Durcissement de la justice des mineurs : le Sénat adopte le texte de Gabriel Attal

Les articles qui avaient été écartés en commission ont été réintégrés, notamment une dérogation à l’excuse de minorité et une action et l’implication des parents par leur assurance.

Le Sénat a adopté, tard ce mercredi soir, la Proposition de loi de Gabriel Attal visant à restaurer l’autorité de la justice à l’égard des mineurs délinquants et de leurs parents par 227 voix pour, 113 contre. Le rapporteur du texte, l’avocat pénaliste Francis Szpiner s’est abstenu. Nous avons rapporté ses arguments en séance pour justifier l’abandon des axes majeurs du texte. Il plaidait pour certains leur inconstitutionnalité, et pour d’autres, l’existence d’outils aux mains de la justice mais sous-utilisés, comme la sous-dotation de la Protection judiciaire de la Jeunesse (PJJ).

Par cette proposition de loi, Gabriel Attal alors Premier ministre, avait voulu apporter une réponse aux émeutes urbaines de 2023. Le durcissement de la justice des mineurs était visé lorsqu’il avait lancé sa maxime, « Tu casse, tu répares. Tu salis, tu nettoies. Tu défies l’autorité, on t’apprend à la respecter », rajoutant, « avec ce texte, nous allons aussi loin que la Constitution nous le permet. »

Que contient cette proposition de loi une fois passée par l’Assemblée nationale et le Sénat ?

Tout d’abord, les articles qui ont été adoptés mardi soir : la comparution immédiate pour les justiciables mineurs, à partir de 16 ans pour les délits punis de plus de 3 ans de prison, et même les mineurs de 15 ans pour les délits plus graves dont la peine encourue va au-delà de 5 ans de prison. Également l’obligation pour les parents de déférer aux convocations du juge, pour des audiences à visée éducative.

L’excuse de minorité… deviendrait minoritaire

Des mesures qui peuvent largement impacter à Mayotte où les mineurs composent plus de la moitié de la population

Les sénateurs étaient très attendus sur l’excuse de minorité. Elle vise à atténuer la peine prononcée contre un mineur, sa levée n’était motivée que dans les infractions les plus graves. La proposition de loi telle qu’elle a été adoptée, inverse le processus pour les mineurs de 16 à 18 ans auteurs d’un délit puni d’une peine d’au moins 5 ans d’emprisonnement et en récidive. Il faudra désormais que le juge motive son maintien.

Lors de dégâts commis, les assurances via la responsabilité civile, prennent le relais. Le texte prévoit que désormais, les assureurs pourront se retourner contre les parents pour participer financièrement aux dégâts causés, y compris s’ils n’habitent pas avec leur enfant (condition dite de cohabitation). Si ce dernier argument ne répond pas exactement à la demande de la sénatrice de Mayotte Salama Ramia, qui réclamait que la responsabilité des proches soit engagée lors des « confiages » d’enfants, il peut amener les parents à réfléchir à laisser leurs enfants à des tiers en qui ils ont confiance.

Les mineurs de 13 à 16 ans condamnées pour des infractions commises en bande organisée, et c’est souvent le cas à Mayotte, et pour des faits de terrorisme, seront placés sous un régime de détention provisoire plus dur, et de courtes peines de prison pourront être proposées. Une dernière mesure que contestait le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, évoquant la surpopulation carcérale actuelle. A Mayotte, elle oscille entre 150 et 200%.

Les sénateurs ont également prévu un doublement du nombre d’assesseurs siégeant aux côtés du juge des enfants.

Le texte doit maintenant passer en Commission mixte paritaire (CMP) composée de 7 députés et 7 sénateurs chargés de trouver un compromis entre l’Assemblée et le Sénat. Tout va dépendre des élus choisis dans le camp LR qui est resté fortement divisé sur cette proposition de loi Attal au Sénat.

Anne Perzo-Lafond

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