1,89m pour 74 kg. Malgré un physique imposant, Ilam Djailane se fait discret et préfère laisser parler ses performances pour lui. À 19 ans, il entame sa 4e saison avec les jeunes d’Auxerre en tant que gardien de but. Une saison qui l’aura vu jouer son tout premier match avec l’équipe réserve*.
Gardien de but, une vocation rare
Le poste de gardien de but n’est pas le plus aimé dans le football, et à juste titre car il est considéré comme le plus ingrat. En parallèle c’est l’un des plus importants car il représente la base d’une équipe. Malgré tout cela, Ilam en est tombé amoureux et il nous en explique l’origine : « Je pense que ça part de la catégorie U8*, au FC Labattoir bien évidemment. À cette époque on ne se souciait pas forcément du poste auquel on voulait évoluer, mais j’avais commencé en temps qu’attaquant, puis défenseur. Mais un jour, il y avait une séance de tirs au but* et j’ai voulu m’y essayer. Premier tir, je l’arrête, pareil pour le deuxième, idem pour le troisième. À ce moment je me suis dit que c’était cool d’être gardien et j’y jouais régulièrement. De base c’était juste pour sortir les penaltys, mais un jour pendant un entraînement, un collègue à moi me met une frappe enroulée et j’effectue une grosse parade pour la sortir, instinctivement. J’ai su que j’étais fait pour ce poste.
Avènement et premières sélections régionales
Les choses prennent leur temps pour notre jeune gardien, qui patiente et travaille de manière assidue afin d’évoluer. Mais lorsque ça arrive, ça arrive très fort ! Il nous dévoile le début et les conditions de son avènement : « J’ai fait mes premières pré-sélections avec les U14 de Mayotte. On devait former un groupe pour participer à un tournoi à la Réunion. Je ne vous mens pas j’avais peur et je ne pensais pas que je serais pris, car il y avait des gardiens très forts. Au final on m’a retenu et j’étais même capitaine. Le tournoi opposait une sélection de Mayotte à des équipes réunionaises. On a réussi à atteindre les demie-finales. Je me suis dis que c’était ma dernière sélection. Au final, on m’informe qu’il y aurait une sélection U15 de Mayotte qui partirait affronter deux sélections de la Réunion et qu’à l’issue de ces rencontres, les meilleurs joueurs formeront une sélection ‘Réunion-Mayotte’. Cette dernière allait partir en Métropole pour participer à des rencontres interligues. Encore une fois, je me suis donné au maximum, sans forcément m’attendre à ce qui allait m’arriver : j’ai encore été retenu parmi les jeunes de Mayotte, puis, lors des matchs contre les réunionais, j’ai sorti mes meilleures prestations. J’ai appris par la suite que j’étais pris dans l’équipe qui rassemblait les meilleurs joueurs de la Réunion et de Mayotte. J’étais même promu premier gardien. Jétais vraiment très content. »
Pôle espoir*, première étape dans la réalisation d’un rêve de gosse
À cause de son avènement tardif, Ilam avait, dans un premier temps, ‘raté’ sa chance pour espérer intégrer le pôle espoir de l’océan indien. Ce n’était que partie remise, il nous l’explique : « J’ai effectué mon stage à la Réunion contre toutes attentes. En effet, à cette période là, c’était la génération 2004/2005 qui était en lice pour rentrer au pôle espoir, et moi je suis un 2003. Mais, grâce à Guillaume Brouste, qui me suit depuis longtemps, j’ai pu rentrer dans ce centre de pré-formation. Ce dernier représentait une chance en or d’intégrer un centre de formation d’une équipe professionnelle. J’ai fait partie d’un groupe qui s’est envolé pour jouer les interligues. Premier match, je sauve mes coéquipiers aux tirs au but, deuxième match je ne joue pas. Troisième match, je suis aligné une fois de plus, et je réalise une très belle prestation, remarquée par Auxerre. C’était la première étape dans la concrétisation d’un rêve de gosse, celui de faire du football mon métier. »
Signature à Auxerre, une nouvelle vie
