Journée d’entre deux… chaos ?

C’est une journée de mardi au temps suspendu qu’ont vécu les habitants d’une partie de l’île. Ceux des zones sinistrées par les violences de la veille, et qui ne savent pas trop s’il faut panser les plaies ou penser déjà à de prochains jours sombres.

A leur réveil, les habitants de la commune de Koungou n’en croyaient pas leurs oreilles. Quoi ? Aucune détonation, pas de hurlements de jeunes prêts à tout pour en découdre, pas de dizaines de messages d’alerte sur les groupes WhatsApp, mais des encouragements mollement éparpillés, « ça a l’air de passer ». Ceux qui ont été agressés ou qui sont passés limite la veille ne s’y risquent pas, encouragés à rester chez eux par ceux qui n’ont pas pu rentrer dormir, et qui franchissent enfin en matinée l’huis de leur logement. Partis travailler lundi en étant persuadé d’une libre circulation conformément au communiqué préfectoral, ils ont été pris au piège. Paradoxe. Ce mardi n’a finalement donc pas été travaillé pour beaucoup, alors que le calme était revenu. Le tumulte a laissé la place à un silence détonnant.

Les habitants de Koropa se joignent aux agents de la mairie pour nettoyer

Et éloquent. Car les routes étaient vierges en début de matinée. Là où les bouchons s’étirent habituellement de Mamoudzou Centre jusqu’à Koungou, personne cette fois pour slalomer entre les restes de barrages. Une matinée aux airs de début de nuit, quand les habitants se pressent de rentrer chez eux pour ne surtout pas ressortir et risquer d’être pris à partie. Bien sûr, le nombre d’agressions est en forte régression le soir, plus personne ne sort. Une situation qui arrange forces de l’ordre et statistiques gouvernementales. C’était pareil en ce début de matinée mardi, et on pouvait toucher du doigt ce qu’il adviendrait de Mayotte si personne ne proteste contre cette insécurité : un territoire où les routes sont laissées aux délinquants qui se ruent sur la moindre proie à deux ou quatre roues.

De la protection avant les sanctions

Ce mardi, les routes portaient toutes les stigmates de champs de bataille. En témoignent le tronçon Coconi-Ouangani, avec des poubelles et des véhicules incendiés, ou un arbre en travers de la route à Bandrélé, ou encore la route jonchée de blocs de tri sélectif incendiés à Majikavo Koropa.

On ne sait pas encore de quoi sera fait mercredi, mais l’heure était au nettoyage. L’œuvre à la fois des agents communaux, à la fois des habitants, mais aussi, des entreprises spécialisées. Un arrêté à en effet été pris le 27 janvier 2024 par le préfet de Mayotte pour réquisitionner deux sociétés privées pour enlever les épaves des bas-côtés. Et cela, au frais de l’Etat. Il s’agit d’Enzo Technic recyclages, et de Caza Pièces auto qui doivent en quelques jours avoir tout retiré, l’arrêté prenant fin ce 31 janvier à minuit… et passé cette heure, aucune chance que ces citrouilles se changent en carrosse !

Enlèvement des encombrants par la commune

La question qu’ont dû se poser les collectifs ce mardi, est « est-il encore possible de manifester à Mayotte ? ». Le chaos est né de ce que des jeunes dépouilleurs se soient greffés sur une révolte de ceux qui s’affichent comme les représentants de la population, contre des ordres préfectoraux jugés iniques au regard de ce qui est mis en place pour protéger la population contre ces agresseurs. Certes, il y a des interpellations à posteriori, mais c’est la protection que demandent les habitants. D’empêcher que les coups soient portés. Or, ils l’ont été, et ces derniers jours plus violemment et massivement que jamais, notamment à Koungou.

Donc comment manifester pour obtenir des solutions ? Une réponse pas facile à trouver, qui imposent que les organisateurs du mouvement ne se mettent pas eux aussi en danger, et qu’ils parviennent à canaliser les jeunes fauteurs de troubles pourquoi pas en intégrant des adultes de la commune qui les connaissent.

Réponse dans les jours qui viennent, alors que les barrages sauvages pour dépouiller les automobilistes avaient repris en soirée à Majikavo Koropa, à hauteur de la mosquée.

Anne Perzo-Lafond

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