« Ma vie est finie, j’avais un travail, j’avais la santé, maintenant je n’ai plus rien ». L’avocat des parties civiles a voulu marquer l’audience en reprenant les propos prononcés par l’un des deux surveillants de la station d’épuration de Tsararano la première fois qu’il les a rencontrés. Des mots forts, traduisant le dénuement dans lequel se trouvent encore les deux hommes aujourd’hui puisque, après leur agression dans la nuit du 2 au 3 mai 2018 à Dembéni, « ils n’ont pas pu reprendre le travail, ils n’ont pas été indemnisés. Ces messieurs n’ont pas perçu de salaires ni d’indemnités. Ils ont tout perdu ».
Une succession de faits reprochés
L’avocat de la partie civile s’est également attardé sur la lâcheté apparente dont ont fait preuve les prévenus durant tout le long de ce procès de trois jours. « On a des lâches devant vous incapables d’assumer les faits », a-t-il lancé. Une couardise faisant affront au calvaire subi par les deux hommes, frappés et séquestrés et dont les traumatismes physiques et moraux persistent encore aujourd’hui. « On a l’impression après plus de 4 ans, que les faits se sont passés il y a deux semaines », souligne leur avocat.
Dans son réquisitoire, l’avocat général va également revenir sur cette nuit de terreur, en décrivant la « violence déchaînée » ayant frappé les deux surveillants, et s’interrogeant même « sur leur devenir si les gendarmes n’étaient pas intervenus ». Mais cette nuit cauchemardesque ne s’est pas uniquement cantonnée à la station d’épuration de Tsararano. Une succession de trois autres faits de de vol en bande organisée avec arme, enlèvement, détention, séquestration seront commis à Dembéni ainsi qu’à Kani-Kéli. Sur ce dernier lieu, les agresseurs vont dérober un bateau de pêche.
La notion de bande organisée n’a pas été retenue
Si l’avocat général ne soutient pas la notion de bande organisée au regard de l’absence d’éléments démontrant l’organisation structurée, il en va tout autrement concernant la séquestration. « A Tsararano, deux victimes ont été entravées ainsi que deux pêcheurs à la plage de Kani Be 2 », détaille-t-il. Au regard de l’imbroglio des prises de paroles des accusés, rendant vaine la tentative de déterminer la part active de chacun dans les faits commis, l’avocat général a requis, sans distinction, « quinze années de réclusion criminelles » à l’ensemble des cinq accusés, le sixième ayant vu son dossier disjoint pour un jugement ultérieur. Néanmoins, les avocats de la défense parviendront à apporter la nuance et le doute afin de laisser les jurés apprécier la responsabilité de chacun des accusés. C’est donc tard dans la nuit de vendredi à samedi que les accusés ont pu prendre connaissance de leurs peines de prison, ces dernières s’échelonnant de huit à treize années.
Pierre Mouysset