Mayotte est confrontée à une crise de l’eau de plus en plus profonde. Les coupures d’eau dépassent quotidiennement les 24 heures, trois fois par semaine, des coupures d’eau technique additionnelles aggravent la distribution déjà compliquée et la pénurie d’eau embouteillée renforce la vulnérabilité des habitants sur l’île.
Après le passage du cyclone et à l’approche de la saison sèche, les autorités locales et nationales tentent de trouver des solutions à cette crise. Plusieurs projets ont été envisagés, mais l’incertitude persiste quant à leur mise en œuvre rapide et efficace, pour répondre à l’urgence et pour s’inscrire dans la durée.
Le bateau-usine de l’ONG Waterships à nouveau sur la table

Le 12 mars dernier, la députée de la deuxième circonscription de Mayotte, Anchya Bamana, a réaffirmé son soutien au projet du « bateau-usine » proposé par l’ONG Waterships. Ce projet vise à produire de l’eau potable à partir de l’eau de mer. Dans une lettre adressée au président du Conseil départemental, Ben Issa Ousseni, le 12 mars 2025, la députée a mentionné certaines conditions techniques pour la réussite d’un tel projet. « Le stockage de l’eau produite par le bateau-usine est essentiel à la réussite de ce projet », a-t-elle souligné. « C‘est pourquoi je demande au Conseil départemental de mettre à disposition un terrain de 5.000 m², en lien avec les maires de Mayotte, afin de créer un hangar de stockage à proximité du port de Longoni. »
L’impuissance des autorités face à la crise de l’eau
Quelques jours plus tôt, le ministre des Outre-mer, Manuel Valls, avait écrit à la députée, pour lui détailler les efforts déployés par l’État pour résoudre la crise de l’eau à Mayotte, en précisant les réparations qui avaient été effectuées sur le réseau d’eau après le passage du cyclone Chido et la tempête tropicale Dikélédi. « L’État, en collaboration avec les collectivités, a travaillé sans relâche pour rétablir l’accès à l’eau potable après les dégâts causés par les cyclones », avait-il écrit. « 350 fuites ont été réparées, et la SMAE a procédé au raccordement de tous les abonnés. »

Malgré ces ambitions, la situation reste chaque année plus fragile. Alors que la production d’eau quotidienne est d’environ 36.000 m³, les besoins en production sont estimés à 45.000 m³. Si les tours d’eau de 36h ont été mis en place pour améliorer la distribution de l’eau sur l’ensemble de l’île, ils ne suffisent pas à répondre aux besoins de production, de stockage et d’assainissement, pour l’ensemble des habitants du département. Dans son courrier, le ministre avait également souligné que les retenues d’eau étaient à des niveaux relativement bas. « Les retenues de Combani et Dzoumogné sont à seulement 50 % et 49 % de leur capacité, respectivement », avait-t-il précisé en ajoutant, « cela est préoccupant, surtout en période de saison sèche. »
Dans ce contexte difficile, le projet du bateau-usine continue d’intéresser les autorités. « L’importation de bouteilles d’eau ne peut pas être la seule réponse à cette crise. Toute solution innovante, comme celle de Waterships, mérite d’être étudiée », a soutenu le ministre des Outre-mer. Ce navire, autonome en énergie, pourrait produire jusqu’à 6.100 mètres cubes d’eau toutes les 48 heures, soit plus de 6 millions de litres d’eau. Ce bateau pourrait fournir une solution d’appoint, en complément des infrastructures terrestres existantes, pour répondre aux besoins immédiats en eau de la population, en attendant le déploiement de projets de plus long terme tels que la troisième retenue collinaire à Ourovéni ou l’usine de dessalement d’Ironi Bé. Le coût total de ce projet est estimé à 80 millions d’euros. Avant la pandémie Covid-19, il avait déjà fait l’objet de discussions et avait été écarté pendant la crise sanitaire mais aussi en raison de son coût.
Mathilde Hangard