Entre mesures d’urgences et convergence des droits, le bilan de la CSSM

La Caisse de Sécurité Sociale de Mayotte (CSSM) a tenu son point presse annuel, vendredi 18 avril, pour faire un bilan sur l’année écoulée, évoquer la gestion post-Chido et énoncer les perspectives d’avenir. La réunion a aussi été l’occasion d’annoncer le départ du directeur général Philippe Féry, après deux années à la tête de la CSSM.

« Dès la première semaine après Chido on a maintenu les prestations, sans demander de pièces justificatives, avec prolongation automatique des droits jusqu’en juin prochain », remarque Philippe Féry, directeur général de la Caisse de Sécurité Sociale de Mayotte (CSSM), lors d’un rendez-vous presse, le vendredi 18 avril. Retraite, maladie, vieillesse, accompagnement social… en mobilisant l’ensemble du réseau des caisses, le CSSM a garanti un versement sans interruption des prestations, selon le directeur général. Au total, 56 millions d’euros ont été versés durant la première semaine après Chido.

Des dispositifs Chido maintenus jusqu’en juin

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La salle Conseil de la CSSM où s’est tenue la conférence de presse

En plus des particuliers, le CSSM a pris des mesures en faveur des entreprises et des indépendants. « On a mis en place un soutien financier à hauteur de 1.000 euros pour les travailleurs indépendants, et de 500 euros pour les auto-entrepreneurs », continue Philippe Féry. « Pour atténuer la pression financière, et maintenir le tissu économique, on a suspendu le paiement des cotisations sociales pour les entreprises, et, là aussi, ce dispositif sera maintenu jusqu’en juin prochain ».

Le CSSM a également soutenu les structures éducatives, sociales, associatives, et accompagné les professionnels de santé. « On a versé plus de 1.3 millions d’euros aux crèches, et les associations qui œuvrent pour l’accompagnement scolaire ont reçu une enveloppe de 100.000 euros », précise le directeur général. Les établissements de soins, surtout le CHM, ont bénéficié d’un paiement anticipé de leurs prestations pour un montant de 38.5 millions d’euros, pour maintenir la continuité des soins et l’approvisionnement en matériel médical.

« Chido nous a montré que Mayotte était bien connectée au reste du territoire, de nombreuses Caisses d’allocations familiales ont fait des efforts pour nous apporter de l’aide financière extra-légale », note Philippe Féry, avant d’ajouter, « maintenant il nous reste à aligner les prestations sociales, on doit terminer l’intégration du territoire ».

Le chantier de l’alignement des droits sociaux

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Le 10 avril dernier, les syndicats ont montré leur colère face à un projet de loi programme qui repousse, selon eux, la convergence des droits sociaux

Une question de l’alignement des droits sociaux, pour laquelle le directeur se bat depuis sa prise de fonction. « C’est un grand chantier ! Aujourd’hui seules huit prestations sont alignées sur vingt-un. Il est anormal que les familles de Mayotte n’aient pas les mêmes droits qu’en métropole, alors que les courses coûtent 10% plus chères. Ce n’est pas normal non plus que cinq prestations soient servies à 50% du montant national. Le conseil se battra à l’avenir pour cet alignement social ». À noter que huit prestations familiales ne sont pas du tout servies à Mayotte, comme le revenu de solidarité outre-mer (RSO), l’allocation de soutien familial ou encore l’aide personnalisée au logement. 

« L’alignement des prestations familiales est une question de justice sociale, mais la convergence des droits doit s’accompagner d’une convergence des devoirs. Il ne peut y avoir une décision unilatérale de l’alignement, c’est un débat de société. La question est de savoir si l’économie mahoraise peut aller plus rapidement en matière de convergence qu’initialement prévue », ajoute Philippe Féry.

Après la départementalisation en 2011, puis les promesses d’un alignement à l’horizon 2025, repoussé en 2031, à travers le projet de loi programme, la course pour la convergence semble « sans fin », pour les syndicats qui ont manifesté le 10 avril dernier devant le Conseil départemental, lors du rendu de l’avis consultatif sur le projet de loi programme. Ces derniers ne comprenaient pas pourquoi la retraite n’était toujours pas alignée avec le niveau de l’hexagone, en raison de la présence de nombreux actifs dans la population mahoraise. Ben Issa Ousseni, avait de son côté indiqué l’opportunité d’utiliser les « excédents de la CSSM » pour accompagner l’alignement des droits.

La CSSM « déficitaire de 361 millions d’euros »

« La CSSM n’est ni à l’équilibre, ni à l’excédentaire mais en déficit ! », a insisté Philippe Féry, qui précise que si la branche vieillesse est excédentaire, ce n’est pas le cas des autres branches, et que la CSSM est déficitaire de 361 millions d’euros. « Un déficit normal dû à l’accroissement de la population », affirme le directeur. « Pour les jeunes, avant qu’ils entrent en activité et cotisent pour financer la sécurité sociale, il va falloir du temps. Actuellement on est en déficit et si on va vers une convergence sociale on sera toujours en déficit, et c’est pour ça qu’il faut mettre tout le monde autour de la table sur cette question de la convergence ».

En attendant une convergence complète des droits, le CSSM a tenu à indiquer ses avancées sur l’année écoulée. « La complémentaire santé solidaire, qui est évaluée selon les mêmes barèmes que la métropole, est désormais pleinement déployée à Mayotte et elle sera versée automatiquement pour les personnes assurées pour faciliter son accès », relève Nourdine Dahalani, président du Conseil de la CSSM. La CSSM continue aussi son travail pour permettre l’application de la protection universelle maladie (PUMa) qui donnera aux enfants, dès 16 ans, une autonomie en termes de droits avec l’obtention de leur propre carte vitale.

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Philippe Féry (à gauche), laisse sa place à la tête de la CSSM à la fin du mois d’avril. Il sera remplacé par Christophe Van Der Linden.

Des enfants que la CSSM aide également grâce à un soutien aux établissements scolaires et aux centres de loisirs. Parmi ces aides, le directeur de la CSSM se bat pour que tous les élèves de Mayotte disposent d’un plat unique gratuit et d’un fruit, en plus de la cantine scolaire. En 2024 ce dispositif a aidé 68% des élèves pour un montant de 17.3 millions d’euros.

Du côté des retraites, « nous avons enfin terminé les travaux de reconstitution des carrières pour pouvoir donner une pension justifiée à tous », a ajouté Philippe Féry.

Le directeur quitte d’ailleurs ses fonctions à la fin du mois d’avril après deux années à la CSSM. Il sera remplacé par un directeur par intérim, Christophe Van Der Linden, qui a travaillé en Martinique, à La Réunion, ou encore en Corse. « Ces deux années étaient riches, on a beaucoup progressé ensemble et Philippe Féry a le droit à du repos, ce fut un plaisir », conclut Nourdine Dahalani.

Victor Diwisch

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