Pas d’affolement ni de théâtrale tension, et encore moins de médiatique sur-émulation, en ce jeudi, tout début de matinée, au contournement de la station service de Petite-Terre. Seul un comité restreint de circonstance, appuyé de quelques forces militarisées, laissent supposer qu’il y a activité en cette zone. La partie en contre-haut plus exactement. Un quartier résidentiel composé d’habitations tout à fait légales auxquelles s’est greffé peu à peu des plus informelles, s’avançant donc sur les versants Sud et Ouest encore sauvages. Et c’est bien dans cette dynamique anticipatoire de freiner le phénomène avant qu’il ne soit trop routinier, conséquent et tristement incontrôlable, incluant une indiscutable insalubrité ambiante, tant dans le cadre de vie que du point de vue environnemental, que la municipalité concernée a mutualisé ses actions avec son interco et les services préfectoraux.
Jamais deux sans….
En fait, Thierry Suquet et ses équipes ne les comptent plus car bien au delà des 3, comme le conclut le populaire adage. Mais quels « les » me direz-vous ? Eh bien les RECOURS quasiment systématiques de demande de suspension qui viennent se coupler dès la parution d’un nouvel arrêté préfectoral, relatif à la destruction d’habitat(s) illicite(e), relevant majoritairement d’une classification de bidonville. La médiatique et ubuesque affaire du Talus 2, en fut au final un parfait exemple illustré et l’Arrêté A n°2023-SGA-0359 du 24 avril 2023, portant justement sur le secteur A des hauteurs de Mbouyoujou ne fait pas office d’exception.
Il a donc fallu attendre la régularisation administrative légale face à 2 recours, afin « de dérouler le programme au fur et à mesure qu’on obtient les feux vert mais surtout au fur et à mesure qu’on arrive à monter les enquêtes sociales et à faire partir les gens qui vivent dans des conditions déplorables comme vous le voyez » introduit le Préfet de Mayotte dans sa prise de parole publique aux abords du logement numéroté 1 sur le plan cartographié qui répertorie également les 23 autres de la zone, voués à être détruits.
Dans ce plan global de démolition, il a été ciblé 5 familles qui ont bénéficié, comme la procédure l’exige, d’un accompagnement social, notamment des services de l’Acfav* et d’une proposition de relogement transitoire. Seule une famille, composée de 6 membres, a accepté cette solution; les autres préférant se débrouiller par leurs propres moyens. Identifiées comme personnes légalement éligibles à circuler sur le territoire français (car de nationalité ou bien de visa et régularité), il n’est bien entendu aucune obligation pour ces familles de devoir indiquer leur point de chute.
Une lutte aussi contre la délinquance
À ce volet insalubrité et illégalité se joint également l’aspect sécuritaire qui, bien souvent, va de pair en ces quartiers sauvages reculés et surtout, difficiles d’accès pour bon nombre. Le quartier de Mbouyoujou n’était malheureusement pas épargné aux dires du Général Olivier Capelle, qui confirme qu’une bande de jeunes individus, fort probablement nouvelle résultante constituée de certains anciens membres de la Bande de Gotam*, assez réputée pour la régularité et virulence de ses actes, avait trouvé en ce lieu, au niveau du réservoir d’eau, une zone de rempli et de refuge : « Le fait de venir casser ces zones d’accroche et de perturber une partie de leur emplacement fait que cela nous permet aussi (ndlr – les forces de l’ordre) d’aller plus facilement chasser ces délinquants et de pouvoir retirer du paysage un nid qui était un peu compliqué pour nous mais pour lesquels nous avions bien évidemment conduit des opérations de Police judiciaire en amont de cette opération de décasage« .
Petit récap d’un timing procédure
Avant de déposer un arrêté préfectoral de périmètre, dans le cadre de cette loi Elan, il est impératif de prendre le temps de dérouler une enquête sociale, de rencontrer les résidents, ciblés et identifiés par cet arrêté, afin de garantir une pleine cohérence de la procédure et d’éviter quelconque couac de manquement. Toute cette première phase prend à peu près 2 mois. Par la suite, entre la prise de l’arrêté et la possibilité de commencer la destruction, il y a un minimum légal de 5 semaines auquel peut donc se greffer les recours et délais pour répondre au juge qui font que la mise en application concrète de la démolition — après validation finale de l’arrêté préfectoral — se table entre 2 et 3 mois.
Concernant la suite des événements estampillés loi Elan, il est ciblé 15 arrêtés de secteur sur l’ensemble du territoire, notamment 2 en cours rien que sur Petite-Terre et l’instruction de 2 recours, visant la partie littorale et contre-bas de ce quartier de Mbouyoujou — qui comptabilise également une vingtaine de logements — dont l’audience au tribunal administratif de Mamoudzou devrait avoir lieu ce mardi 11 juillet prochain, certainement pour le plus grand bonheur de son président régional, Gil Cornevaux…
MLG
*Bande de délinquants de Petite-Terre dissolue en 2021 qui avait été tristement médiatisée pour un triple homicide, janvier 2021, sur le quartier de la Vigie (en lien avec la bande rivale de La Vigie).