L’Insee Mayotte a exploité les données de la plateforme Parcoursup pour les élèves mahorais concernant le souhait des jeunes bacheliers dans leur parcours post bac et dans leur projet d’études supérieures. À Mayotte, en 2022, les néo-bachelières et néo-bacheliers s’orientent davantage vers un BTS qu’ailleurs (30 % contre 19 % dans l’Hexagone), et ils sont 68% à accepter une proposition d’admission pour poursuivre leurs études supérieures hors de l’île.
Trois fois plus de places en première année dans le supérieur en 10 ans
Toujours selon l’Insee, les places offertes dans la région « sont bien moindres que le nombre d’élèves qui souhaitent poursuivre leurs études », même si les capacités d’accueil ont triplé ces dix dernières années, notamment en première année, comme l’a indiqué le recteur de Mayotte, Jacques Mikulovic. « En 2015, il y avait 500 places en première année dans l’enseignement supérieur à Mayotte. En 2025, nous en proposons 1.650. Certes cela demeure encore insuffisant mais l’offre de formations tend de plus en plus à répondre à la demande… ». C’est pour cela qu’il y a davantage de séries technologiques et moins de générales à Mayotte que dans l’Hexagone. Ainsi quand il n’y avait que 9 spécialités de BTS en 2015 dans l’île, elles sont aujourd’hui au nombre de 22. Et ce nombre ne va pas diminuer malgré le passage de Chido et les nombreux dégâts engendrés, notamment au sein des différents établissements. « L’offre de formations dans l’enseignement supérieur sera maintenue à la rentrée prochaine », a assuré le recteur. Aussi, malgré une nette progression depuis les années 2010, l’offre de places en 1ère année dans le supérieur reste insuffisante sur l’île, note l’institut.
Plus des 2/3 des bacheliers acceptent de quitter le territoire afin de poursuivre leurs études supérieures
Les élèves de Mayotte acceptent très souvent une proposition d’admission hors de l’île. C’est le cas de 68 % d’entre eux contre 35% pour la Corse, 33% pour la Guyane et 19% pour La Réunion. En effet, la nationalité française ou un titre de séjour est requis pour quitter l’île mais aussi pour étudier à l’Université. Les élèves de nationalité française ont donc plus de chance d’étudier hors de l’île et de s’inscrire en licence. Les élèves de nationalité étrangère restent davantage étudier à Mayotte (environ 37% en BTS). Parmi les élèves de Mayotte qui acceptent une proposition d’admission sur Parcoursup, plus de la moitié le font pour une formation dans l’Hexagone (principalement en Occitanie, en Auvergne-Rhône-Alpes, en Nouvelle-Aquitaine et en Bretagne) et environ 1/6 pour une formation à La Réunion. Ainsi, Mayotte est la région de France où les souhaits de départs des élèves sont les plus importants.
Les déterminismes sociaux ont la vie dure…
Les filières dites « sélective » ou « d’excellence » sont délaissées par les élèves mahorais « en lien avec une origine sociale plus défavorisée et dans une plus grande difficulté de la maitrise de la langue française », selon l’Insee. Le niveau scolaire moins élevé des néo-bachelières et néo-bacheliers à Mayotte est notamment lié à leur origine sociale. « La part des élèves d’origine sociale défavorisée est bien plus élevée à Mayotte qu’ailleurs (65 %), en lien avec une pauvreté plus importante », constate l’Insee. Les difficultés en français à l’écrit sont ainsi nombreuses : en 2022, 47 % des 18-24 ans ont des difficultés à l’écrit en langue française contre 6 % dans l’Hexagone et 10 % à La Réunion. En effet, les élèves mahorais ayant une origine sociale plus défavorisée, ils s’orientent moins souvent vers les filières « sélectives » comme les BUT (Bachelor universitaire de technologie), médecine, classes prépa ou écoles d’ingénieur ou de commerce, d’après l’Insee.
Poursuivre la mise en place de filières sélectives
C’est le souhait du recteur : continuer à proposer des filières sélectives à Mayotte afin que les élèves mahorais puissent accéder aux Grandes écoles. « Nous devons continuer à développer l’enseignement supérieur à Mayotte avec notamment l’ouverture d’un BUT. En 2024, nous avons inauguré le Pôle des métiers de l’aérien en Petite-Terre, il y a aussi le Pôle des métiers du bâtiment à Longoni ». En ce qui concerne les filières « sélectives » comme les classes préparatoires aux Grandes écoles, Jacques Mikulovic indique qu’une prépa littéraire hypokhâgne/ khâgne (préparant notamment au concours des prestigieuses écoles Normale Sup’) devrait ouvrir au lycée de Chirongui à la rentrée 2026. Après celles du lycée de Sada (écoles de commerce), du lycée Bamana (écoles d’ingénieur) et du lycée des Lumières (ATS), ce sera donc la 4e classe préparatoire dans l’île. « C’est un symbole fort de proposer une prépa littéraire sur ce territoire car on connait les difficultés des élèves mahorais dans la maîtrise de la langue française… », a fait remarquer Jacques Mikulovic.
Enfin petit hic… seulement 30% des bacheliers mahorais accèdent en 2e année d’études supérieures à Mayotte, et sans doute encore moins pour ceux se trouvant en métropole.
B.J.