François Bayrou a profité de cette réunion, en présence de 11 ministres dont celui de l’Intérieur et de la Justice, pour rappeler que la pression migratoire exercée sur le continent européen et sur le territoire national reste élevée. En effet, selon les chiffres enregistrés en 2024, la France a accueilli plus d’un demi-million d’immigrés supplémentaires, dont près de 160.000 demandeurs d’asile, un niveau inédit.
« La capacité d’accueil de la France n’est pas dimensionnée pour faire face aux besoins d’intégration qui résultent de cette dynamique migratoire. Sans compter les problèmes relatifs à la sécurité sur notre sol, colle des crimes et des délits commis par des ressortissants étrangers mais aussi les problèmes majeurs d’ordre public comme à Mayotte, notamment… », fait savoir Matignon.
Plusieurs mesures fortes vont être mises en place
Dans ce contexte, le Gouvernement entend renforcer le contrôle de l’immigration en France et a ainsi pris plusieurs décisions importantes lors de ce comité interministériel.

Tout d’abord, le recours à une Force frontière, (expérimenté à la frontière franco-italienne), sera généralisé à l’ensemble des frontières de l’Hexagone. La Force frontière reposera sur un état-major national et sur une doctrine d’emploi qui permettra de mobiliser plusieurs centaines de renforts à nos frontières, issus de la police, de la gendarmerie, des douanes et des armées, avec la possibilité de faire appel à des réservistes.
A Mayotte, tous les moyens sont déployés pour reconstituer et améliorer nos capacités de détection (notamment les radars) et d’interception en mer et sur terre. Depuis le début de l’année, le nombre d’éloignements est en progression de 25% par rapport à la même période en 2024, selon les données du Gouvernement.
Par ailleurs, un plan d’action spécial pour renforcer le niveau d’exécution des obligations de quitter le territoire français (OQTF) sera mis en œuvre. Les arbitrages seront pris pour atteindre la cible de 3.000 places de rétention en 2027 et des évolutions juridiques seront préparées pour pouvoir maintenir en rétention les publics dangereux jusqu’à leur expulsion effective du territoire.
Aux niveaux européen et international, le Gouvernement engage la transcription en droit français du Pacte européen pour la migration et l’asile, qui doit entrer en vigueur au cours de l’année 2026 dans l’ensemble des États-membres de l’Union européenne. Il devrait ainsi permettre de renforcer le contrôle aux frontières extérieures et d’accélérer les procédures d’asile. Le Gouvernement soutiendra également une révision ambitieuse de la directive Retour de 2008 pour faire évoluer un cadre procédural devenu trop complexe et contre-productif, notamment pour permettre l’exécution immédiate des OQTF. Une évolution du cadre de la coopération migratoire avec le Royaume-Uni est aussi prévue afin d’améliorer la situation sur le littoral Nord dans l’Hexagone

Pour le Gouvernement, la lutte contre l’immigration irrégulière est une des priorités de son action diplomatique. « La délivrance des visas tiendra compte de la qualité de la coopération migratoire des pays d’origine, s’agissant en particulier de la réadmission de ceux de leurs ressortissants que nous expulsons », indiquent les services du Premier ministre.
François Bayrou a ainsi lancé un audit interministériel de la politique de délivrance des visas dont les premières conclusions lui seront remises sous deux mois.
Le cas particulier avec l’Algérie
Enfin, s’agissant spécifiquement de la coopération migratoire avec l’Algérie, le chef du Gouvernement a constaté que « l’Algérie, en refusant la réadmission sur son territoire de ressortissants algériens expulsés de France, ne respectait plus ses engagements envers la France et les accords qui lient les deux pays ». En effet, les événements récents ont montré que l’Algérie a refusé, à 14 reprises, de donner suite aux demandes de réadmission formulées par la France concernant l’auteur de l’attentat commis à Mulhouse le 22 février dernier.

Aussi, dans ce contexte tendu, « le Gouvernement français souhaite ouvrir une discussion avec l’Algérie sur la manière dont sont mis en œuvre ces accords afin de revenir à leur plein respect dans un délai de six semaines. Une liste de ressortissants algériens devant être réadmis en Algérie sera présentée aux autorités algériennes. A l’issue de ce délai, le Gouvernement français souhaite que la coopération avec l’Algérie ait retrouvé le niveau attendu. La France se réserve le droit de remettre en cause ces accords », précise-t-on du côté de Matignon.
« La France n’est pas à l’origine de la situation. Je ne confonds pas les autorités algériennes avec le peuple algérien ni avec nos compatriotes d’origine algérienne. Il n’y a pas de volonté d’escalade. Mais les refus de réadmission sont une atteinte directe aux accords que nous avons avec l’Algérie. Nous souhaitons le retour aux accords auxquels se sont engagés les deux Gouvernements », a ainsi déclaré François Bayrou.