Claire Hédon avait succédé en 2020 à Jacques Toubon et veille donc au respect des droits et libertés par les administrations et les services publics, aux droits de l’enfant et à la lutte contre les discriminations.
Lors du lancement de l’opération Wuambushu, y voyant de possibles atteintes aux droits et libertés fondamentales des personnes, elle avait envoyé une délégation de juristes sur le territoire mahorais en surveillance du respect des droits fondamentaux. Auditionnée par la Commission des lois au Sénat, elle s’inquiétait des conditions de « décasage ». Qui avait incité le sénateur Thani Mohamed à souligner la connotation d’illégalité du mot, et se faisait le défenseur d’une opération populaire à Mayotte « Wuambushu se fait dans le respect de la loi Elan, travaillée ici même en Délégation sénatoriale des outre-mer »
Auparavant, dans un rapport, elle avait souligné les nombreuses violations des droits des mineurs à Mayotte : rattachement arbitraire de mineurs à des tiers et modification de leurs dates de naissance aux fins de rétention administrative et d’éloignement du territoire.
L’ensemble des parlementaires de Mayotte lui ont constamment reproché une position partiale, qui ne tient pas compte des 10.000 naissances par an sur le territoire, qui saturent les écoles et les structures hospitalières. En l’invitant à se rendre sur le territoire. C’est fait donc puisque Claire Hédon s’est rendue à Mayotte du 28 au 31 octobre 2023.
Prise de conscience pour plus de défense ?
L’enjeu pour ceux qui avaient lancé l’invitation était qu’il y ait prise de conscience du contexte avant le prochain argumentaire de la défense des droits à Mayotte. En clair, celle qui est vue comme l’avocate des étrangers en situation irrégulière a-t-elle pris conscience des retards administratifs, législatif, sociaux, etc. qui touchent Mayotte ?
Dans son communiqué post visite, Claire Hédon fait état de problèmes majeurs dans l’accès « aux services publics, notamment aux soins, aux prestations sociales, à la scolarisation et à la protection de l’enfance, à des logements décents ».
Elle évoque un droit à la scolarisation pas assuré pour des milliers d’enfants, mais, et c’est bien le paradoxe de ce poste, n’arrive pas à faire bouger les lignes ou à proposer des solutions. Elle aura pu toucher du doigt la pression démographique qui en est notamment la cause, et les difficultés qu’ont les institutions pour arriver à exercer convenablement, « les services publics sont confrontés à d’importantes difficultés pour répondre à leurs missions, mais aussi pour recruter et conserver des agents publics, ceci limitant considérablement l’accès aux droits des personnes vivant sur le territoire. »
Après avoir vu les bidonvilles, la Défenseure des droits parle enfin d’une « partie de la population vivant dans des conditions indignes », on comprend qu’elle pourrait valider les opérations de destruction-reconstruction, car « l’accès à un logement décent reste inaccessible pour une large partie de la population ».
Pénurie d’offre de soins, insuffisances des moyens humains, notamment dans la justice, « la solidarité nationale exige une mobilisation totale de l’ensemble des acteurs publics ».
Sur la crise de l’eau, son institution a été saisie « de réclamations concernant les modalités de gestion de la pénurie », notamment par ceux qui subissent des coupures plus longues que celles indiquées sur le planning. « Ces réclamations font l’objet d’une instruction. » Mais elle a très peu de pouvoirs coercitifs, et si elle dit avoir pris note des injustices en termes de retraite, l’action s’arrête là. Alors que rien que ce sujet mériterait un combat continu de sa part.
On peut dire que sur le plan moral, la prise de conscience était nécessaire mais ne va que très peu faire avancer le débat.
A.P-L.