Ce mercredi, le jeune E., 18 ans, comparaissait pour une série de faits plutôt édifiante : après avoir sauvagement blessé un homme à coups de machettes, qui avait osé lui demander fermement de partir de son champ, il a érigé un barrage sur la route et caillassé les gendarmes appelés pour intervenir. Le tout, en réunion, puisque des complices se sont rapidement joints à lui. Le jeune E. est apparu au tribunal en tenue de garagiste et a fait profil bas, gardant la tête baissée…tout en donnant une version des faits ne correspondant en rien ni au témoignage de la victime, ni à celui de sa propre copine présente au moment des faits. La victime, qui a écopé de 8 jours d’ITT (20 jours à l’origine), n’a pas pu se rendre au tribunal pour raisons de santé, mais des membres de sa famille étaient présents, sans procuration toutefois, pour « marquer le coup ». Les photos montrées lors de l’audience ont révélé ses nombreuses blessures en particulier au visage. « Un morceau de nez pend », a précisé le procureur qui considère cette affaire comme « un crime pénalisé ».
Sans se démonter, E. a expliqué que c’était la victime qui l’avait agressé en premier et donc « qu’il avait voulu se venger », tout en prétendant que ce n’était pas lui qui avait assené les coups de machettes mais son complice mineur, apparu soudain pendant l’altercation. Sa copine a pourtant, peut-être malgré elle, confirmé la version de la victime en affirmant que son cher et tendre avait été pris « d’une crise » pendant laquelle il avait agressé monsieur C. Elle n’était cependant pas présente au tribunal pour détailler cette déclaration faite devant les gendarmes. Le prévenu a ensuite expliqué à la juge et ses 2 assesseurs qu’il a érigé un barrage et caillassé les gendarmes car il ne voulait pas être le seul à être interpellé. Selon ses dires, monsieur C. le méritait aussi, d’où le caillassage qui a blessé les 5 gendarmes représentés par Me Baudry. « C’est d’une logique ! », a fait remarquer ironiquement la juge. Sans compter que l’affaire aurait pu dégénérer encore davantage puisque, d’après les gendarmes, E. a appelé une meute d’une trentaine de chiens qui « semblaient obéir à ses ordres ». Heureusement, les grenades lacrymogènes les ont fait reculer. Deux véhicules de la gendarmerie ont également été détruits à coups de cailloux dans cette histoire.
Un ancien de la bande de Gotam
E. était déjà connu des forces de l’ordre pour avoir été membre, quand il était mineur, de la tristement célèbre « bande de Gotam », impliquée dans les 3 homicides commis en 3 jours sur Petite-Terre en 2021. Il a d’ailleurs suivi les recommandations des gendarmes lui indiquant qu’il ne devait plus remettre les pieds sur Petite-Terre sous peine de risquer d’être tué par « la bande de la Vigie » en représailles. S’il n’était âgé que de 15 ans à l’époque, ces années passées au sein de la bande ont marqué durablement son esprit. « Ce jeune homme ment effrontément au tribunal, sa version ne tient pas debout ! Il s’inscrit dans un système où la violence est la norme, c’est pourquoi je demande 5 ans de prison avec mandat de dépôt », a déclaré le procureur qui a fait une longue réquisition détaillant l’incohérence de la version du prévenu et la gravité des faits qui lui étaient reprochés.
Maître Andjilani, l’avocat de la défense, a défendu son client en remettant en cause le fait que sa copine ait la même version que la victime. « Il suffit de lire ses déclarations, elle dit bien que c’est monsieur C. qui l’a agressé en premier », a-t-il affirmé en demandant une atténuation de la peine requise par le procureur. « Mon client est en train de faire une formation de garagiste, il n’a que 18 ans, il faut lui donner une chance », a-t-il argué. Le tribunal a finalement tranché en le condamnant à 3 ans de prison dont 1 avec sursis probatoire et l’obligation d’indemniser les 5 gendarmes caillassés pour préjudice moral. Le préjudice physique n’a pas été retenu bien qu’ils aient été blessés. Monsieur C. étant absent pour raisons de santé, le jugement pour la partie civile le concernant a été reportée au 4 juillet 2024.
Nora Godeau