L’épidémie de gastro sous « les normales de saison »

C’est le contexte de pénurie d’eau, premier remède préventif et curatif contre la gastroentérite, qui incitait l’Agence régionale de Santé à organiser un point presse ce mardi.

On aurait toutes les raisons de ne pas s’inquiéter, la période épidémique « normale » de la gastroentérite de juin à septembre touchant à sa fin. Surtout que si 25% des passages aux Urgences fin août concernent des enfants de moins de 5 ans atteints de gastro, ils étaient 39% en 2019 lors du pic épidémique. « Nous sommes sous les normales saisonnières », rassure tel un météorologue le docteur Youssouf Hassani, responsable de la Cellule Mayotte chez Santé Publique France.

Mais il faut compter avec la pénurie d’eau, pourtant LE remède à la fois en ingestion pour le malade, et pour le lavage des mains. Le nombre de prélèvements de 69% sur cette semaine à cheval entre août et septembre est le marqueur d’une épidémie, note Olivier Brahic, Directeur général de l’ARS Mayotte, « il y a circulation du germe ». Davantage d’antidiarrhéiques ont été vendus dans les officines, et les médecins sentinelles avertissent d’une accroissement des diarrhées, « mais dans les normes ».

« Nous avons eu une augmentation de fréquentations de 50% aux Urgences le week-end dernier, informe le docteur Alimata Gravaillac, Cheffe du service des urgences du Centre Hospitalier de Mayotte. Dur, dur, quand on connaît la tension en personnel dans ce service du CHM, « en box pédiatrique, nous avons un accroissement de 70% des gastro, pas toutes graves, ce qui implique de faire passer une information aux parents. »

CHM, Mayotte, Urgences, ARS, Plan blanc
Les urgences sur-sollicitées le week-end dernier

Pas la peine de surcharger les urgences en effet, plusieurs étapes sont à suivre avant. « Les familles doivent donner à l’enfant malade un antidiarrhéique et le faire boire, recommande le docteur Chamouine Abdourahim, et ensuite, si cela ne passe pas, et en cas de perte de poids continue, surtout chez le nourrisson, consulter le médecin de proximité. » Ce n’est qu’après qu’il faut se rendre aux urgences, mais on sait qu’à Mayotte, et faute d’AME, les urgences sont sollicitées aussitôt.

Lavage des mains en mode dégradé

Il faut donc agir en prévention en renforçant les mesures d’hygiène, rappelle le docteur Maxime Ransay-Colle : « Le lavage des mains avec eau et savon après être allé aux toilettes, avant de manger, et pour les parents, avant de préparer le repas, surtout en collectivité, est indispensable. » La crise de l’eau a donc forcément un impact sur cette hygiène quotidienne. La plupart du temps, l’eau est stockée dans une bassine ou un seau, où les membres de la famille se lavent les mains. « Si l’un d’entre eux est malade, le passage au gel hydroalcoolique est indispensable pour tuer les germes, et il vaut mieux ne pas mélanger le lavage de la famille avec lui. » Idem, ne pas garder l’eau trop longtemps et nettoyer le seau avant de le remplir à nouveau, sont des consignes à respecter.

Les docteurs Ransay-Colle et Hassani

L’ARS Mayotte est également en veille sur deux cas supplémentaires de fièvre typhoïde, portant à 9 le nombre de malade sur l’année, « c’est une maladie endémique à Mayotte, nous sommes montés à 123 cas en 2022, avec une contagion par les mains, commente Olivier Brahic. Il ne s’agit pas de foyer mais de deux cas isolés. Mais dans le contexte, j’ai demandé la vaccination de tous les cas contacts identifiés. » La cause possible, la contamination par ingestion d’eau d’un puits, « je rappelle que ces eaux ne sont pas potables, ni bonnes pour se laver les dents. »

Pas d’inquiétude outre mesure donc pour l’ARS Mayotte qui organisait ce point presse pour faire œuvre de « transparence », surtout qu’il faut prendre en compte que les services sont plus performants dans l’identification des germe grâce à la période Covid », soulignait le docteur Chamouine Abdourahim.

Anne Perzo-Lafond

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