Avant de signer à Auxerre, notre jeune pépite s’est essayé à Ajaccio. L’un des deux clubs principaux de la ville corse faisait partie de ses prétendants. Malheureusement tout ne se passe pas comme prévu. Il nous en dit davantage sur cet échec qui lui a malgré tout ouvert les portes de la réussite : « J’ai fait un essai à Ajaccio. Il n’a pas été concluant. Cet échec s’explique par le fait que je sois arrivé stressé, sans savoir à quoi m’attendre. Dans la foulée, l’Association de la Jeunesse Auxerroise, m’a elle aussi sollicité pour un essai. Cette fois-ci j’étais un peu plus préparé mentalement et j’ai été très bon. Même mes futurs coéquipiers étaient venus me féliciter pour ma performance. Sur le moment on ne m’avait pas encore dit si j’étais pris ou non, je suis donc reparti au Creps*, à la Réunion. C’est un beau jour qu’on me convoque au bureau du directeur pour m’annoncer que j’avais été pris à Auxerre. Je ne réalisais pas encore l’ampleur de la nouvelle. C’est lorsque je vois tout le monde m’envoyer un message pour me féliciter, et que j’ai vu les médias mahorais écrire que j’étais le premier mahorais formé localement à signer dans un club pro, que je me suis dit ‘waw c’est vraiment moi ça ?’. »
Une force tirée d’un immense soutien
Le jeune portier mahorais nous rappelle qu’il doit sa réussite à ses proches, toujours là pour lui. Il nous en dit davantage : « Ma mère et mon père ont toujours été derrière moi et m’ont toujours poussé à réaliser mes rêves. Depuis que je suis venu ici, on se parle tous les jours au téléphone. Mentalement, ça me fait le plus grand bien. Outre mes parents, Guillaume Brouste m’a lui aussi toujours accompagné, depuis le début. À l’heure actuelle, c’est comme mon agent. Zico et Chaka, respectivements mon ancien président et mon ancien entraîneur, à FCL, ont eux aussi toujours été là. Ça serait ingrat pour moi si je devais m’arrêter là. Je me sens soutenu, non seulement par l’ensemble de mon ancien club du FC Labattoir, mais aussi par une grosse partie de la population mahoraise. Ce soutien, cet amour, il me rend beaucoup plus fort et m’encourage à aller plus loin. »
Objectifs, ne pas se reposer sur ses acquis
Si Ilam peut se permettre de vivre avec le foot, il est loin de se reposer sur ses acquis : « Je suis actuellement le gardien numéro un avec les U19 d’Auxerre. Cette saison, j’ai même joué mon tout premier match avec l’équipe réserve en National 2. En parallèle je m’entraîne quelques fois avec le groupe professionnel. Mon objectif est de rester rester ici, de prolonger et de m’imposer. J’aimerai faire une grosse carrière et je ne me fixe aucun plafond.
Plan B et mots de fin
Une carrière de footballeur professionnel est éphémère et notre protagoniste en a conscience : « Une carrière dans le football ça va très vite. Je suis également un passionné d’aviation, et si je peux faire des études dans ça à côté, ça pourrait être un ‘après carrière’ pour moi. À part ça, j’ai un message à faire passer à mes cadets et ça sera mes mots de fin : accrochez vous à vos rêves, travaillez dur pour y arriver, et surtout, prenez du plaisir dans ce que vous faîtes. C’est très important. »
Des mots qui encourageront sûrement les futures générations. On l’espère !
Houmadi Abdallah
*chaque équipe possède généralement une équipe réserve. Ce sont principalement les U23 du club. La réserve est le dernier plafond avant l’équipe première
*Dans le football il existe plusieurs catégories. Par exemple U8 représente les joueurs ayant moins de 8 ans ou qui ont 8 ans.
*Dans le football, les tirs au but représentent le dernier moyen de départager deux équipes ayant le même score à la fin du temps, dans des rencontres qui exigent un vainqueur et un perdant. Également appelé « séance de penaltys »
*Un pôle espoir est un centre de pré-formation. On en compte à peu près 16 dans toute la France. 60% d’entre eux signent dans un club professionnel et 10% signent un contrat professionnel.
*Les centres de ressources, d’expertise et de performance sportives(CREPS), sont des établissements souvent destinés aux sportifs. Les jeunes qui intègrent un pôle espoir sont dans un cursus de « sport-étude ». Et les études se passent avec le « CREPS ».