Le sommet de la Commission de l’océan Indien s’est tenu le 24 avril dernier mais l’échange interposé entre Emmanuel Macron, qui a plaidé pour l’intégration de Mayotte dans l’instance, et le président de l’union des Comores, Azali Assoumani, est encore dans toutes les têtes. Ce matin du 29 avril, la députée Anchya Bamana a caractérisé le moment de « véritable humiliation pour notre pays », lors d’un discours à l’Assemblée nationale. « Le président Azali Assoumani a une fois de plus nié l’appartenance de Mayotte à la France sans que notre président ne quitte la table ni n’oppose la moindre réaction de fermeté », a ajouté la députée du Rassemblement national, « il a tenté de maquiller son renoncement en une avancée diplomatique en renvoyant au dialogue bilatéral qui n’a jamais rien produit depuis 1999″. « Face à cette humiliation récurrente la France devrait suspendre sa participation et ses financements à la COI tant que Mayotte ne soit pleinement reconnue comme La Réunion », a plaidé Anchya Bamana.

« Je n’ai pas vu d’humiliation, contrairement à d’autres le président a affirmé devant les instances de la COI qu’il voulait que Mayotte participe aux programmes de la Commission. C’est pour cela que le président Azali Assoumani a réagi comme cela », lui a répondu Thani Mohamed Soilihi, le ministre délégué auprès du ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, chargé de la Francophonie et des Partenariats internationaux. Le ministre défend une approche forte et offensive de la part du chef de l’Etat, qui a voulu faire de l’intégration de Mayotte une question prioritaire dès l’ouverture du sommet.
Il a précisé par la suite que l’arrêt des financements de la COI par la France laisserait la place à des pays comme la Chine ou l’Inde, « qui n’attendent que ça », selon lui. « Je vous invite à rejoindre ce combat de l’intégration de Mayotte avec nous pour finir par le gagner« , a conclu Thani Mohamed Soilihi, signe que les échanges diplomatiques sont la priorités du Gouvernement.
Des échanges qui doivent également s’opérer auprès des autres Etats membres de la COI et pas seulement les Comores.

Car si l’intégration institutionnelle n’est pas acquise, le Gouvernement voulait avancer sur une intégration régionale pragmatique avec la multiplication des échanges économiques, culturels, diplomatiques entre Mayotte et ses voisins. « Nos territoires font face aux mêmes défis, et ces défis ne connaissent pas les frontières« , avait signalé Emmanuel Macron dans son discours d’introduction. Pour cela le président de la République avait convié des élus mahorais dont Ben Issa Ousseni lors de commissions afin de représenter les intérêts de Mayotte et de la France directement auprès des autres délégations. L’objectif était de montrer les débouchés économiques, culturels, touristiques et humains, d’une plus importante collaboration avec Mayotte, comme cela s’opère avec La Réunion.
Autre signe de cette volonté diplomatique, le mardi 22 avril, au lendemain de la visite du chef de l’Etat à Mayotte, une convention opérationnelle a été signée entre le ministère des Outre-mer, le ministère des Affaires Etrangères et le Conseil départemental de Mayotte, pour permettre le déploiement d’agents municipaux dans les missions diplomatiques et consulaires françaises menées dans la région.
Une voie diplomatique qui nécessitera du temps et des échanges avec les autres pays mais qui, selon ce qui ressort des dispositifs mis en place, peut permettre à terme d’isoler les Comores et le président Azali Assoumani sur la scène régionale.

Le but n’est pas plus de rompre totalement avec les Comores. Lors de sa visite à Mayotte, Emmanuel Macron a indiqué vouloir reconduire 35.000 clandestins par an contre 25.000 actuellement, et depuis la crise de 2019, les Comores n’ont pas opposé de barrière à la réadmission de ces personnes sur leur territoire. Sur ce point, l’intégration de Mayotte à la COI et la question de l’arrêt de l’aide au développement versée aux Comores se rejoignent. Le Gouvernement ne souhaite pas prendre de décisions unilatérales et jouer avec les leviers diplomatiques.
Entre humiliation et offensive diplomatique chacun fera son choix, mais la voie de la diplomatie et du travail de l’ombre risque de ne pas satisfaire une partie de la population qui demande des mesures fortes et concrètes, que ce soit sur l’intégration régionale ou la refondation du territoire.
Victor Diwisch