Dans quelques jours, dix-sept élèves de troisième la section Langue et Culture Européenne (LCE) prendront l’avion pour l’Espagne, direction l’Aragon, à la découverte de la région natale de leur professeure d’espagnol, Sonia Langa. « C’est ma région d’origine je vais leur faire découvrir », explique l’enseignante installée à Mayotte depuis cinq ans. « Ce projet, je l’ai construit pour leur donner la chance d’élargir leurs horizons culturels, de mieux s’approprier l’histoire de leur île et de découvrir une autre région qu’ils ne connaissent pas. »
Un projet soutenu par Erasmus+
L’idée de ce voyage a germé il y a plusieurs années, à l’occasion d’un appel à projets lancé par le programme Erasmus+. Grâce à une convention avec le GIP-FCIP de Mayotte, l’académie de l’île permet à certains enseignants de soumettre des propositions de mobilité éducative. Sélectionné il y a un an, le projet de Sonia Langa bénéficie d’une subvention de 43 000 euros de l’Union européenne. « Sans ce financement, le voyage n’aurait pas été possible. Rien que les billets d’avion coûtent 39.000 euros », précise l’enseignante. Le 1er avril, ces dix-sept de ses élèves de troisième, accompagnés de leur professeure d’espagnole, d’un enseignant de physique-chimie et d’un surveillant, s’envoleront vers la capitale de la région de l’Aragon, Saragosse (Zaragoza en espagnol).
De Mayotte à l’Aragon : un voyage éducatif au-delà des frontières
Ce séjour ne se résume pas à un simple voyage touristique. « C’est un véritable voyage pédagogique, culturel et historique ! » insiste Sonia Langa. « Nous allons travailler sur les valeurs européennes : le développement durable, l’inclusion, l’égalité. L’objectif est aussi de comparer le patrimoine de Mayotte et de l’Aragon, tant au niveau environnemental que culturel, culinaire ou humain. »
À Saragosse, les élèves seront accueillis au collège Pablo Serrano, où ils participeront à des cours avec leurs homologues espagnols, ainsi qu’à des ateliers organisés par des organisations non gouvernementales (ONG) locales. Ils auront aussi l’opportunité de réaliser une fresque murale avec l’artiste Martz. Le programme inclut des randonnées à Ainsa, dans les Pyrénées, un atelier de percussions et un débat sur le racisme et la tolérance à travers le théâtre. « Sur les dix-sept élèves, très peu ont déjà voyagé en dehors de Mayotte. Beaucoup n’ont jamais quitté leur île. Ce projet est une chance pour eux, un moyen de découvrir une autre culture et de se projeter dans un avenir plus large. »
Apprendre ailleurs pour mieux comprendre chez soi
Pour préparer ce voyage, les élèves ont déjà mené plusieurs activités autour du patrimoine de Mayotte. Avec le soutien de la Direction des affaires culturelles (DAC) et d’associations locales, telles que Nyora Ndjema à Kani-bé, ils ont participé à une sortie de pêche au Djarifa, à un atelier culinaire sur les spécialités mahoraises, et à une excursion dans le sud de l’île guidée par le prestataire Baobab Tour. Les élèves ont ainsi découvert la mangrove de Tsimkoura, les pirogues de Mbouini et le baobab géant de Bandrélé. Ils ont également été reçus au Pôle d’Excellence Rurale de Coconi et ont suivi une formation en photographie et montage vidéo, grâce à une subvention du programme « Notre école, faisons-la ensemble ». « L’objectif était qu’ils puissent documenter leur séjour en Espagne et partager leur expérience avec ceux qui ne peuvent pas partir », précise leur professeure.
Un voyage transformateur
L’organisation de ce voyage a été complexe, surtout après le passage du cyclone Chido, mais l’enseignante d’espagnole a pu compter sur le soutien infaillible de sa hiérarchie pour que les élèves puissent partir dans les meilleures conditions. Baptisé « Notre diversité, notre richesse : Mahorais à la découverte du monde, un voyage transformateur », ce voyage pédagogique vise à faire évoluer le regard des élèves sur leur propre territoire et à les sensibiliser aux enjeux de la diversité. À travers cette immersion en Espagne, Sonia Langa espère leur offrir bien plus qu’une simple parenthèse hors de Mayotte. « C’est un voyage qui va les changer, leur ouvrir des perspectives. Ils vont comprendre ce qu’est l’Europe, comment elle s’est construit et comment Mayotte y trouve sa place », conclut-elle.
Mathilde Hangard
