A travers la clôture qui encercle le site du futur quartier de Carobolé, à Koungou, les habitants regardent les ouvriers réaliser les premiers travaux de terrassement, ce jeudi 15 mai. Le tracé de la route, qui traversera du nord au sud les 5 hectares du site, est déjà visible au milieu de la végétation, et alors que la construction des premiers logements doit commencer en 2026, elle permet déjà de s’imaginer à quoi va ressembler le nouveau quartier.
« Recréer les habitudes de déplacement des habitants »

Près de deux ans après la signature de la concession d’aménagement, entre la Ville de Koungou et le groupement SIM-Colas, en juin 2023, l’opération qui souhaite marquer le renouvellement de la commune se poursuit. « La première phase consiste à aménager l’entrée Sud avec le profilage de la voirie centrale, puis la mise en place de cheminements piétons qui permettront de parcourir le site de haut en bas pour reconnecter le village. Le but est de recréer les habitudes de déplacement des habitants en permettant de le traverser comme avant », indique Vanille Guichard, directrice aménagement et renouvellement urbain à la mairie de Koungou, chargée du projet. « Sur ces chemins il y aura des espaces publics avec par exemple des farés et des places pour préparer les manzarakas, mais aussi des points de vue en raison du dénivelé. En gérant correctement ces espaces, on va maîtriser la densité. Ce n’est pas parce qu’on a plus de 420 logements, qu’on va avoir une cité », se réjouit Vanille Guichard, qui après avoir participé à toutes les étapes du projet depuis 2021 en observe la concrétisation.
Une première liste de 60 ménages

Une concrétisation qui a entraîné un engouement auprès des habitants évacués du site en 2021 et signataires des conventions de relogement avec la Ville. L’avancée des travaux leur permet de se projeter dans l’avenir et ils ont été nombreux à participer aux permanences sociales d’accompagnement, qui se sont tenues de novembre 2024 au 5 avril dernier, pour affiner leurs dossiers et déposer leurs demandent de logement social, en espérant pouvoir obtenir une indemnisation pour s’installer dans le nouveau quartier. « Les permanences ont vraiment permis aux ménages de retrouver les justificatifs qui prouvent qu’ils habitaient bien le bidonville. On a dressé une première liste de plus d’une soixantaine de ménages qui est en cours de délibération, mais si d’autres personnes arrivent avec des dossiers on sera en mesure de les aider », précise Vanille Guichard.

« Il va désormais y avoir un conventionnement avec les ménages sur les indemnisations, qui permettra d’arbitrer leurs choix de relogement, en locatif ou en accession, et on a déjà préparé les choses avec la SIM pour faciliter l’accès au logement qui leur correspond », ajoute-t-elle. « Pendant les études réalisées sur le site les gens ne voyaient pas l’avancée du projet, mais dès que les travaux ont commencé ils se sont rendu compte que le quartier va vraiment être construit, ça a permis de les mobiliser ». Les futurs habitants sont d’ailleurs invités à participer dans les prochaines semaines à des ateliers de concertations qui permettront de définir, avec la maîtrise d’œuvre, l’aménagement des espaces publics, pour qu’ils puissent répondre à leurs besoins.
Un projet précurseur
Grâce à la volonté de tous les acteurs, à commencer par la Ville de Koungou qui souhaite faire de ce quartier la vitrine de la commune, le projet se poursuit dans de bonnes conditions, malgré le passage du cyclone Chido et les nombreuses innovations. Du côté de la construction, c’est la première fois qu’un processus a été accéléré grâce à l’utilisation de la loi ELAN et malgré cette nouveauté, le site bénéficie des ingénieurs du groupement SIM-Colas afin de garantir la qualité des travaux et il ne met pas non plus de côté les habitants en proposant les concertations à venir, même s’il reste à voir dans les prochains mois et années l’évolution et la rigueur de ces dispositifs.

Concernant le relogement, c’est également la première fois, en raison de la signature des conventions avec les ménages, qu’une ville s’engage à reloger la population décasée, et s’il est trop tôt pour tirer des conclusions, les permanences sociales et l’accompagnement semblent donner de l’espoir aux familles concernées.
En contrebas du chantier, aux abords de la route nationale, une femme prépare en bas de chez elle, le grill de son barbecue afin de vendre quelques brochettes. « J’ai déposé ma demande pour pouvoir habiter dans le nouveau quartier, mais je n’ai pas le droit car je n’habitais pas là avant », déplore-t-elle, déçue en regardant la colline. Mais quand elle apprend que le quartier sera aménagé et qu’il y aura un parc avec des arbres, l’étonnement laisse place à un léger sourire qui se dessine sur son visage, signe que Carobolé profitera également à ses voisins.
Victor Diwisch