À Mayotte, les plaies du cyclone Chido ne sont pas refermées. Et ce matin du 21 avril, l’île attend de pied ferme celui qui, en décembre, avait promis : « On rebâtira Mayotte. »
Emmanuel Macron est de retour. Avec Brigitte Macron à ses côtés, mais également Manuel Valls, ministre d’Etat, ministre des Outre-mer, Annie Genevard, ministre de l’Agriculture, Yannick Neuder, ministre de la Santé et de l’Accès aux soins, et Thani Mohamed-Soilihi, ministre délégué chargé de la Francophonie et des Partenariats internationaux (à Mayotte), le chef de l’État foule de nouveau le sol mahorais, quatre mois après le passage de Chido, cyclone d’une rare violence qui a laissé l’archipel à genoux, révélant la grande précarité des habitants de l’île, antérieure au cyclone, vivant pour la plupart dans des habitations en tôle.

Ce retour présidentiel n’est pas qu’un symbole. Il se veut un signal fort : celui d’un ancrage régional assumé. Le président voit dans Mayotte « le centre de l’océan Indien », un axe stratégique qu’il souhaite consolider, notamment à l’approche de la Commission de l’Océan Indien, qui aura lieu le 24 avril prochain.
L’avion présidentiel s’est posé aux alentours de 8 h 30. Le couple présidentiel a descendu les marches avant de saluer les députés, les élus, le préfet, sous un soleil de plomb. « Il faut une reconstruction durable de Mayotte« , annonce le président face aux caméras des journalistes. « Il faut une ambition forte, le texte de loi programme ne pourra régler les problèmes à lui tout seul. D’autres moyens seront nécessaires, il y aura toute une programmation mise en place suite à ce texte« , a ajouté le chef de l’Etat, avant de prendre la route en direction de Grande-Terre.
Dans un briefing donné quelques jours plus tôt aux journalistes, le conseiller Outre-mer du président a tenu à cadrer : « Le bilan humain du cyclone n’est pas un sujet politique. Le président n’en parlera pas. » Cette décision avait fait grincer quelques dents. D’autant que les séquelles sont visibles, les deuils encore frais, et les traumatismes pas vraiment digérés. Mais l’Élysée veut projeter Mayotte dans « le temps de la reconstruction », la deuxième phase annoncée par le Président de La République, après « le temps de l’urgence » comme il le soutenait le 19 décembre 2024.
Un conseil des ministres aérien dédié à Mayotte
Une « urgence » qui l’amène à présider un conseil des ministres « dans l’avion » à l’issue de son déplacement, dédié à Mayotte, où seront présentées « une loi organique et une loi-de programmation pour la reconstruction de Mayotte (… ) après lecture au conseil d’Etat », annonçait le président depuis le tarmac de Pamandzi. Il ne s’agira pas seulement de réparer les toitures arrachées et les routes effondrées, mais de « rendre Mayotte plus belle qu’elle ne l’était avant Chido », avait soutenu le Président. Une phrase pleine d’ambition. Et d’enjeux. Car la reconstruction patine. Malgré la loi d’urgence votée en février, les matériaux manquent et la coordination est laborieuse.

La visite présidentielle prend aussi une portée régionale marquée. Mayotte, comme La Réunion, a été frappée par un cyclone violent. Les deux îles se retrouvent confrontées aux défis de la sécurité alimentaire, exacerbés par le changement climatique. Là où La Réunion affirme une certaine autonomie agricole, Mayotte reste fragile. Macron veut faire de la coopération régionale un levier de résilience face aux tensions mondiales sur l’alimentation.
La journée se poursuivra par une rencontre et des échanges avec la population mahoraise, une présentation d’une exploitation agricole, puis des échanges avec les élus mahorais au sujet du projet de loi de programmation pour la re-fondation de Mayotte. L’accueil, on le sait, pourrait être tendu. Une journaliste l’avait demandé lors d’un briefing. L’Élysée admet : « En décembre, il y avait de la détresse, de la colère, on l’a vu à Pamandzi. Mais ce n’est pas représentatif de l’ensemble de la venue du président après le cyclone. »
Alors ce 21 avril, Emmanuel Macron revient pour « voir, pour montrer, pour dire ». Il revient aussi pour être vu par un territoire qui, lui, attend bien plus que des mots. À Mayotte, la République se joue en première ligne.
Mathilde Hangard, Victor Diwisch