Deux ans de prison pour un homme impliqué dans l’enlèvement de sa voisine à Koungou

Ce mardi, au Tribunal de Mamoudzou Haoussam A. a été jugé pour l’enlèvement et la séquestration de sa voisine, survenus à Koungou en septembre 2018. Le tribunal a retenu sa culpabilité après l’enquête sur cette affaire impliquant plusieurs complices.

Quand Haoussam A. entre dans la salle d’audience du tribunal de Mamoudzou, il semble ailleurs. Le regard vide, les mains jointes, le prévenu avance lentement jusqu’à la barre. Sur son visage, une confusion : il ne comprend pas vraiment pourquoi il est là.

la salle d’audience B où avait lieu l’audition d’Haoussam A.

L’affaire débute lorsque la mère de la victime Anrafa S. a alerté les autorités pour signaler l’enlèvement de sa fille. Elle raconte qu’un homme l’a contactée, affirmant que sa fille lui devait de l’argent et qu’elle ne pourrait la revoir qu’après paiement de la somme réclamée. Au fil des investigations, il apparaît que la victime proposait à des personnes en situation irrégulière des promesses de papiers administratifs en échange d’argent en prétextant avoir des contacts… Elle allait également vers des personnes leur demandant de lui ramener des clients, parmi lesquels l’accusé, menuisier et voisin, a qui elle avait aussi fait la promesse de régulariser sa situation administrative.

Lorsque certains clients ont réalisé qu’ils ne seraient jamais remboursés et n’allaient jamais avoir les fameux papiers, la situation a dégénéré. Entre le 2 et le 4 septembre 2018, à Koungou, l’accusé et trois autres hommes se rendent au domicile d’Anrafa dans le but de l’intimider et la forcer à rendre l’argent. Ce déplacement était prémédité : ils avaient prévu d’aller chez la victime pour la menacer et lui mettre la pression, mais la situation a rapidement dégénéré en enlèvement. Ce n’est qu’ensuite que certains se sont introduits dans sa maison pour saisir ses biens. Les faits retenus par la justice sont donc l’enlèvement et la séquestration ainsi que des violences aggravées par trois circonstances, entraînant une incapacité de moins de 8 jours.

Le prévenu conteste son implication et explique son rôle

À la barre, le père de famille a d’abord nié avoir participé activement à l’enlèvement de sa voisine

À la barre, le père de famille a d’abord nié avoir participé activement à l’enlèvement de sa voisine. Il affirme être arrivé sur les lieux alors que la séquestration avait déjà eu lieu et la saisie des biens étaient déjà en cours. « Je n’ai pas participé à l’enlèvement, on en a parlé c’est vrai, mais je n’étais pas là quand ça s’est passé », assure-t-il. Selon lui, il était chez lui avec sa femme et ses enfants, puis est parti chercher du bois pour son atelier, et n’a fait que constater ce qui se déroulait à son retour.

Toutefois, Haoussam finit par admettre qu’à l’origine, il avait proposé de kidnapper le petit garçon de la victime, expliquant que cela aurait mis plus de pression sur la mère et permis de récupérer l’argent plus rapidement. Il va jusqu’à dire que l’enfant l’aurait suivi sans souci étant donné qu’ils étaient voisins et qu’ils se connaissaient. Le prévenu a insisté sur le fait qu’il n’a jamais approuvé la violence et qu’il a agi pour protéger le fils d’Anrafa S. lorsque les autres saisissaient les biens dans sa demeure. Il raconte avoir pris un meuble qu’il avait lui-même confectionné pour la victime, demandant aux autres de le lui remettre puisqu’elle ne l’avait pas encore payé. Quand Anrafa est revenue, il lui aurait remis son fils ainsi que le meuble, assurant qu’ils étaient en sécurité. « Si vraiment j’avais voulu lui faire du mal je ne me serais pas occupé de son fils et je n’aurais pas mis son meuble en sécurité chez moi, au contraire j’aurais profiter de la situation »,  a défendu Haoussam A. face à la présidente.

L’accusé a également souligné le fait qu’il s’est toujours interposé lorsque la victime a été menacée par le passé par d’autres créanciers. Il se défend en disant que les accusations reposent principalement sur les témoignages des trois autres mis en cause : « Qu’ils disent que j’y étais, je ne vais pas le nier, mais dire que j’ai participé, c’est leur parole contre la mienne », explique-t-il. Pour ses trois complices, en revanche, Haoussam était bien présent et impliqué lors de l’enlèvement et de la récupération des biens, créant une contradiction directe avec sa version. L’accusé, en situation irrégulière et espérant obtenir ses papiers grâce aux business d’Anrafa, avait déjà été expulsé deux fois.

Sursis, interdiction d’arme et de territoire 

À la barre, le mis en cause se décrit comme quelqu’un de tranquille, pour qui c’est la première expérience au tribunal. Il implore la clémence du procureur et rappelle qu’il a déjà manqué une convocation, présentant ses excuses. « Je m’excuse si jamais j’ai fait une erreur et pour la dernière fois où j’ai manqué une audience, et je vous demande d’être compréhensif ».

Covid, prison, Mayotte
Un mandat de dépôt a été prononcé à l’encontre du prévenu

Le prévenu va aussi plaider le fait qu’il ne savait que ce qu’il faisait était grave : « Je ne savais pas que cela allait me mener ici, je n’étais pas conscient des conséquences », a-t-il exprimé à la présidente avec une pointe de regret dans la voix. Le procureur, de son côté, a insisté sur la gravité des faits et rappelle qu’Haoussam A. n’est pas la première personne à subir les pratiques d’Anrafa S., il y’aurait des faits remontant à plusieurs années selon ses déclarations et celles d’autres victimes. Il a ensuite souligné la préméditation et les violences aggravées et demandé que la justice soit ferme.

À l’issue des délibérations, le tribunal a retenu la culpabilité du prévenu. Il est condamné à deux ans de prison avec sursis simple, assortis de cinq ans d’interdiction de détenir ou de porter une arme et de cinq ans d’interdiction de séjour sur le territoire français. Un mandat de dépôt est également prononcé, et l’accusé dispose de 10 jours pour faire appel s’il conteste cette décision.

Shanyce MATHIAS ALI

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