Opération Darmanin : phase de repérage avant les pelleteuses à Talus 2

A la veille de la démolition, le balisage de la vingtaine de cases à ne pas détruire car sous l’effet d’une décision judiciaire était l’occasion pour les services de la préfecture et de la mairie de Koungou d’avoir un ultime échange avec les habitants qui doivent avoir quitté les lieux dès ce lundi soir.

Dans la perspective de la démolition du quartier insalubre et à risque de Talus 2 à Majikavo Koropa, une dernière opération de repérage était menée par la préfecture, accompagnée des services de Electricité de Mayotte (EDM) et de Tétrama. Il s’agissait notamment de marquer à la bombe la vingtaine de cases qui ne seront pas démolies car faisant l’objet d’un recours par leurs habitants. Ils seront jugés le 2 mai 2023.

L’opération menée dans le cadre de l’ANRU (Agence Nationale de Rénovation Urbaine), a déjà été présentée à d’éminentes personnalités, avec moins de présence sécuritaire, dont la présidente de l’ANRU, Catherine Vautrin, et le ministre chargé de la Ville et du logement Olivier Klein.

Intervention sur les compteurs par un agent d’EDM qui indique que le courant sera coupé peu avant la démolition

Cette fois, en raison de la médiatisation de l’opération de restauration de l’ordre public de Gérald Darmanin, c’est jalonné de gendarmes et policiers municipaux que le chemin serpentant au milieu des cases est emprunté pour finaliser la préparation de l’opération de démolition prévue pour le lendemain, et c’est indispensable pour l’agent EDM présent sur les lieux : « Quand nous venons pour examiner les compteurs, les habitants refusent de nous ouvrir la porte. Ce n’est qu’avec des actions sécurisées comme celle-là que nous pouvons les rencontrer et faire l’inventaire des risques. »

Une zone de danger imminent

Au dessus de sa tête, deux câbles électriques sont rafistolés avec du scotch à l’air libre, « l’électricité est prise chez un voisin. En cas de pluie et d’infiltration d’eau, si celui-ci a une installation de protection en cas de court circuit, ça va stopper l’alimentation, mais dans le cas contraire, l’électricité va descendre au bas du mur jusqu’au sol avec un fort risque d’incendie. Mais ça c’est rien, dans certains bidonvilles, ils détournent la liaison à la terre des installations aériennes de EDM, c’est très dangereux. »

Rafistolage dangereux des câbles électriques

Pendant ce temps là, les cases à ne pas détruire sont notées avec une flèche ou un cercle. Une habitante s’avance, « nous avons reçu un appel nous disant que les sites de relogement n’étaient pas prêts ». Psylvia Dewas, nommée depuis février 2022 experte de haut niveau auprès du préfet de Mayotte, chargée de la résorption de l’habitat illégal et de la construction de logements sociaux et de villages relais-Logement, l’invite à se rendre à l’école de Koropa, transformée pendant ces vacances scolaires en centre d’information pour rediriger les habitants vers leurs logements.

Deux sites sont réservés à cette opération, tous deux à proximité notamment pour préserver la scolarité des enfants, celui de Bandrajou de logements en dur avec étage, et celui de Hamachaka, un ensemble d’Algeco avec cuisines communes. Ce sont des logements provisoires en attendant la reconstruction non loin du site du Talus 2.

Avantages et inconvénients des relogements provisoires

Présence de cloisons de séparation dans une des cases dont les équipements seront pris en charge ce mardi

Une habitante revendique le maintien en l’état de sa maison, « elle est en dur ». C’est Fatima, qui avait interpellé le ministre Olivier Klein se faisant la porte-parole des habitants : « Ici, vous avez des gens qui habitent depuis 35 ans, certains sont mahorais, d’autres étrangers comme moi. Nous avons demandé à pouvoir régulariser les terrains pour ensuite demander un permis de construire, mais sans réponse ». Elle convenait que l’endroit est insalubre, « il n’y a pas d’eau, pas de poubelle », et à fortiori pas de canalisation d’évacuation des eaux usées. Pour autant, elle expliquait au ministre « ne pas vouloir habiter dans un container », d’une superficie insuffisante, « seule la moitié d’une famille peut y vivre ! »

Un peu plus loin, Moustafa* est devant la maison de sa sœur, « elle est allée voir si elle pouvait obtenir un logement à Bandrajou, parce que ceux qu’ils nous proposent en Algéco, c’est n’importe quoi, on ne peut pas y vivre. Il n’y a pas de séparation à l’intérieur de l’unique grande pièce, pas d’intimité, explique-t-il en nous faisant visiter l’actuelle case de sa sœur aux parois qui ne montent pas jusqu’au toit mais qui assurent une séparation entre les lieux de vie.

Nous avions émis la même remarque lors de la visite des Algéco qui vont servir de logement intermédiaire, « il y a des rails en hauteur, pour y installer des séparations coulissantes », nous avait-on indiqué. Un programme d’accompagnement éducatif des enfants est mis en place, aide aux devoirs, etc.

L’aménagement du bloc d’Algeco de logements temporaires à Hamachaka

Sur cette opération, les familles seront suivies sur une insertion en emploi pour pouvoir ensuite être éligible à l’intégration des logements SIM. D’autre part, une salle commune est prévue pour les élèves afin de leur proposer une aide aux devoirs

Ce mardi, les pelleteuses entreront en action.

Anne Perzo-Lafond

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