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Mamoudzou

Au revoir et merci Monsieur Cantal…

Vendredi dernier se tenait en la salle Erignac de la Préfecture de Mamoudzou, une conférence de presse en présence du Préfet Thierry Suquet, de son délégué chargé à la mission Eau, Gilles Cantal et de Christophe Lotigié, successeur transitoire du précité, fraîchement débarqué sur le 101ème département français.

Arrivée discrète mais non moins efficace, fin juin dernier, dans le cadre d’une lettre de mission définie pour une durée de 6 mois. Un temps à la fois court et long mais surtout densément compacté pour ce préfet réserviste, Gilles Cantal, appelé en renfort pour gérer cette crise de l’eau et appuyer l’immensité de la tâche de Thierry Suquet au regard de cet hydrique volet.

(de g. à d.) S.Salim, T.Suquet, le colonel Larabi du Rsam, S.Moudjibou (maire de Dembéni) et G.Cantal lors de la mise ne place des premières distributions des packs d’eau à destination des publics fragiles en septembre dernier (archives/®MLG)

L’Art de la médiation

Poussée par une réflexion commune antérieure, la venue de ce joker humain était une des réponses de l’État envisagée, bien en amont, alors que se dessinait cette situation de crise. Une réponse permettant à un fonctionnaire de haut niveau de venir appuyer par son expérience l’urgente mais non moins titanesque mission qui attendait les hautes autorités locales. C’est donc par sa vision globale et sa naturelle bienveillance que le préfet délégué Gilles Cantal, a su fédérer dans une relation de confiance et motiver conjointement les troupes et ce, même si d’initiaux désaccords étaient palpables. « La crise de l’Eau, c’est énormément de partenaires » introduit Thierry Suquet faisant état des protagonistes, impliqués de manière plus ou moins directe dans la gestion de cette hydrique ressource. Des protagonistes parfois historiquement englués dans un complexe relationnel sous fonds de réciproques dettes : «  Il y a donc un travail qui a été mené afin de faciliter et mettre les choses à plat pour que nous n’ayons pas, entre les uns et les autres, des chantages à la participation financière, au moment où il fallait justement s’engager financièrement. Nous avions besoin que la Smae fasse le travail sans se demander qui allait payer, tout en étant sure d’être payée; et nous avions besoin que Lema* engage la totalité des travaux, sans s’interroger en permanence sur sa capacité de trésorerie. C’est totalement invisible comme travail et pourtant cela a été l’une des premières choses réalisées » déclare à la presse le précité tout en remerciant l’intéressé : « Pour tout cela, merci Gilles ».

Gilles Cantal essayant le dispositif détection des fuites d’eau par système acoustique (archives/®MLG)

Au moyen de régulières réunions, là aussi instaurées par ce préfet de l’eau, il a donc été offert aux différents acteurs, visibilité, transparence et moyens d’appui afin d’avancer au mieux dans leurs respectifs calendriers. Et si la logistique se voulait impactée pour X ou Y raisons, là encore, Gille Cantal assurait la coordination de tout cela à échelle locale et, par la suite, en lien direct avec la cellule interministérielle de crise, créée en septembre dernier par la Première ministre, Elisabeth Borne. En somme, l’élaboration et le déploiement de tous les dispositifs parallèles que nous connaissons désormais, logistique de distribution d’eau incluse, tout ceci, c’est en grande partie le travail de l’ombre de cet énergétique retraité. « Mon plus grand honneur fut de servir la population en grande difficulté (…) Ma mission urgence initiale se portait sur comment amener de l’eau à tout le monde, comment suivre et optimiser la ressource et comment réaliser des travaux qui vont bien pour améliorer cette ressource… ».

Les prémices d’une sortie de crise se dessinent 

Même s’il est encore précoce, aux dires préfectoraux, d’envisager d’ores et déjà un retour à la normale, avec allègement des tours d’eau et retraits de la large mise à disposition encadrée d’eau potable, il semblerait tout de même qu’un certain nombre de facteurs plutôt favorables, dynamique météorologique incluse, aillent dans le sens d’un soulagement certain face à cette crise. Une crise dont l’anticipation de l’après se dessine en la personne de Christophe Lotigié, lui aussi, préfet réserviste et grand spécialiste des territoires ultramarins : « Je fais encore partie d’un monde qui disparaît petit à petit. Un monde qui relève du Service public et de l’intérêt général. Je suis retraité depuis ce mois d’août mais s’il y a une crise et qu’on m’appelle, je me dois de répondre présent dans un esprit constructif, avec beaucoup de modestie aussi (…) Ma priorité est de voir ce que je peux apporter en termes de coordination et d’assembliers. Il faut bien comprendre que nous ne sommes pas dans le même timing par rapport à la crise et mon prédécesseur; moi je suis dans la phase de stabilisation sortie de crise et suivi des grands travaux qui font que, peut-être, à la prochaine saison sèche et même celle d’après, nous ne nous trouvions pas dans cette situation rencontrée en amont. Vérifier la bonne utilisation des données publiques, c’est une constante qui se doit d’être dans la gestion de l’administration. Ma ligne de conduite c’est humilité, respect, tenir compte des réalités du terrain mais en même temps, il faut dire les choses sans condescendance lorsque cela ne va pas ».

