Participer à la reconstruction en plantant des arbres, des bénévoles répondent à l’appel des Naturalistes sur le site de la Gouloué

Débuté en novembre 2024, le reboisement de la vallée de la Gouloué, près de Passamainty, a repris après le passage du cyclone Chido. Ce samedi 15 février, l’association des Naturalistes de Mayotte, chargée du projet, a pour la première fois fait appel à des volontaires pour la plantation. Un moyen pour une dizaine de personnes de participer à la reconstruction de Mayotte.

Dans la vallée de la Gouloué, à quelques kilomètres de Passamainty, il ne reste plus grand chose de la forêt galerie qui recouvrait la rivière, de chaque côté de son lit. Le cyclone Chido a fortement endommagé les arbres situés dans une zone déjà atteinte par l’agriculture sur brûlis. Deux mois après, au milieu des jeunes bananiers, quelques manguiers à moitié dénudés tiennent encore debout. Perchés dans leurs branchages, des familles de makis se reposent, ce samedi au matin. Lorsque la forêt était encore dense et intacte, ils étaient les seuls à pouvoir voir l’îlot Mbouzi depuis les hauteurs, désormais le lagon est visible entre les arbustes.

Depuis 2024 la vallée fait l’objet d’un reboisement dirigé par l’association des Naturalistes de Mayotte. Le projet, financé à hauteur de 75.000 euros suite à un appel aux dons réalisé en 2022 dans l’émission « Aux arbres citoyens », diffusée sur France 2, et par France Nature Environnement, à pour objectif de planter 2.500 arbres forestiers et 1.500 arbres fruitiers.

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Les Naturalistes espèrent que 40% des arbres plantés résisteront dans la durée.

Pour mettre en terre ces milliers d’arbustes, l’association a toujours sollicité des groupes ou des structures, comme les cadets citoyens de la gendarmerie ou le Service national universel, mais ce samedi c’est la première fois qu’un appel aux volontaires a été lancé. Ils sont une dizaine à avoir répondu présent, tous animés par ce désir de reconstruire Mayotte après la catastrophe.

 

« Après Chido ça me parait essentiel de participer à la reconstruction de la nature »

« Le but est de planter les arbres à un mètre les uns des autres en alternant les espèces », explique Alicia Sedani au groupe de bénévoles, avant de leur montrer les arbustes dans des cagettes, achetés à la pépinière locale Pot Concept. Albizia glaberrima, Ficus sycomorus, Tamarindus indica, Dendrolobium umbetallum ou encore Gagnebina pterocarpa… petits, moyens ou grands, divers espèces d’arbres indigènes ont été sélectionnées pour recréer la forêt et ses différentes strates arborées.

Une fois briefés, les bénévoles ont arpenté le site de part et d’autre de la rivière de 9h à 12h, munis d’une pelle et d’une paire de gants. Un travail sur des terrains pentus, où le sol est parfois très dur, qui demande une certaine rigueur, mais qui n’a découragé personne.

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Albizia glaberrima, Ficus sycomorus, Tamarindus indica, Dendrolobium umbetallum ou encore Gagnebina pterocarpa… tous les arbres plantés sont indigènes à Mayotte.

« Le lendemain de Chido on a fait tout le tour du nord de l’île et c’était un cauchemar, il y avait des arbres centenaires coupés en deux », se souvient Christophe qui est venu avec sa femme Thi, elle aussi très marquée par l’état du paysage après le cyclone. « Je suis tombée sur l’appel des Naturalistes et je me suis immédiatement portée comme bénévole pour faire quelque chose pour l’environnement », témoigne-t-elle, plein d’énergie.

« Après avoir vécu Chido et observé ses ravages, ça me parait essentiel de participer à la reconstruction de cette nature. Mayotte c’est un joyau, et je veux être là pour le préserver, c’est important », souligne Alexia, après avoir déjà planté plus d’une dizaine d’arbres en quelques heures. « Avant je ne regardais pas forcément les activités des associations mais après le cyclone j’ai vu tellement d’annonces pour aider Mayotte, et ça m’a donné envie de participer à la reconstruction de l’île. C’est ma motivation première ! », explique de son côté Léa, entre deux plantations.

L’enjeu de la préservation de la ressource en eau

Situé sur des terrains cultivés, le reboisement est réalisé en partenariat avec les agriculteurs. En échange de la plantation d’arbres forestiers, l’association doit y planter des arbres fruitiers, comme des corossoliers, des arbres à pain, des cacaoyers ou des goyaviers… pour que l’agriculteur bénéficie d’une plus-value.

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Le reboisement permettra de préserver la rivière de la Gouloué, l’une des plus grande de Mayotte.

L’endroit n’a pas été choisi au hasard, car au-delà de la forêt c’est la préservation de la ressource en eau et de la rivière Gouloué, une des plus importantes de Mayotte, qui est en jeu. « La rivière se situe dans le périmètre de protection rapprochée des captages d’eau potable ce qui indique que la bande de 15 mètres autour du cours d’eau est particulièrement sensible. Avec leur transpiration, les arbres vont augmenter la quantité d’eau, et ils vont également la filtrer », indique Alicia Sedani.

« Chido a énormément marqué les gens qui ont vu les dégâts ou qui ont vécu le cyclone. Beaucoup d’entre eux comprennent l’intérêt du reboisement et ont eu envie de participer. Il y a un certain engouement », a observé Alicia Sedani, contente de la demi-journée de travail. Accompagnée de Lisa, une autre bénévole, elle entame le marquage des arbres plantés afin de pouvoir observer leurs évolutions. L’association espère qu’au moins 40% des arbustes vont résister et faire partie de la nouvelle forêt.

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Les arbres ont été mesurés et leurs coordonnées GPS ont été notées afin de suivre leurs évolutions.

Dans les prochaines semaines de nouveaux appels aux bénévoles sont prévus par les Naturalistes, mais en attendant si le public semble avoir pris la mesure des enjeux du reboisement, surtout après Chido, les traces de feux sur le site montrent une autre réalité. Certains agriculteurs qui ont tout perdu et qui souhaitent re-planter rapidement après le cyclone sont tentés par le brûlis, une pratique interdite. Pour retrouver la densité et l’écosystème des forêts mahoraises et ainsi en bénéficier il faudra réussir à changer toutes les pratiques et les mentalités.

Victor Diwisch

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