Ce n’était que dimanche, mais on a déjà l’impression que l’annonce de la suppression de droit du sol qui a fait l’effet d’une bombe sur le tarmac de l’aéroport de Pamandzi, a déjà vécu son bonhomme de chemin. Des plages d’information entière ont été consacrées au sujet avec en filigrane, « et pourquoi pas dans l’Hexagone ? ».
Selon le sondage de l’institut CSA (groupe Havas) pour Europe 1, CNews et le Journal du Dimanche (JDD), 73% des français sont favorables à la suppression du droit du sol à Mayotte. Ils sont plus 90% parmi les sympathisants de droite et du centre à pencher en faveur de cette solution pour stopper l’immigration, et, plus étonnant, également majoritaires à gauche, 53%.
Dans cet objectif, pour son projet de révision de la Constitution, le président Macron a le choix entre le référendum ou le passage par le Parlement convoqué en Congrès, comme nous l’avons expliqué où il faut une majorité des trois cinquièmes des parlementaires. Avec un tel score, son cœur et sa raison pencheront-ils vers la consultation du peuple français ? On peut en tout cas l’envisager.
Un score tout aussi incroyable s’affiche sur la question d’étendre le dispositif à la France entière, puisque selon le même sondage, 65% des Français souhaitent voir abroger le droit du sol. Là, le score est beaucoup plus réduit à gauche, 37%, mais quand même 45% chez les électeurs de la France Insoumise et 40% au PS. Et avec une forte scission politique puisqu’ils sont 89% à droite et 68% au Centre à le souhaiter.
Des représentants de partis éloignés de leur base
Un sujet qui divise jusqu’à l’intérieur de chaque camp puisque les représentants de la NUPES avaient aussitôt critiqué cette annonce de Gérald Darmanin, et Emmanuel Bompart, coordinateur de la France Insoumise avait critiqué « on n’a pas besoin de moins de République », alors que ses électeurs sont favorables à une courte majorité à cette évolution constitutionnelle à Mayotte.
Alors que tout le monde reconnait dans cette mesure une proposition de longue date du Rassemblement national, c’est une part du gâteau électoral que vient de lui grignoter la majorité présidentielle.
Pourtant, il y a fort à parier que le timing n’est pas celui que le président de la République avait choisi. A plusieurs reprises pendant sa visite à Mayotte, et déjà depuis le tarmac de l’aéroport, Gérald Darmanin a évoqué une annonce qu’Emmanuel Macron « a choisi de ne pas annoncer lui même ce dimanche, mais m’en a confié la responsabilité ». On peut imaginer que la révision constitutionnelle pour les Outre-mer, adaptée au cas par cas, nous avait-on dit, pouvait comporter cette mesure, mais que la manifestation de ras-le-bol des mahorais en aura précipité l’annonce. Sans forcément imaginer l’adhésion nationale que cela susciterait.
Anne Perzo-Lafond