en charge des cas. Aussi, 6.600 doses de vaccins vont être acheminés à Mayotte grâce à « une aide conséquente du national », a mentionné Olivier Brahic.

En attendant l’arrivée de ces renforts, afin d’assurer la prise en charge de l’ensemble des personnes malades, l’Agence régionale de santé et le Centre hospitalier de Mayotte ont pris deux décisions. Celle d’ouvrir dès ce jour une deuxième « unité choléra » au sein du centre médical de référence de Dzoumogné, et l’optimisation des effectifs sur les prises en charge liées au choléra. « Ainsi, tous les dispensaires, sauf ceux de Jacaranda et Mtsapere, seront fermés« . Les permanences des soins sont maintenues dans les différents centres médicaux de référence.

Ouverture d’un centre de dépistage spécifique au choléra 

Dès samedi 27 avril, un centre de dépistage a été déployé à l’école maternelle et élémentaire Koungou Plateau, permettant à toute personne qui aurait des diarrhées ou des vomissements, avec ou sans notion de voyage dans une zone comme Les Comores, où le choléra circulerait, pourrait se rendre au centre pour être dépistée, à l’aide de tests rapides d’orientation diagnostique (TROD).

Les maraudes sanitaires se poursuivent sur le secteur, afin d’assurer une diffusion large des recommandations sanitaires et d’orienter les personnes vers les dispositifs de vaccination et dépistage.

L’unité choléra du CHM s’agrandit à 14 places 

Le CHM, en lien avec l’ARS, se prépare à un afflux de patients porteurs du choléra

Au CHM, dans le service des urgences, « l’unité choléra », actuellement de 8 places, étend ses capacités d’accueil à 14 places. Le directeur de l’ARS a précisé que « la régulation spécifique du choléra est toujours active au CHM » et que des tentes et modules vont également être acheminés, par anticipation, « au cas où nous aurions besoin d’upgrader la stratégie. »

Le Préfet a salué un dispositif « très bien adapté à la situation », permettant une « prise en charge du choléra sécurisée au CHM pour éviter toute contamination au sein de l’hôpital » comme l’a expliqué Olivier Brahic. Chaque jour, « 7 jours/7, les équipes de l’ARS sont mobilisables sur le terrain, où 5 camions peuvent être prêts à partir pour réaliser des investigations, identifier des cas contacts, appliquer une antibioprophylaxie et vacciner la population. » Des recherches actives de cas sont également réalisées.

Un nombre de cas confirmés relativement faible 

Depuis le début de l’alerte choléra à Mayotte, 100 cas suspects ont été identifiés. Au regard du nombre de cas confirmés actuels, ces chiffres ne paraissent pas si conséquents. Serait-ce le fruit d’une gestion sanitaire « réactive » pour reprendre les termes du Préfet, d’une population résiliente qui aurait appliqué les consignes préventives sur le lavage des mains et la consommation d’une eau potable, ou d’une sous-estimation de cas en raison des difficultés liées à leur identification dans un contexte particulièrement fragile au niveau sécuritaire ?

Pour le Préfet de Mayotte, en identifiant des cas autochtones de choléra sur le territoire, et non plus seulement des cas importés, « on n’est pas monté d’un cran en terme de nature, mais seulement de degré » et « la chaîne opérationnelle pour se projeter sur les lieux de contamination » serait suffisamment réactive pour ne pas susciter d’inquiétude.

La dengue et le choléra, quand c’est pas l’un c’est l’autre, et même les deux 

ARS LAV dengue
Sur le terrain, le service LAV de l’ARS avait constaté que de nombreuses réserves d’eau chez des particuliers en Petite-terre n’étaient pas protégées des moustiques

Malgré la gestion d’une double alerte sanitaire, entre la dengue et le choléra, le Préfet de Mayotte et le Directeur de l’ARS se sont montrés rassurants. À propos du choléra, Olivier Brahic a déclaré que « si on se lave les mains et que l’on boit de l’eau potable, on n’attrape pas le choléra. » À propos de la dengue, le Directeur de l’ARS a insisté sur l’importance de se protéger des moustiques et de protéger ses réserves d’eau des moustiques, et a précisé que « malgré les cas de dengue identifiés en Petite-Terre, aucun cas de dengue n’était hospitalisé au CHM à ce stade. »

À Mayotte, la présence de nombreux bidonvilles péri-urbains et le manque d’accès à l’eau potable et à l’assainissement pour un grand nombre de la population, montrent que les messages préventifs contre le choléra, sur le lavage des mains et la consommation d’eau potable, sont encore difficilement atteignables pour une population globale très défavorisée.

Mathilde Hangard 

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