Le vote de confiance est un vote d’un parlement par lequel les députés décident d’accorder ou non leur confiance au gouvernement en place. « Le Premier ministre, après délibération du Conseil des ministres, engage devant l’Assemblée nationale la responsabilité du Gouvernement sur son programme ou éventuellement sur une déclaration de politique générale ». (article 49-1 de la Constitution).
Depuis 1958, l’article 49-1 a été utilisé à 41 reprises, sans jamais provoquer la chute d’un gouvernement… Aussi, ce lundi 8 septembre pourrait voir celle du gouvernement de François Bayrou, une première sous la Ve République !
Les dépenses publiques et le budget 2026, enjeux des crispations

Lors de la présentation du budget primitif pour 2026, le 15 juillet dernier, François Bayrou avait fait une conférence de presse alertant sur la situation catastrophique des finances publiques de la France et appelant à un sursaut national. « Nous vivons aujourd’hui un moment de vérité, un de ces moments dans l’histoire d’une nation où chacun doit se demander : quelle part suis-je prêt à prendre à notre avenir collectif ? Nous nous sommes habitués depuis 50 ans à ne plus avoir de budget en équilibre, à emprunter pour financer les dépenses publiques les plus élevées au monde. Et, à force de concentrer nos regards sur la redistribution, nous avons négligé la question de la production, nous privant nous-mêmes des moyens d’assurer notre richesse nationale. La menace d’écrasement par la dette est ainsi devenue réelle : elle représente désormais 114 % du produit intérieur brut (PIB), et son remboursement ne cesse de peser de plus en plus lourd dans notre budget. Chaque seconde, la dette augmente de 5.000 euros. C’est la dernière station avant la falaise », avait alors déclaré le Premier ministre.
Pour résorber le déficit, il avait proposé un plan d’économies budgétaires de près de 44 milliards d’euros (43,8 Mds €) s’attirant ainsi les foudres de la plupart des partis de l’opposition, LFI et le RN en tête. Ces deux parties représentant largement plus de la moitié des parlementaires au sein du palais Bourbon, il est fort à parier qu’ils vont unir leur voix, ce lundi, pour faire tomber le Gouvernement. François Bayrou joue donc son avenir à Matignon ce lundi et peut-être davantage… Aussi, ces derniers jours, il a fait le tour des médias afin de plaider sa cause. Ainsi, chez nos confrères de « C à vous » sur France 5, François Bayrou a déclaré qu’il refusait de faire « des marchandages » et a déploré une situation « d’oppositions haineuses » à l’Assemblée nationale. Et d’ajouter « J’ai toujours été alarmé par la situation d’un pays qui se laissait aller à financer sa vie de tous les jours par des emprunts que devront payer les plus jeunes », au sujet de son plan d’économies de 44 milliards d’euros.

Ce plan a été vivement critiqué par les Insoumis mais aussi du côté du Rassemblement national, quitte à assumer l’instabilité politique. « Aucun d’entre nous n’acceptera de céder au piteux chantage du vote de confiance initié par le Premier ministre, qui semble d’ailleurs très surpris de son peu de succès », a déclaré Marine Le Pen dans son discours de rentrée. « Nous avons vu au cours de l’année le résultat de la politique du pire. (…) La France est un pays à l’arrêt, c’est-à-dire en déclin par rapport à tous ses voisins », déplore la cheffe de file des députés RN, qui évoque « un bourbier économique » et « une France déconsidérée à l’internationale ». « Aujourd’hui, l’homme malade de l’Europe, par leur faute, c’est la France », a-t-elle fustigé.
Seul brin d’optimisme, s’il en est, du côté des LR de Laurent Wauquiez qui a encore indiqué ce week-end qu’il ne censurerait pas le Gouvernement même en cas de nomination d’un socialiste à sa tête. Il a ainsi annoncé sur LCI, dans l’émission « En toute franchise », maintenir son refus d’une censure automatique d’un gouvernement socialiste. « Évidemment que je ferme la porte à un gouvernement de gauche. Je l’ai dit jeudi (…) en disant tout de suite de façon très clair qu’un gouvernement d’Olivier Faure, avec le programme socialiste, nous ne voterions pas pour, nous ne soutiendrons pas et nous ne participerions pas. En revanche, j’ai dit quelque chose qui est important pour moi sur la censure automatique ».
A l’issue du vote de confiance quels sont les scenari possibles ?
En tout premier lieu, la première hypothèse serait que François Bayrou obtienne la confiance des députés. Il resterait alors à son poste et son gouvernement ne démissionnerait pas. Il pourrait alors mettre en place son plan d’économies budgétaires de 44 milliards d’euros. Mais ne soyons pas candides… il y a très peu de chances que ce scénario advienne.

