Après les cliniques mobiles et l’hôpital de campagne, l’ONG Super-Novae va installer une cuisine collective à Mayotte

Alexandre Chatillon, le fondateur de l’ONG Super-Novae, était sur notre territoire la semaine dernière dans le cadre d’un partenariat avec l’entreprise GBH afin d’aider les agriculteurs de l’île. Il nous a accordé un entretien avant son départ dans lequel il nous livre sa vision d’avenir pour Mayotte.

Souvenez-vous… Alors que le cyclone Chido avait détruit près de 90 % du territoire, l’ONG Super-Novae était intervenue en mettant en place un hôpital de campagne au stade de Cavani suite au départ de l’hôpital de la Sécurité civile française ESCRIM (Élément de Sécurité civile rapide d’intervention médicale). Nous étions alors au tout début de l’année 2025. « Grâce à nos partenariats avec Médecins Sans Frontières et Secouristes Sans Frontières nous avons pu installer un hôpital de campagne en moins de 48h certifié OMS », rappelle Alexandre Chatillon. Mais ce n’est pas tout puisque l’ONG a également collaboré avec l’entreprise GBH. « Nous nous sommes rencontrés à l’occasion du passage de Chido…GBH souhaitait venir en aide aux sinistrés. Le groupe a ainsi financé un projet de cliniques mobiles. Nous sommes allés à Tsoundzou, à Dembéni, … dans des bangas au plus près de la population. Nous avons ainsi soigné plus de 1.000 personnes en un mois », se remémore le directeur de Super-Novae, les yeux encore pleins d’émotion.

Une expérience au sein de grandes institutions internationales

Alexandre Chatillon, le fondateur de l’ONG Super-Novae, lors de sa venue à Mayotte la semaine dernière

Originaire de Lons-le-Saunier dans le Jura, Alexandre Chatillon, après avoir décroché son bac ES (Économique et Social), s’inscrit en faculté dans la filière AES (Administration Économique et Sociale) à Besançon et décroche deux ans plus tard son DEUG (diplôme d’études universitaires générales). Il poursuit ses études à Lyon en Sciences politiques spécialité relations internationales. « A l’époque je voulais être diplomate, confie-t-il. Mais il fallait passer des concours, notamment celui du ministère des Affaires étrangères où on demandait de parler 3 langues… Je pense que je n’avais pas la maturité suffisante à cette période pour passer ces concours », ajoute-t-il.

Qu’à cela ne tienne ! Âgé de seulement 22 ans, Alexandre se fait embaucher dans une PME lyonnaise. « C’était une petite entreprise qui faisait de la distribution de matériel informatique en Afrique… J’étais responsable des filiales de la société pour l’Afrique de l’Ouest. J’ai ainsi fait beaucoup de voyages sur ce continent, notamment au Sénégal, en Côte d’Ivoire, au Nigéria, au Cameroun, ou encore au Bénin et au Togo. Cette expérience m’a permis de comprendre comment faire du business en Afrique », raconte-t-il.  Mais il avait toujours en ligne de mire le désir de travailler pour la diplomatie. Une opportunité s’offre à lui. On lui a proposé de travailler au sein de l’OMC (Organisation mondiale du commerce) à Genève en tant que conseiller pour négocier avec les ambassadeurs africains.

Le siège de l’ONU à Genève (crédit : FB Représentation permanente de la France auprès de l’ONU à Genève)

Puis l’année d’après, à l’âge de 26 ans, il effectuera un stage non rémunéré au siège de l’ONU (Organisation des Nations Unies), toujours à Genève. « J’avais pris un risque en acceptant ce stage, je misais sur l’avenir… heureusement que j’avais mis de l’argent de côté », se souvient-il. Après quelques mois de « galère », Alexandre décroche finalement un emploi stable à l’ONU. « Je suis resté 4 ans aux Nations Unies. Je me suis occupé d’abord de la coopération et de la gestion de projets pour les pays en développement, puis ensuite j’étais à la CNUCED (Conférence des Nations Unies pour le Commerce Et le Développement) où je m’occupais de projets au Maroc et en Tunisie dans lesquels j’aidais les entreprises à se formaliser, c’est-à-dire à s’enregistrer pour être déclarées… ». Après cette expérience, il intégrera durant un an l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques).

Fort de son expérience, Alexandre va travailler par la suite, dans le cadre de la coopération française, chez Expertise France, qui dépend du ministère des Affaires étrangères, pendant 4-5 ans. « J’étais sur le terrain, on a travaillé en Tunisie ou encore en Libye, et malgré la guerre civile on aidait les entreprises à se développer, on montait des incubateurs par exemple ».

