Deux hommes, un chauffeur de taxi et son fils, étaient poursuivis devant le tribunal correctionnel le 18 octobre 2016 pour violences en réunion sur un mineur de 15 ans, avec ITT de 6 jours. Un complice présumé, mineur, a été mis en examen par le juge des enfants.
La victime est un petit délinquant de Cavani sud, enlevé en pleine rue et jeté dans le coffre d’une voiture, selon un témoin qui a alors prévenu la mère du jeune. L’adolescent était retrouvé le lendemain, boitant et le visage tuméfié. Emmené par sa mère directement au commissariat, il expliquait avoir été enlevé par des hommes cagoulés et gantés et disait vouloir se venger lui-même. Il expliquait avoir été frappé, mis dans le coffre de la voiture, puis emmené jusqu’à un lieu proche, vers les 100 villas. Une fois le passage à tabac fini, les agresseurs le relâchaient au niveau de conteneurs à poubelles, et il rentrait à Cavani en marchant avant de dormir sur la terrasse d’un commerce, car son visage était trop gonflé et lui faisait mal.
L’enquête du commissariat a permis, par témoignages et recoupements, d’établir que ce jeune et sa bande avait, quelques jours auparavant, mis des gifles à un chauffeur de taxi et lui avaient volé son téléphone. La famille du chauffeur, venue de Kaweni, et notamment son fils, s’étaient ensuite mobilisés pour retrouver ses agresseurs et avaient patrouillé dans Cavani sud pendant deux jours.
Le deuxième jour, ils ont d’abord attrapé trois jeunes et les ont molestés près de la mosquée de Cavani. Un des frères du chauffeur de taxi a calmé la situation et empêché que ces trois jeunes, qui n’avaient rien à voir avec l’agression du taximan, ne soient frappés davantage. Parmi ces jeunes se trouvait le frère de la victime. Ce dernier avait été emmené de force dans une voiture sous la menace d’une bombe lacrymogène, avant d’être relâché.
Le procureur salue la qualité d’enquête du commissariat
Enfin, alors que la victime marchait dans Cavani sud, elle a été identifiée et prise à partie par le fils du chauffeur de taxi, rejoint par plusieurs personnes qui l’ont aidé à frapper le jeune et à le mettre de force dans la voiture. Des témoins ont indiqué que le jeune était embarqué dans une voiture blanche, et que peu de temps après qu’elle soit partie, une voiture verte se présentait sur la scène de l’enlèvement, avec à son bord le taximan.
Le mineur ayant participé à l’expédition punitive a relaté les faits de façon précise en garde à vue : le chauffeur de taxi avait été agressé par la bande du jeune. Le fils du chauffeur avait ensuite organisé les représailles, en compagnie des frères du taximan et d’amis. Ils patrouillaient une première journée sans succès. Puis ils trouvaient les trois premiers jeunes, qui étaient mis hors de cause par le taximan appelé sur place. Ensuite, ils repéraient le chef de la bande et l’enlevaient. Il était frappé, embarqué, puis présenté au domicile du chauffeur de taxi où celui-ci le reconnaissait. il était ensuite frappé encore à l’extérieur du domicile et abandonné en voiture plus loin.
Dans un premier temps, le chauffeur de taxi niait toute implication, et disait n’avoir jamais eu de voiture verte. Son épouse, entendue en parallèle, confirmait cependant qu’une voiture verte lui avait bien été prêtée par un ami car son taxi était en panne.
Confronté aux déclarations de sa femme, le chauffeur de taxi reconnaissait avoir été présent, mais « n’avoir pas pris part, et n’avoir pas autorisé les violences ». Les versions du fils et du père étaient contradictoires. En confrontation avec le mineur, les deux majeurs restaient sur leurs positions et niaient les faits. Le mineur se rétractait complètement, expliquant qu’il avait tout inventé, même les détails que seule une personne ayant participé aux faits aurait pu connaitre. Interrogé sur les pressions qu’il avait subies, le mineur refusait d’en dire plus.
La victime présentait 6 jours d’ITT, avec notamment des contusions, des traces de coups portés avec un objet type fil électrique, et une fracture du nez.
Les prévenus ont tous un casier vierge mais eux et leur avocat ne se sont pas présentés à l’audience.
Le procureur a rappelé que les vengeances privées sont « inacceptables » et continueront d’être « systématiquement poursuivies ». Il a requis 8 mois ferme à l’encontre des deux prévenus, soulignant la qualité de cette enquête du commissariat qui ne laissait aucun doute sur l’implication active du père, le chauffeur de taxi, même si celui-ci n’a pas porté les coups directement, et notamment car il était le seul à pouvoir identifier la victime pour la livrer à la violence de son fils et de ses frères.
Le tribunal a requalifié les faits à l’égard du père, retenant la complicité.
les deux prévenus ont été déclarés coupables et condamnés à 8 mois de prison ferme conformément aux réquisitions.