C’est sur un territoire partiellement mis sous cloche que le représentant de l’Éducation nationale tente de faire fonctionner tant bien que mal l’enseignement. S’adressant tout d’abord aux victimes de violences physiques, Jacques Mikulovic rappelle qu’a été mis en place le réseau « Prévention-aide et suivi » avec la MGEN, qui propose cellule d’écoute et soutien psychologique. Et invite à « ne pas se mettre en danger », « une organisation de travail à distance est préférable », hormis pour les périodes de préparation de paye.
Les établissements ensuite dont la sécurité est de nouveau en cours de renforcement, « le week-end dernier une école a été vandalisée, je ne peux que condamner ces actes et être scandalisé d’une attaque dans ce qui doit être un lieu d’apprentissage ».
Quant à l’enseignement, la continuité pédagogique est mise à mal sur un territoire où le taux d’équipement en matériel numérique est faible, et où la connexion internet est particulièrement détériorée en ce moment. Il est très compliqué de télécharger le moindre fichier, ce qui perturbe l’accès à tous les contenus de cours en ligne. Un système de distribution de travail est mis en place comme pendant le confinement Covid quand l’accueil physique n’est pas possible, mais encore faut-il passer les barrages. « Maintenir le lien avec les élèves est un impératif. Celui-ci est déterminant dès maintenant pour les professeurs principaux des classes de terminales au regard des enjeux de Parcours sup. Chaque élève doit être recontacté. »
Le recteur fait part de son inquiétude « au regard du nombre de jours d’école perdus, des besoins des élèves et de la difficulté que l’on va rencontrer à remettre les élèves au travail. L’éducation sera déterminante pour retrouver une sérénité de long terme sur ce territoire. »
La moitié des élèves de 6è n’a pas le niveau CE1
Sur la partie 1er degré, l’inquiétude du représentant de l’Éducation nationale est plus vive encore, « Les évaluations de nos élèves, quel que soit leur niveau, montrent des signes alarmants de non maîtrise de la langue française qui, de fait, pénalise ces mêmes élèves dans leur cursus comme dans leur ambition scolaire et professionnelle. » Livrant les dernières données chiffrées : « à l’entrée en sixième, à Mayotte, moins d’un élève sur deux (47%) est en mesure de lire 70 mots par minute alors qu’il s’agit du niveau de fluence normalement attendu à la fin du CE1 ».
Il rappelle que si le shimaore est ponctuellement utilisé dans les petites classes comme accès au français, à partir du cycle 2, donc à partir du CP, il est demandé d’échanger avec les élèves « exclusivement en langue française ». Sous peine d’avoir un « impact négatif sur l’ensemble des disciplines d’enseignement ». Il rappelle que pour les élèves, les adultes doivent être un repère de « rigueur et de cohérence dans l’attitude (…) comme dans « l’exactitude des contenus enseignés ». Pas de flou artistique donc dans les notions enseignées.
Il est demandé aux Inspectrices et Inspecteurs de proposer un test commun adapté à chaque niveau pour évaluer les élèves à chaque période scolaire en lecture et en mathématiques.
Un élément encourageant et que nous avions souligné après la mise en place il y a deux ans d’une nouvelle méthode, « l’apprentissage de la lecture au CP s’est amélioré dans de nombreuses écoles cette année avec, pour la première fois à Mayotte, plus de la moitié des élèves (55%) lisant plus de 10 mots par minute aux évaluations nationales d’entrée en CE1 ». Des progrès qui montrent « que la pédagogie est plus forte que la sociologie », en d’autres termes, que l’école permet de réparer les inégalités. Il est demandé de « poursuivre les efforts au CE1 et au CE2 » en travail quotidien sur la lecture et l’écriture.
Parce que l’ensemble des études sur les langues montrent « que le langage oral et écrit, la connaissance des mots, leur prononciation, leur écriture, participent à la construction et à la structuration de la pensée », il importe de combiner des temps collectifs et des temps individuels, « le co-enseignement effectif dans les classes en duo est déterminant. S’assoir à côté d’un élève pour prendre le temps de lui expliquer, de le considérer est un temps indispensable ».
On peut conclure par cette dernière consigne, « La langue maternelle est vecteur d’identité, de socialisation, la langue française est, elle, vecteur d’autonomie de l’élève comme support des savoirs fondamentaux et d’employabilité ».
A.P-L.