Contestation sur l’emprise foncière du futur centre de formation à Cavani

Ce samedi, un petit groupe d’habitants manifestait sur les hauteurs de Cavani-Mtsapéré. Pacifiquement. Ils étaient venus entourer et soutenir Achata Youssouf, une coco respectée de la famille. La vieille dame détient, preuve d’achat à l’appui, une partie du foncier. L’affaire a été portée en justice.

Achata Youssouf se juge flouée dans une affaire qui aurait presque pu paraître comme banale au pays de l’évolution du droit de propriété. Si ce n’est qu’elle touche le centre de formation porté par le groupe DAM auquel nous avions consacré un article. Un investissement de 4,2 millions d’euros, pour un bâtiment qui doit s’élever sur les hauteurs de Cavani, proposant une structure de référence, un digne centre de formation professionnelle doté de locaux adéquats. L’obtention des fonds Feder, du FDS, de la BPI et du Conseil Départemental était naturellement conditionnée à la maitrise foncière. C’est un cabinet de topographie local qui a mené les négociations.

Qui avait repéré un terrain à Cavani en 2010. Mais aurait vu large, trop large, nous explique Boun Cheick, fils d’Achata Youssouf qui revendique être propriétaire de 157 m2 de l’emprise annoncée du centre de formation : « Le géomètre du projet est venu à plusieurs reprises voir ma maman qui ne parle pas français, et en profitant de ce que je faisais mes études en métropole, lui a indiqué qu’il était désormais propriétaire du terrain. Mais c’est impossible, ma mère a signé l’acte de vente en mai 2008. » Quelques semaines avant que Mayotte ne bascule dans le droit commun en terme d’acquisition.

L’acte de vente en possession d’Achata Youssouf

Un remembrement gourmand

Il était encore possible d’acheter un bien sans passer devant le notaire, l’acte devait être inscrit au livre foncier. Mais dans cette société de tradition orale, beaucoup de mutations de propriété n’y étaient malgré tout pas inscrites, nous avait expliqué la présidente de la Commission d’urgence Foncière (CUF), « nous allons d’ailleurs saisir la CUF pour régulariser le dosser, et obtenir un titre de propriété », rapporte Boun Cheickh, au fait des démarches puisque travaillant dans une banque de la place.

Un autre problème se greffe : si le propriétaire a bien signé l’acte de vente en 2008, ses héritiers se feraient prier pour régulariser, « ils bloquent les démarches d’obtention de l’acte de vente ». Et pourtant, le terrain a bien été borné par un géomètre assure le fils.

Une situation dans laquelle se serait engouffré un autre géomètre, celui du projet du centre de formation, « il a pratiqué un remembrement en 2010 en incluant le terrain de ma mère, je faisais encore mes études. Un permis de construire a été déposé le 29 mars 2022. J’ai donc saisi maitre Tesoka. » Laurent Tesoka est un avocat connaisseur des spécificités mahoraises… pour travailler avec plusieurs collectivités.

Recadrer les pratiques

Le terrain dont une partie est contestée, sur les hauteurs de Mtsapéré

Il était d’ailleurs sur place ce samedi 21 mai pour acter le début d’une procédure. « Je note que le panneau de permis de construire est posé très en retrait de la route, peu visible. Ça jette un doute quand on sait que le délai de contestation court sur les deux mois qui suivent l’affichage public. Nous allons attaquer ce permis au pénal, et saisir la CUF. Car le remembrement effectué par les promoteur du projet inclut le terrain de 157m2 d’Achata Youssouf », indique-t-il. Ils veulent malgré tout médiatiser le sujet, « pour arrêter ces pratiques qui ont trop souvent cours à Mayotte ».

Le permis de construire est bien au nom du groupe DAM, « il aurait racheté à la SCI Ouvima », croit savoir Boun Cheickh.

Nous avons contacté les associés du groupe qui ne souhaitaient pas faire de commentaires, mais qui semblaient découvrir le problème, « nous allons contacter le cabinet de topographie qui a géré le dossier ».

A suivre donc, mais cela donne un aperçu des défis qui attendent la CUF en matière de foncier, où encore hier, nous étions en droit coutumier, alors que les besoins en infrastructures de demain, c’est dès aujourd’hui !

Anne Perzo-Lafond

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