Qui en veut à Hakim Karki ? Les pistes sont multiples à l’entendre. On peut dire que quelques soient les affaires qu’il ait eu à gérer lorsqu’il était à Mayotte, le juge d’instruction aura provoqué des remous : que ce soit celle du décès de la jeune Roukia Soundi par overdose, ou celle des 67 kilos de lingots d’or malgache ou encore des normes du ciment Lafarge, toutes ont pour premier point commun d’avoir été hyper-médiatisées, et comme second, d’avoir attisé les tensions au-delà même du tribunal.
S’il comparait depuis ce mardi devant la cour d’assises de Paris, c’est pour des faits le concernant plus personnellement, puisqu’il est accusé du viol d’une enseignante alors âgée d’une trentaine d’année, qu’il conteste, parlant de rapports sexuels consentis.
Que s’est-il passé dans la nuit du 1er au 2 juillet 2014, alors que le magistrat qui officie comme juge d’instruction à Mayotte, se trouve attablé avec deux jeunes femmes, dont celle qu’il ramènera et qu’il accuse de lui avoir sauté dessus dans sa voiture ? L’enseignante elle, parle d’actes sexuels sous contrainte, y compris jusqu’au domicile du juge où elle le suivra pourtant avant d’être raccompagnée chez elle, parlant d’état de sidération.
Pour le juge, c’est un piège qui lui a été tendu. On pense instinctivement à l’affaire Roukia, du prénom de cette jeune fille morte par overdose de drogue fournie par son petit copain, mais issue d’un échantillon interceptée par un indicateur, et remis en circulation par la gendarmerie sans en avertir le procureur, découvre-t-il. L’instruction fuite opportunément dans la presse, les médias locaux s’en font l’écho, prend des proportions hors norme lorsqu’un général de gendarmerie intervient, Hakim Karki crie à la tentatives d’obstruction, puis le procès se conclura sur une négligence coupable de policiers et gendarmes, ayant entrainé la mort, avec des condamnations différentiées.
Un complot bétonné
Même agitation médiatique pour l’affaire des 67 kilos de lingots d’or appartenant à une société malgache et transportés vers Dubaï via Mayotte, au cours de laquelle le magistrat aurait accusé de corruption des membres de la cour d’appel de Saint-Denis, pour lesquels il était menacé de sanctions disciplinaires. Informé de l’accusation de complot, le premier président de la Cour d’appel Dominique Ferrière s’était défendu d’avoir recherché « une Mata Hari » pour piéger le juge et en profitait d’ailleurs pour rappeler ses faits d’armes contre les institution, puisqu’il fut en Corse le président du tribunal qui a jugé l’affaire des Paillotes et condamné le préfet Bonnet et un colonel de gendarmerie qu’il avait comparés à « des voleurs de mobylettes ou à des petits trafiquants de shit ».
Dernière affaire, et c’est de ce côté là qu’il faudrait chercher selon Hakim Karki, le ciment. Lors d’une guerre que se menaient les importateurs de l’île en 2013, se reprochant mutuellement un taux de Chrome VI anormalement élevé, le directeur du site Lafarge de Longoni et son second sont mis en examen à la demande du même juge Hakim Karki. Qui insinue que le piège sexuel qui lui aurait été tendu prendrait corps dans cette dernière affaire du cimentier Lafarge.
C’est ce que devront démontrer ses avocats au cours d’un procès à huis clos annoncé pour durer jusqu’au 16 décembre 2022.
Anne Perzo-Lafond