Né à Marseille, Inzagui Bacari est arrivé à Mayotte quand il était encore très jeune. Originaire de Combani, il est actuellement scolarisé en terminale MSPC (Maintenance des systèmes de production connectés) au lycée de Kahani. C’est son oncle qui lui a fait tout d’abord découvrir la boxe, puis par la suite le kick-boxing. « J’ai commencé la boxe en 2018 au club de M’roalé, où je suis encore, c’est mon oncle qui m’a proposé de voir comment c’était, je faisais aussi du foot à côté », raconte Inzagui. Ce n’est qu’un an plus tard, en 2019, que l’adolescent s’essaie au kick-boxing. « Mon oncle est également mon entraineur. Ce que j’aime dans le kick-boxing c’est le contact et la discipline, ça me rend joyeux, c’est le moment où je peux me vider la tête et ça fait du bien ».
Malgré son jeune âge, il a déjà un beau palmarès puisque qu’il est champion de Mayotte en kick-boxing depuis maintenant 3 saisons (2022, 2023 et 2024). « Le combat pour devenir champion de Mayotte 2024 s’est déroulé le 10 décembre dernier. Je me suis entrainé de façon plus intensive, au moins deux mois avant le combat, pour être bien préparé ». Être champion de Mayotte ouvre la voie au championnat de France, aussi cela nécessite de ne rien laisser au hasard. « Il faut se préparer correctement, cela demande une bonne qualité physique mais aussi une bonne préparation, notamment au niveau du cardio ». Pour cela Inzagui s’entraine 3 fois par semaine, après les cours, à raison de 2 heures à chaque fois, et parfois même le dimanche. Cela consiste à faire quelques exercices d’assouplissement, de se préparer avec son coach et taper aussi sur un sac.
Et même quand il n’a pas entrainement, il part courir. « C’est un sport qui demande beaucoup de condition et de préparation physique. En plus de mes entrainements je vais régulièrement courir pendant deux heures afin de travailler notamment mon cardio. En général je pars de Combani, je vais jusqu’à la retenue collinaire et je reviens par Tsingoni ». Inzagui pratique le kick-boxing full contact (plein contact), c’est-à-dire qu’il ne retient pas ses coups quand il les porte, et que son adversaire peut être vaincu par KO. « En compétition nous portons un casque, un protège dents et des protèges tibia, indique-t-il. Je me prépare au moins un mois avant pour parfaire ma technique, notamment les coups de pied et les crochets ».
Une préparation intensive malgré les barrages
En dépit de la crise sociale à Mayotte, Inzagui n’a pas interrompu son entrainement et ses exercices techniques. « Je me suis entrainé malgré les barrages, cela m’a donné encore plus de motivation pour aller représenter Mayotte lors de ce championnat ». En effet, il était hors de question qu’il ne puisse pas y participer à cause des blocages. « Je suis parti à 6 heures du matin de chez moi, à Combani, avec mon oncle. Nous avons organisé les choses et appelé du monde afin qu’à chaque barrage quelqu’un puisse nous attendre de l’autre côté et nous emmener. Mon avion était à 16 heures, il ne fallait pas que je le loupe ».
Le garçon de 17 ans et son oncle ont décollé le 31 janvier au soir pour arriver dans l’Hexagone le lendemain matin. Il fallait un minimum de temps pour la récupération afin d’être prêt pour deux jours intensifs de compétition. « On a dormi dans un hôtel à Bondy. Le jour même de notre arrivée, je me suis entrainé sur le parking devant l’hôtel. J’ai notamment travaillé ma technique mais aussi fait de la corde à sauter pour me réchauffer », sourit-il. Vient ensuite le championnat à proprement parler. En deux jours, le jeune homme a effectué 4 combats, 2 par jour. Le premier jour du tournoi a été, on pourrait dire, une simple formalité pour lui. « Mon premier combat, en 1/8 de finale, je l’ai remporté par KO au 2e round. Lors du combat suivant, en 1/4 de finale, j’ai gagné au 2e round également par arrêt de l’arbitre », indique-t-il.
Ce n’est que le deuxième jour de la compétition que les choses se sont gâtées pour lui avec une tournure qui aurait pu être tout autre. « Je me suis blessé à la cheville, en 1/2 finale, j’ai eu une entorse. J’étais dans le doute et plus vraiment combatif… Mon coach m’a remotivé en me disant : Ne passe pas à coté de cette opportunité. Je me suis dit qu’il fallait que je gagne avec les points des juges, j’ai alors appuyé mes coups, notamment avec des coups de pied bas, à la cuisse, et cela a payé ». Après ce combat, Inzagui s’est donc retrouvé en finale, à une victoire du graal : le titre de champion de France. Aussi, cette finale il l’a gagné au forceps, à la motivation, mais aussi grâce à sa technique qui lui a permis d’engranger des points de la part des jurés. « La finale était vraiment dure, explique-t-il. Je me suis transformé en guerrier. Même fatigué je devais envoyer des coups… Dans la boxe il n’y a pas de secret, cela passe par de l’entrainement, de la motivation, écouter son coach et surtout aimer ce que tu fais ».
Vers une carrière professionnelle ?
En dépit de son titre, le jeune homme reste humble avec la tête sur les épaules. « Bien-sûr que c’est un plaisir, un bonheur, une grande satisfaction d’être champion de France. Aussi je garde la tête haute malgré tout ce qui se passe dans l’île et le contexte actuel… Je pense que cela m’a encore plus motivé pour représenter Mayotte lors de ce championnat de France ». Après son bac, Inzagui compte poursuivre ses études dans l’Hexagone, du côté de Nantes, pour faire un BTS, avec sans doute le secret espoir d’intégrer l’équipe de France.
« Oui, c’est aussi un de mes objectifs d’intégrer l’équipe de France de kick-boxing et de devenir pourquoi pas professionnel », confie-t-il. En attendant, son objectif à court terme, au-delà du bac bien-sûr, est de continuer à progresser en faisant des combats, notamment lors de prochains galas à La Réunion, au mois d’avril prochain, ou encore à Madagascar. Il n’oublie pas non plus de lancer un message aux jeunes qui voudraient se lancer dans la boxe, « Il ne faut pas avoir peur, il faut du courage. Il n’y a pas de secret…Il faut être motivé et que cela soit une passion ».
B.J.