Seconde possibilité, et peut-être la plus probable : François Bayrou est désavoué par la majorité des députés. Le Premier ministre n’a pas d’autre choix que de présenter sa démission au chef de l’État ainsi que celle de son gouvernement. Emmanuel Macron a alors la possibilité de nommer une nouvelle personne à Matignon (article 8 de la constitution) en choisissant un nouveau candidat. L’objectif du chef de l’État serait de trouver une personne qui fasse consensus, pas chose facile…, pour éviter une nouvelle censure et un blocage politique. Le Président peut également prendre un peu plus de temps, comme il l’avait fait avec le gouvernement Attal l’année dernière, quand il avait nommé Michel Barnier Premier ministre une fois les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris terminés.
Troisième solution : la dissolution et le retour aux urnes. C’est ce que veulent mordicus les partis d’extrême gauche et d’extrême droite que sont LFI et le RN. Ils y sont largement favorables, considérant que seule la légitimité populaire par les urnes permettrait de sortir le pays de la situation catastrophique dans laquelle il se trouve, et se disent prêts à assumer leurs responsabilités. Ainsi, Jean-Luc Mélanchon, pas plus tard que ce samedi lors d’un discours en marge de la grande braderie de Lille, a appelé à tout bloquer le 10 septembre prochain. « Le 10, nous bloquerons tout pour faire partir Monsieur Macron lui-même car c’est lui qui est responsable de la crise ».

De son côté, Laurent Wauquiez, toujours sur LCI dans l’émission « En toute franchise », s’est dit « totalement opposé à ce qu’on pousse à une démission du président de la République. Pas parce que c’est Emmanuel Macron, pas parce qu’il est impopulaire. Mais à partir du moment où, dans nos institutions, on va écrire le fait qu’on peut pousser un Président à la démission, on aura achevé de perdre la Ve République. Aller là-dedans, nous en paierons le prix pendant des années ».
Pour le parti Reconquête « Une élection présidentielle anticipée est ce qui peut arriver de mieux » a ainsi indiqué, sur BFMTV, l’eurodéputée Sarah Knafo, et d’ajouter qu’« une démission du président de la République est la seule chose qu’il nous faudrait ».
Quant au Rassemblement national, « Nous avons l’immense chance d’avoir en la personne de Jordan Bardella d’avoir un futur Premier ministre pugnace et talentueux. Il est prêt à prendre demain la tête de notre gouvernement », assure Marine Le Pen. Elle appelle ainsi à « une alternance aussi rapide que possible, parce qu’il y a urgence. Notre devoir est de proposer un chemin de redressement à des millions de Français qui observent avec colère et parfois désespoir leur pays ».
Et de poursuivre : « Le 8 septembre, au soir, le président de la République devra tirer les conséquences du vote des députés. Il me paraît aujourd’hui inenvisageable qu’il ne rappelle les Français aux urnes pour désigner une nouvelle Assemblée. La décision lui appartient, mais s’il décide de gagner du temps en nommant un nouveau Premier ministre, ce dernier, sans prise en compte de ces aspirations, sera lui aussi censuré », prévient la patronne du RN.

La situation s’annonce donc compliquée et houleuse une fois de plus dans les prochains jours. Les questions qui vont se poser à Emmanuel Macron sont qui nommer à la place de François Bayrou ? (Le niveau des prétendants étant difficilement à la hauteur des enjeux actuels…) Et pour combien de temps ? Telle est l’équation à deux inconnus que devra résoudre le chef de l’État dans les prochaines heures.
Enfin, seule petite consolation pour les Mahorais dans cette instabilité politique, la loi de programmation pour la refondation de Mayotte ayant été adoptée par le Parlement il y a quelques semaines, le nouveau Gouvernement ne devrait pas la remettre en cause, Inch’Allah !
B.J.