À peine arrivé et déjà sur le pied de guerre. C.Lotigié a officiellement clôturé sa carrière en Guyane, en aout dernier, avant de rempiler pour cette mission mahoraise (®MLG)

Arrivé la semaine passée, son imprégnation directement dans le bain mahorais s’est faite par l’amorce de prises de contacts et se voudra principalement sur le terrain jusqu’à la fin février, date à laquelle il n’est non pas question d’une sortie de crise programmée mais bien la prise de fonctions d’un expert de haut niveau; poste spécialement créé dans cette volonté conscientisée et de pérennisation, face aux besoins et enjeux hydriques de notre territoire. « La réflexion initiale, menée encore une fois avec le Gouvernement, se voulait non pas de s’inscrire dans les paillettes, comme le disait un grand monsieur que j’ai eu l’honneur de servir et qui s’appelait Raymond Barre, mais bien dans une action volontaire qui s’inscrit dans la durée » souligne avec Gilles Cantal. C’est donc le 24 novembre dernier que fut parue au Journal officiel cette annonce à pourvoir faisant état d’une aspiration de prise de poste — post-transition assurée par le nouveau préfet délégué à la mission eau — pour l’amorce de cette année 2024.

Bilan de nos ressources 

Avec une capacité de production journalière officiellement et enfin revue à la hausse, l’usine de dessalement de Petite-Terre devrait offrir à terme une autonomie hydrique de 3 200 m3 d’eau pour sa zone, en plus des 1 500 m3 destinés à renforcer les besoins sur la Grande-Terre. Une Grande-Terre dont les réserves collinaires s’accroissent enfin au regard du dernier rapport Cons’eau et fort probablement de celui à venir ce lundi**, en plus des forages à la fois d’urgence et ceux comptabilisés dans la 6ème campagne, sur Coconi et Combani qui devraient offrir dans un premier temps et d’ici peu, finalisation des travaux de raccordement incluse, une ressource supplémentaire au réseau de distribution mahorais. Un réseau de 800 km, toujours inspecté à la loupe par 3 sociétés sous-traitantes — sans interruption de calendrier même pour ces fêtes de fin d’année — afin de réparer toutes les fuites existantes.

G.Cantal en pleine explication du déploiement dispositif distribution packs d’eau auprès de la Première ministre, Elisabeth Borne, en ce début de mois (archives/®MLG)

En plus de ces chantiers en cours ou à venir — entame et étude de la 7ème campagne de forages comprise — il est donc question à moyen terme de tout mettre en oeuvre, d’une part, pour que l’usine de dessalement de Jimaweni sorte de terre, d’ici la fin du premier semestre 2024, avec graduellement une production journalière qui visera au final les 10 000 m3 et, d’autre part, l’avancée concrète et massive, propre à l’autre usine de dessalement, en zone Ironi Bé, d’une capacité, 1er jet aspiré, de 10 000 m3/jour également mais qui tendra, à finale issue, à offrir les 15 000 m3 promis et officiellement annoncés, tout comme le lancement du calendrier de la procédure préalable en lien à la Déclaration d’utilité publique (DUP) et relative au foncier visé pour l’implantation de la 3ème retenue collinaire, sur le site d’Ourouvéni.

Pour cette fin d’année, ce sont déjà approximativement près de 2000 m3 jour qui ont été gagnés aux dires conjoints de Gilles Cantal qui, au regard de l’ampleur de sa mission incontestablement réussie dans ses mise en place, gestion d’urgence et durabilité part « avec ce sentiment de ne pas laisser cela sans suite » travaillant en doublon avec son homologue, depuis sa récente arrivée.

(de g. à d.) Le lieutenant-colonel Lemaire/Rsma, le préfet de l’Eau G.Cantal et le commandant Luc, chef du DTE lors de la mise en place du sytème de potabilisation d’eau de la rivière de Coconi (archives/®MLG)

C’est avec la spontanéité et la bienveillance qui le caractérisent que ce préfet de l’eau, atypique et attachant, nous confiera les larmes naissantes à l’encoignure des yeux « avoir connu beaucoup de missions mais ressortir boulversé par les visages de certaines femmes et enfants » qui l’a pu rencontrer sur le terrain. « Vous savez dans nos missions nous apprenons toujours beaucoup de choses, on s’intéresse au territoire évidemment, à son histoire pour comprendre ce qui se passe; on essaie d’identifier 2 ou 3 sujets d’importance pour lesquels il est essentiel d’aller vers les gens et si vous n’y allez pas, et bien vous ne savez pas faire. J’ai eu beaucoup de chance que ça soit les institutionnels, les maires, les personnels de mairie, les Ccas; ils ont tous étaient formidables. Toutes ces interactions d’écoute et d’empathie et ce coup de main qu’on se donne ensemble (…) tout a été très riche. On est au contact, on est dehors et ça c’est le coeur et le bonheur du métier. Mayotte fut un moment très fort pour moi ».

 

MLG

 

*Les Eaux de Mayotte (syndicat en gestion)

** modification et complément informatif Cons’Eau le 18/12/2023 à 20h00 : cliquez sur lien 

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