« L’année 2024 a concentré tous les chocs… et le passage de Chido a fini d’achever le tissu et l’activité économiques des entreprises. Il a tout cassé et tous les secteurs ont été touchés tant du point de vue des outils de production, des locaux, ou encore des matériaux. Il fallut repartir de zéro », explique Daoulab ALI CHARIF, Responsable des services à l’économie et de la communication à l’IEDOM Mayotte.
En effet, malgré un regain d’optimisme à la fin de 2023, l’année 2024 avait, pour ainsi dire, mal commencé avec notamment la crise sécuritaire et ses quelques 6 semaines de barrages… Ajouter à cela le passage de Chido en fin d’année et il n’en fallait pas plus pour dynamiter l’activité économique et mettre les entreprises mahoraises, déjà fragilisées, à terre. « L’année 2024 est l’année de tous les défis avec de multiples chocs exogènes et leurs conséquences… Les barrages et Chido ont provoqué presque 3 mois d’inactivité économique », indique Florence Mar Picart, directrice de l’IEDOM Mayotte.
Pourtant entre le début et la fin de l’année 2024 il y avait certains signes d’optimisme, notamment en septembre dernier et le climat des affaires – qui indique comment les politiques, les relations et les collectivités locales, régionales et nationales soutiennent le développement des entreprises – était reparti à la hausse, mais Chido a tout anéanti. Selon les chiffres de l’IEDOM, le climat des affaires a ainsi perdu 10 points au 4etrimestre. « L’indice du climat des affaires au T4 2024 s’établit à 101,9 points, très en deçà des tendances observées au cours des trois dernières années (112 points en moyenne sur les trois dernières années) », observe ainsi Daoulab ALI CHARIF
Un climat des affaires en berne
Chido a entrainé des inquiétudes pour les entreprises avec l’absence de vision et de perspectives à court et moyen termes. Il y a de l’incertitude et le moral des entrepreneurs n’est pas au beau fixe. « Tous les secteurs d’activité sont concernés… La confiance des chefs d’entreprise s’affiche en conséquence à la baisse… Ainsi en 2024, il y a eu une conjoncture économique perturbée sur l’année et contraire aux prévisions à cause des chocs à répétition », constate la directrice de l’IEDOM
Une consommation des ménages en recul également
C’est l’autre fait marquant de cette année 2024 : la baisse de la consommation des ménages mahorais qui représente pourtant un des deux piliers, avec la commande publique, au soutien de l’activité économique. Ainsi les importations de produits courants ont chuté de 17,6 % au 4e trimestre 2024 et les importations de biens d’équipement du foyer de – 5,6 %, toujours au dernier trimestre. Les encours des crédits à la consommation ont également diminué de 1,8 % au T4.
Ainsi, malgré une inflation proche de la cible de 2 % de la Banque centrale européenne (+2,6 % en moyenne annuelle à Mayotte contre 2,1% au niveau national), la consommation des ménages connaît un fléchissement inédit dans l’histoire récente de Mayotte, selon l’IEDOM.
La collecte de dépôts et crédits en progression toutefois
La collecte globale de dépôts par les établissements de crédit continue de progresser (+14,5 % en 2024 après + 12,5 % en 2023). Les actifs financiers détenus par les sociétés et les ménages s’élèvent ainsi à 1,2 milliard d’euros.
La croissance des crédits est portée par les entreprises (les encours de crédits d’exploitation et de crédit de trésorerie augmentent de respectivement 36 % et 31,4 %), tandis que les crédits aux ménages n’augmentent que légèrement, notamment du fait de la stagnation des crédits à la consommation (+0,3 % sur un an).
Ainsi, l’encours global des entreprises atteint 774,8 millions d’euros au 31 décembre 2024 et les crédits aux ménages en légère augmentation (731,2 millions d’euros mobilisés par les ménages au 31 décembre 2024). Les crédits à la consommation sont stables sur un an (+0.3 %) avec un encours à 437,7 millions d’euros. Alors que le crédit à l’habitat avec un encours à 293,3 millions d’euros sont en hausse sur un an (+2,1 %)
Chido a compromis l’activité sectorielle malgré des prévisions optimistes
Selon l’IEDOM, le BTP pourrait conserver son activité malgré les crises, grâce notamment à une relance observée en milieu d’année avec des carnets de commandes garnis. Par ailleurs, pour les mois à venir, le secteur pourrait bénéficier de la reconstruction du territoire…

En revanche l’activité commerciale est en berne. Les attentes du secteur ne se sont pas réalisées et l’activité est restée faible tout au long de l’année (fréquentation des magasins en recul, baisse des effectifs et des trésoreries). Il en est malheureusement de même pour les services marchands qui ont un niveau d’activité aussi en recul. « L’activité du secteur a été morose tout le premier semestre dans la continuité de 2023 avec une évolution irrégulière des carnets de commandes et des trésoreries faibles. La relance observée au troisième trimestre a été freinée par le passage du cyclone et, à ce stade, il est difficile d’anticiper toute forme d’évolution de l’activité », indique l’IEDOM
« Pour l’heure, il est difficile de tracer une trajectoire pour l’année 2025. Les perspectives sont empreintes d’une très grande incertitude avec des prévisions d’investissement difficilement mesurables », estime Daoulab ALI CHARIF.
Toutefois l’institut considère que l’année 2025 sera néanmoins marquée par les premières étapes de la reconstruction du territoire qui devraient être une opportunité pour l’économie et les entreprises mahoraises.
B.J.