Hier en fin de matinée, derrière le self du CHM, tout le personnel hospitalier était convié à un atelier sur la nutrition à l’approche de la période sacrée. Dans quelques jours, les musulmans s’apprêteront à faire le ramadan et ne pourront notamment ainsi plus manger, ni boire, de l’aube jusqu’au coucher du soleil, pendant un mois.
Cette période, particulièrement propice à la méditation, au partage et aux moments de convivialité lors des repas, est aussi une période charnière, où les premiers jours de jeûne peuvent être particulièrement difficiles à supporter.
Pour soutenir les soignants pratiquant le ramadan, l’EMET et les diététiciennes du CHM ont organisé un atelier autour de trois thématiques principales. Sur le premier stand, des infirmières et des diététiciennes avaient construit un jeu ludique et visuel, avec des cartes proposant des choix de repas, en demandant aux soignants d’identifier les aliments à privilégier lors des trois prises de repas autorisées à la rupture du jeûne : le foutari (repas de la rupture du jeûne), moment après les prière du tarawih (repas après les prières) et le tsahou (repas consommé à n’importe quel moment de la nuit).
Foutari : boire de l’eau avant même de manger
A la rupture du jeûne, les mahorais mangent souvent des poissons frits, des grillades de viande, du manioc, du songe, des bananes, du poisson en kakamuku… Mais idéalement, une diététicienne du CHM conseille avant tout de s’hydrater : « Avant même de manger, il est important de boire un ou deux verres d’eau, à température ambiante pour ne pas faire mal à l’estomac et en buvant lentement. »
« Manger équilibré sans excès »
A la rupture du jeûne, la sensation de faim conduit instinctivement « à favoriser des aliments sucrés », or cela conduit à un déséquilibre alimentaire, confie la diététicienne, « où le corps prend du mauvais poids et souffre d’autres carences alimentaires. » Ainsi, pour la rupture du jeûne, les nutritionnistes conseillent de manger des légumes, un produit laitier, des fruits, des féculents et une protéine, en privilégiant les cuissons à l’eau, pour éviter les fritures, et en prenant le temps de manger lentement, pour mieux digérer, prendre plus de plaisir à manger et mieux réguler les quantités ingérées.
Sur le deuxième stand, nous avons rencontré Elkarim Abdou, un enseignant d’activité physique adaptée, pour qui le ramadan est aussi une « période où on peut se faire du bien en pratiquant une activité sportive adaptée à ses capacités physiques, son âge et son état de santé. »
Pour cet enseignant, l’important est avant tout de « privilégier la sécurité de la personne pour bien se dépenser ». Par exemple, l’enseignant conseille aux personnes qui ont une bonne condition physique, de maintenir une activité, après avoir consommé un repas quelques heures plus tôt, en allant courir avant l’aube pour pouvoir s’hydrater après une séance de sport et aborder une nouvelle journée de jeûne en pleine forme, ou le soir, avant ou après les prières du Tarawih, en ayant pris un peu de temps pour digérer. En revanche, l’enseignant conseille de limiter la pratique d’activité physique à jeun en plein milieu de la journée (entre 10h et 16h), à des horaires très éloignés des repas et souvent en pleine chaleur.
Des exercices sportifs simples à faire chez soi à tout âge
Pour les personnes qui souhaiteraient faire des exercices sportifs à la maison, un fascicule d’exercices sportifs a été créé par les équipes du CHM, permettant de faire des exercices, debout, allongé et sans matériel. Pour Elkarim Abdou, le ramadan est l’occasion de « faire du sport entre amis ou en famille, à n’importe quel âge, et de prendre soin de sa santé » lors de moments de partage.
Enfin, sur le troisième stand de cet atelier, plusieurs plats avaient été préparés par le prestataire de l’hôpital, Panima, afin de montrer aux agents quels aliments pouvaient être préparés facilement pendant le ramadan, pour manger équilibré tout au long de ce mois de jeûne. Plusieurs plats étaient proposés, tels que des quiches aux légumes sans pâte, des rougails d’aubergines, des jus pressés avec des fruits de saison, ou encore du lait aromatisé avec des bâtonnets de cannelle ou de gousses de vanille.
un atelier préventif contre les maladies dues à une mauvaise alimentation
Cet événement n’aurait pu voir le jour sans le concours de la coordinatrice EMET, diététicienne et nutritionniste, Béatrice Andrien, qui explique que cet atelier est aussi un moyen préventif pour réduire des conséquences sanitaires vécues à l’hôpital où « chaque année, après le ramadan, de nombreux patients ont pris beaucoup de poids » Le but de cet atelier est de donner des clés, pour manger plus sainement, permettant ainsi de profiter pleinement de cette période festive.
Béatrice Andrien insiste sur le fait qu’aucun aliment n’est interdit pendant le ramadan, « à condition que tout aliment soit consommé avec modération, et ingéré progressivement en fonction des besoins (…) en commençant par bien s’hydrater et en variant les aliments, pour ne pas avoir de carences et en veillant à ne pas faire d’excès, qui seraient contreproductifs pour le corps. »
Ce premier atelier Nutrition et Ramadan a connu un franc succès auprès des soignants du CHM, et les équipes du CHM souhaiteraient le réitérer, notamment auprès des patients. Et pourquoi pas auprès d’un public plus large à Mayotte…
Mathilde Hangard