Parmi les nombreuses affaires de violences familiales inscrites au rôle des audiences à juge unique de ce mercredi, deux s’avéraient particulièrement révélatrice du climat général et de cette réalité sociologique sur le département.
La première affaire traitée concerne un jeune de 23 ans, comparaissant pour des faits de violence sur une personne avec circonstance d’un ascendant légitime : en d’autres termes, son propre père.
Ainsi à Dzaoudzi le 25 octobre 2021, celui-ci se serait rendu à l’épicerie de son père, l’aurait bousculé avant de lui asséner plusieurs coups de poings au visage, tout en le menaçant de revenir. Les déclarations du père indiquent que le prévenu aurait déjà lancé des pierres sur sa boutique, et aurait brandi devant lui un chombo en bois avec des clous. Une affaire comme on en voit souvent, au cours de laquelle le jeune homme se défendait en expliquant que les coups portés étaient involontaires, ce que le substitut du procureur semblait avoir peine à croire. Le casier du jeune homme est en effet déjà bien garni, puisqu’il avait déjà été condamné à deux reprises pour des faits de violence, sans rapport avec cette affaire, et condamné à deux ans de prison avec un an de sursis mise à l’épreuve.
« J’en viens plutôt à prendre parti pour la victime » déclarait le substitut du procureur, avant de demander une peine de 3 mois d’emprisonnement.
Puis, la juge unique commençait alors à annoncer sa décision, avant de se souvenir que lors d’une audience, le prévenu a la parole en dernier. Prise de parole qui allait sûrement changer peu de chose à la décision visiblement déjà prise de la juge… Il sera finalement relaxé, puisque « la seule parole de la victime ne permet pas de conclure que les gestes étaient volontaires ».
Violences conjugales
Autres personnages et autre affaire, mais tout aussi typique du territoire. Le prévenu, un homme de 26 ans, était poursuivi pour plusieurs faits de violences conjugales sur sa conjointe, mère de ses enfants. Respectivement commis le 4 mars 2021 et courant 2020 jusqu’au 31 janvier 2021, les faits s’avéraient flous et complexes, et les versions différentes. La victime avait alors déposé plainte à plusieurs reprises pour des coups, et tous deux raconteront à la barre leur version des évènements, incluant des gifles, des morsures, des coups de fouet même… Quoiqu’il en soit, l’expertise médicale attestera de plusieurs lésions sur le corps de la jeune femme, suite à ces altercations que le prévenu minimisera et niera partiellement. « Il m’a poussée dans les escaliers, m’a jetée par terre, m’a tapé la tête sur un mur, il a aussi failli m’écraser avec sa voiture »… Des différends liés à une histoire de pension alimentaire non payée par le prévenu à la mère de ses enfants, parce qu’estimée « trop chère » par ce dernier.
« Ce sont encore des faits de violences conjugales que vous avez à juger » déclarera le substitut du procureur dans ses réquisitions, pointant du doigt la récurrence de ce type d’affaire à Mayotte. Le prévenu sera finalement reconnu coupable et condamné à 6 mois d’emprisonnement assortis d’un sursis probatoire d’une période de deux ans, une interdiction de paraître au domicile de la victime, et d’entrer en contact avec elle hormis l’exercice de l’autorité parentale. Sans compter quelques 2000 euros de préjudice moral et physique à verser à la victime.
De nouvelles affaires qui montrent une fois encore que les violences intrafamiliales restent légion à Mayotte, berceau potentiel d’une jeunesse évoluant dans une violence presque banalisée devenue vulgaire et quotidienne. Un point de départ très réaliste de la délinquance et de ses dérives au cœur du 101ème département…
Mathieu Janvier