Le « pass Sport » encore sous-utilisé à Mayotte

Les capacités sportives de nos jeunes sont sous-exploitées, le budget du ministère de la Santé pour les inciter à pratiquer, aussi. Pour y remédier, DRAJES et CROS misent tout sur la communication.

Pour la quatrième année consécutive, le pass Sport revient pour aider les jeunes de 6 à 30 ans à exercer une activité sportive dans un club, une association sportive ou une salle de sport. Depuis le 1er juin, les bénéficiaires du dispositif peuvent utiliser leur pass pour bénéficier de 50 euros d’économie sur leur inscription à une large offre d’activités sportives.

Mis en place depuis 2021 par le ministère des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques, ce dispositif d’aide financière a déjà permis à 3,7 millions de jeunes de 6 à 30 ans, notamment boursiers ou en situation de handicap, de pratiquer une activité sportive en France.

Et cette année spéciale de JO en France est l’occasion de booster le dispositif comme l’a rappelé la ministre des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques, Amélie Oudéa-Castéra, qui annonce une nouvelle formule, avec  la création d’un nouveau site internet (pass.sports.gouv.fr) et la mise en place d’un QR code dédié : « Le gouvernement se donne l’objectif ambitieux d’atteindre 2 millions de bénéficiaires du pass Sport d’ici la fin de l’année afin de permettre à un plus grand nombre de jeunes d’accéder à leur droit en matière de sport et de bâtir une nation sportive ».

A Mayotte où la, moitié de la population est mineure et une grande partie en mal d’activité, cette aide est la bienvenue, surtout que beaucoup de jeunes possèdent des qualités athlétiques. Le dispositif est bien en place ici, c’était le CROS (Comité régional Olympique et Sportif) qui le gérait, recentralisé à Paris depuis. Pour son président Madi Vita, la marge est encore importante pour tout consommer : « Les parents ne comprennent pas toujours l’utilité de cette aide car beaucoup de licences sont dispensées gratuitement ici à Mayotte. Ils ne voient pas que cela peut aider le club, du coup, ils n’utilisent pas le pass Sport dont le budget n’est pas consommé intégralement ».

Le code, un sésame mal compris

Elodie Alves, Chargée de mission Sport à la DRAJES (Délégation Régionale académique à la jeunesse, à l’engagement et aux sports) Mayotte, nous décrypte le mécanisme : « Pour bénéficier du pass Sport de 50 euros, il faut que l’enfant bénéficie de l’allocation de Rentrée Scolaire, ou bien d’une aide en raison d’un handicap qu’il s’agisse d’un enfant ou d’un adulte, puisque la mesure est valable jusqu’à 30 ans, ou enfin, d’un étudiant boursier. » Via le fichier de la CAF (Caisse d’Allocation Familiale), les personnes qui remplissent ces conditions vont recevoir un mail du ministère des Sports, qui les informe de leur accès au pass Sport et leur transmet un code. « Ils doivent alors se rendre dans le club où ils veulent inscrire leur enfant et bénéficier ainsi d’une réduction de 50 euros sur la licence. Ensuite, le club se fait rembourser auprès du ministère. »

Une manière de soutenir les structures d’un côté, et d’offrir aux jeunes la possibilité de se développer à travers un sport. Là où c’est intéressant, c’est que dans le cas de Mayotte où le niveau de vie incite les clubs à délivrer des licences gratuites, personne n’y perd, « le club peut se faire rembourser 50 euros ». Une sorte d’encouragement à faire du social auprès de ces jeunes, tout en permettant aux clubs de se structurer, « le ministère encourage la pratique sportive ».

La difficulté, c’est de faire comprendre aux parents l’utilité d’arriver au club avec ce code, véritable sésame pour ce dernier afin de percevoir l’aide. Pour Madi Vita, cela relève même de l’incompréhension pour certains, « plusieurs d’entre eux pensaient qu’ils devaient payer 50 euros, donc ils se gardaient bien de venir avec le code ».

1.500 pass demandés sur un potentiel de 25.000

Un véritable défi de communication attend donc chaque année Elodie Alves : « On explique aux parents que cette aide aux clubs leur permet de s’équiper, et donc à leurs enfants de pratiquer dans de meilleures conditions. »

Petit à petit, l’information gagne à en croire les chiffres. Si l’année de lancement en 2021 enregistrait 316 bénéficiaires du pas Sport, en 2022, ce chiffre avait plus que doublé, 682, et l’année dernière, ils étaient 1.576, « sur plus de 25.000 bénéficiaires potentiels répondant aux critères sociaux imposés. » Il y a encore de la marge donc. Les clubs qui étaient 30 à en bénéficier au départ, étaient 94 en 2023, « sur plus de 300 structures éligibles. « Le budget alloué n’est pas encore dépensé entièrement ».

Comme en métropole, ce sont majoritairement les garçons qui en bénéficient, 58%, mais les 42% de filles sont à souligner pour être « le meilleur taux de féminisation au niveau national ».

Enfin, la moitié des utilisateurs du pass Sport sont âgés de 6 à 10 ans, ensuite viennent les 11-14 ans. Les jeunes sont donc bien majoritairement bénéficiaires dans cet accompagnement à leur pratique sportive.

La com’ a ses limites car il est compliqué de savoir pour la DRAJES qui est éligible, « la protection des données ne nous permet pas d’avoir accès aux fichiers de la CAF ». La représentante de la DRAJES nous explique agir auprès des clubs : « Nous leur faisons des démonstrations des manip à faire en ligne pour qu’ensuite, ils puissent aider les parents à récupérer leur code. Nous passons aussi dans tous les établissements scolaires pour toucher les enfants et les inciter à pratiquer du sport. »

Anne Perzo-Lafond

Partagez l'article :

Subscribe

spot_imgspot_img

Les plus lus

More like this
Related

Au lycée de la Cité du Nord, la possible fin des récréations embrase la communauté éducative

Entre la contestation de la suppression des récréations, des pannes informatiques persistantes et des locaux dégradés, les enseignants du lycée du Nord dénoncent une situation de plus en plus intenable.

Intercommunalités de France, Interco’ Outre-mer et l’association des intercommunalités de Mayotte alertent sur une « loi de programmation » sans programmation

Les présidents d'Intercommunalités de France, d'Interco Outre-mer et d'Interco 976 (Mayotte), alertent sur la contradiction majeure entre une volonté politique et le projet de loi qui doit la traduire. Ils soulignent que le texte, en l'état, ne s’apparente pas à une loi de programmation réelle et ne donne pas aux territoires les moyens de la mettre en œuvre, risquant ainsi de transformer une promesse d'avenir en une crise durable.

Air Austral déplore un manque de repères pour poursuivre sa croissance

Hugues Marchessaux, président du directoire d’Air Austral et président d’Ewa Air et Drissa Samaké, directeur général d’Ewa Air, ont dressé, ce mardi 24 juin, le bilan de l’exercice 2024-2025 des deux compagnies. Avec des résultats d’exploitation positifs, malgré les événements perturbateurs et les contraintes, l’avenir semble prometteur, mais le manque de visibilité à moyen et long terme, notamment sur les infrastructures, laisse planer le doute.

La chambre régionale des comptes salue les mesures de redressement du budget de la commune de Kani-Kéli

Dans son avis du 19 septembre 2024, la chambre régionale des comptes (CRC) avait arrêté le déficit du compte administratif 2023 de la commune de Kani-kéli à 1.863.108 euros. La CRC avait alors proposé à la commune un plan destiné à permettre le retour à l’équilibre budgétaire à la fin de l’année 2028.