La naissance de Super-Novae

Alors qu’on lui propose un job d’expatrié bien payé et une vie confortable pour lui et sa famille en Algérie afin de développer le réseau Expertise France, Alexandre refuse. « À cette époque j’avais la volonté de lancer mon propre projet, de monter ma structure. Et puis avec mon expérience j’ai vu l’envers du décor… Il y avait un antagonisme entre le projet que l’on me proposait et le fonctionnement de ces structures », explique-t-il. C’est ainsi que naît Super-Novae en 2021. « Super-Novae c’est une étoile, la lumière la plus puissante du monde ! Notre objectif à travers sa création et de permettre de réaliser le potentiel de chacun, de faire exploser les talents ».

Une des missions principales de Super-Novae est d’apporter de l’aide aux populations vulnérables, d’accompagner les jeunes et les femmes à se construire un avenir à travers l’éducation (crédit : Super-Novae)

Le premier projet de l’ONG s’est fait en Libye. « Notre première mission a consisté à réintégrer les anciens combattants mais aussi à aider les jeunes pour qu’ils ne retournent pas dans les milices armées. Pour cela nous avons créé une Maison des anciens combattants et apporté du soutien psychologique ». Super-Novae est ensuite intervenue au Yémen, au Soudan, en Palestine ou encore en Syrie. « Notre mission principale est d’apporter de l’aide aux populations vulnérables, d’accompagner les jeunes et les femmes notamment à se construire un avenir à travers l’éducation et une formation professionnelle ».

Une vie au service de l’humanitaire

A l’origine, la mission de l’ONG était d’accompagner les gens à se créer un destin. Mais le 7 octobre 2023 et le début de la guerre entre Israël et le Hamas a tout changé… « Nous avons décidé de basculer un peu plus vers l’humanitaire, en élargissant notre spectre d’intervention et en développant de nouvelles activités, notamment à Gaza. Nous avons ainsi contribué à distribuer de la nourriture par exemple tout en proposant des missions d’éducation », détaille le fondateur de l’ONG. Aussi suite au passage du cyclone Chido et de ses ravages pour notre île, c’est tout naturellement que Super-Novae a décidé d’intervenir pour aider les habitants de Mayotte.

En réponse au cyclone Chido, qui a frappé Mayotte le 14 décembre 2024, Super-Novae, en collaboration avec Secouristes Sans Frontières et Médecins Sans Frontières, avait mis en place un hôpital de campagne au Stade de Cavani à Mamoudzou. (crédit : Super-Novae)

Au-delà de l’hôpital de campagne et des cliniques mobiles, l’ONG a noué de sérieux partenariats afin d’aider à la reconstruction du 101e département français. Ainsi encore récemment, Super-Novae était à la manœuvre quand GBH a décidé d’aider une petite soixantaine d’agriculteurs de l’île à s’équiper en matériel pour stocker et entreposer l’eau de pluie. « Après Chido, GBH est venu nous voir pour savoir dans quelle mesure le groupe pourrait contribuer davantage à la reconstruction de l’île. Un fonds de 2 millions d’euros a été débloqué, dont 1 million consacré uniquement pour équiper les agriculteurs », indique Alexandre Chatillon.

En outre, Super-Novae a de nombreux projets pour l’avenir de Mayotte. L’ONG a remporté un appel à projet qui va lui permettre d’installer une cuisine collective. « Nous allons prochainement proposer un espace de cuisine collective et de transformation des aliments au sein du technopôle », se réjouit déjà le directeur de Super-Novae. Mais ce n’est sans doute pas tout… car parmi ses autres projets, Alexandre Chatillon compte aussi développer la filière pêche. « Nous travaillons actuellement avec le ministère des Outre-mer sur le développement d’une filière pêche artisanale et raisonnée à Mayotte ».

Enfin, une bonne idée n’arrivant jamais seule, Alexandre, lors de ces différentes venues dans l’île au lagon ces derniers mois, a été ébloui par la beauté de notre territoire et n’exclut pas de venir s’installer prochainement, en début d’année prochaine, avec sa femme et ses 3 enfants. « À 42 ans j’arrive à un temps de ma vie où j’ai envie de changement… Après 20 ans à m’être impliqué dans de nombreux pays, j’ai besoin maintenant de travailler au développement des territoires français… Il y a tellement de besoins ici, j’aimerais m’investir, être acteur de ce territoire et jouer un rôle actif dans cette île ». Karibu Alexandre !

B.J.

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