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jeudi 2 mai 2024
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Insécurité dans les transports : tout n’a pas encore été tenté

Alors que les travaux du futur Caribus annoncent une mise en service partielle pour 2024, les caillassages des bus qui ne se cantonnent plus aux scolaires mais désormais aux soignants, interroge Mohamed Hamissi sur l’absence de mesures anticipatrices. Ce spécialiste des transports en propose plusieurs.

Ce mardi le personnel hospitalier fait toujours valoir son droit de retrait après un nouveau caillassage de bus les transportant, mouvement qui avait été déclenché par la blessure d’une étudiante de l’IFSI à l’œil. Ils dénoncent un nouveau phénomène, « une mode », nous disait un syndicaliste, qui consisterait à s’en prendre aux navettes du CHM.

Nous avons interrogé les sociétés de transport scolaires, les caillassages sont permanents, nous rapporte notamment Carla Baltus, à la tête des Transports Baltus : « Nous subissons toujours beaucoup de dégradations de bus. Jeudi dernier à Dzoumogné, le bus a été massacré avec trois vitres cassées de chaque côté ».

Mohamed Hamissi : « Le problème de la mobilité rejoint celui de l’insécurité »

Ces caillassages de bus scolaires et de soignants pose ni plus ni moins le problème de l’avenir du transport en commun de passagers notamment sur CARIBUS, qui n’est pas pris en compte à sa juste mesure, estime Mohamed Hamissi qui propose des axes de travail.

Ce spécialiste en Transport et mobilité exerce à la Communauté de Communes de Petite Terre (CCPT) récemment lauréate du 6ème appel à projets du Fonds mobilités actives. Il s’interroge d’ailleurs sur la place du sujet mobilité à Mayotte, notamment dans le débat de la campagne sénatoriale, « cela n’intéresse personne à Mayotte alors que c’est une des 77 mesures du dernier Comité Interministériel Outre-mer sur la question de la création d’une société de transport à Mayotte. On voit que l’Etat s’interroge sur son niveau de positionnement par rapport aux collectivités locales. Les élus doivent prendre le sujet à bras le corps, notamment parce qu’il rejoint le problème de l’insécurité qui perturbe la mobilité ici. »

Des exercices agression comme pour le risque incendie

De manière plus globale, et les automobilistes peuvent en témoigner, « le réseau routier n’est pas sûr, et les scènes d’agression se multiplient au moment où va être installé le transport public. Devant Bamana ou à Doujani, on peut se faire agresser en pleine journée. Je note que c’est le Grand Mamoudzou, de Koungou à Dembéni qui est surtout ciblé. » Sans doute parce que le plus densément peuplé. Il invite à une vraie réflexion, « sinon les transports en commun ne seront jamais un havre de paix à Mayotte et les gens se détourneront des bus plutôt que d’y risquer une agression. » Un risque physique, moral, mais aussi économique, « car c’est de l’argent public qui sera investi pour rien. »

La vitre d’un bus caillassé en juin dernier

Une de ses maximes favorites, « gouverner c’est prévoir », il l’applique à la gestion de crise sécuritaire. Tout d’abord, en préparant les acteurs. « Lors d’une agression, quel sont la responsabilité et le rôle du chauffeur du bus ? Faut-il qu’il soit dans une cabine protégée ? Qui doit-il appeler en cas d’agression ? Et l’action des passagers ? La gestion du personnel est primordiale qui doit suivre des formations à la gestion de crise. Et il faut indiquer aux passagers ce qu’ils doivent faire ». Un peu comme les exercices incendie avec un protocole à suivre. « Il faut faire du sur mesure, à chaque problème doit correspondre une mesure spécifique. Or, rien que sur les chemins piétonniers, ils sont mal éclairés de nuit et mal balisés en plein jour. »

Deuxièmement, les actions doivent être menées en coopération, entre la collectivité, la société Matis, les forces de l’ordre, les associations de prévention, ce qui se fait déjà pour le transport scolaire, mais qu’il va falloir élargir lors du transport en commun Caribus, ou interurbain, « car le chauffeur va avoir de l’argent dans une caisse pour vendre les tickets. » A moins que, comme pour la barge, les titres de transport soient vendus en amont. « Quelque soit l’organisation retenue, cela doit être inscrit dans le cahier des charges. »

Sauter sur l’opportunité des JO de 2024

Former chauffeurs, personnel et même les passagers au risque agression

Il renouvelle la nécessité d’une police des Transports qui a pour mission d’assurer la sécurité des voyageurs, des biens et des équipements, dans les réseaux de transports en commun, « mais qui n’est pas le miracle contre les agressions. Et ce sont des moyens supplémentaires à prévoir de la part de l’autorité organisatrice ». C’est-à-dire la CADEMA pour Caribus, par exemple, « mais l’Etat a également sa part, comme le montre la loi du 26 mars 2018 relative à l’organisation des JO 2024 et qui donne des stratégies pour sécuriser les transports en commun ». Elle autorise en effet l’utilisation de « caméras augmentées » capables de « détecter en temps réel des évènements prédéterminés » notamment dans les transports en commun. « C’est une réelle opportunité pour nos parlementaires et pour les élus locaux qui doivent se saisir de ce biais ». Petit appel du pied vers les deux nouveaux sénateurs…

Pour trouver des mesures adaptées aux problèmes rencontrés, Mohamed Hamissi interroge sur l’existence de « bilan de l’insécurité dans les transports », pour les scolaires et pour le CHM. « On le voit, la problématique est complexe et sans doute différente d’une zone de Mayotte à l’autre, il faut revenir sur les actes d’agression et en tirer des leçons. Cela dépasse le champ des transports et ne sera résolu qu’avec un étroit partenariat entre les parties.

« Bientôt, ce sera Haïti ! »

Des exercices sécurité-angles morts ou incendie se font régulièrement, pourquoi pas sur le risque agression ?

Il ne cache pas son pessimisme, « en raison de l’inaction et du manque d’anticipation. Beaucoup de mesures sont à adopter par les autorités organisatrices des transports, par l’Etat, par les collectivités. Si on continue à mettre ce sujet de côté en disant, ‘c’est du régalien’, nous n’y arriverons pas. Et bientôt, ce sera Haïti, avec des bus brûlés sur le chemin du travail. Qui supportera ce coût supplémentaire ? »

Le précurseur de ce qui risque d’arriver, c’est le CHM qui a été le premier à innover,  rappelle-t-il : « C’est le premier à mettre en place des navettes pour ses salariés alors que la loi d’orientation des mobilités l’impose aux entreprises dans les Négociations annuelles obligatoires. Il faut saluer cette action, mais si non veut que la loi soit appliquée, il ne faut pas envoyer des messages négatifs aux salariés des navettes agressées. Et surtout en ne se préoccupant pas de ce qui peut leur arriver sur les futures lignes de transport en commun autour de Mamoudzou. C’est pareil pour le transport scolaire par le conseil départemental, il faut davantage se soucier du sort des passagers. »

Et de terminer par une supplique pour ce travail de longue haleine, « je demande aux élus locaux de travailler ensemble sur la sécurité des usagers des futurs transports publics de Mayotte. De mettre en place des mesures et de les affiner ensuite. Sans quoi, les bus finiront par être vides. »

Anne Perzo-Lafond

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