Rien de bien nouveau sous le soleil de ces Assises de la Croissance Verte lors de ce deuxième jour d’échanges dans l’hémicycle Younoussa Bamana. Les différents acteurs de la gestion et valorisation des déchets à Mayotte ont poursuivi la présentation de projets déjà en cours comme la fameuse déchetterie de Malamani. Les responsables du syndicat réunionnais Ileva ont également poursuivi la description de leur gestion des déchets, bien huilée sur l’île Bourbon. « Pour la gestion des encombrants, l’apport volontaire couplé à un bon maillage du territoire est la solution la plus efficace », estime Virginie Gobalou. Par ailleurs, La Réunion dispose d’un espace de réemploi social et solidaire pour valoriser le métal des encombrants. A Mayotte, où beaucoup d’habitants ne possèdent pas de voiture, compter sur l’apport volontaire se révèlerait quelque peu utopique, à ce jour en tout cas. C’est la raison pour laquelle la Cadema a mis en place un numéro de téléphone pour faire enlever ses encombrants. « Pourquoi ne pas faire appel à une solidarité communautaire ? », nous a suggéré Camille Mondon, agente de gestion des déchets aux Seychelles, comme nous soulevions le problème. « Les habitants des quartiers possédant des camions auraient là l’occasion de créer un business », a-t-elle poursuivi.
Une idée certes intéressante, mais qui aura sans doute du mal à prendre racine sur notre île où 70% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté national. Payer pour se débarrasser de ses déchets risque de ne pas d’enchanter la population. Aux Seychelles, le transport est obligatoire. Cet archipel obéît par ailleurs à un système de consignes pour les bouteilles en plastiques. Camille Mondon nous avoue toutefois que, malgré cela, l’obligation pour la population de ramener ses bouteilles en plastique était peu suivie et que c’était les personnes dans le besoin qui s’en chargeaient afin de récupérer l’argent des consignes. Le Sénégal, représenté aux Assises par Ndiaye Gueye, directeur des partenariats au sein de Sonaged, a quant à lui trouvé un autre système : transformer les anciens dépôts sauvages en points de collecte avec un agent présent sur les lieux en permanence pour aider les gens à trier. Une idée dont compte s’inspirer le Sidevam 976 via son bureau d’étude Tany. Une convention de partenariat doit d’ailleurs être signée demain entre les deux structures pour « mutualiser leurs efforts ».
290 associations ESS à Mayotte en 2017
Eirini Arvanitopoulou, la responsable Achat Socialement Responsable au sein de la Chambre Régionale de l’Economie Sociale et Solidaire, a rappelé que l’ONU avait reconnu l’ESS comme modèle à suivre pour préserver l’environnement il y a de cela un an. « L’ESS apporte des solutions innovantes pour Mayotte. Il faut cependant relativiser ce terme. Ce qui est considéré comme « banal » en métropole peut être très innovant ici », précise-t-elle en révélant qu’en 2017, 290 structures relevaient de l’économie sociale et solidaire sur le territoire. Le chiffre datant d’il y a cinq ans, elle estime qu’il y en a bien davantage à l’heure actuelle. Quelques structures relevant de ce modèle économique étaient d’ailleurs présentes aux Assises. L’ingénieur et Docteur en mécanique de chez Habit’âme a expliqué comment sa structure recyclait le plastique pour en faire des matériaux de construction. Malheureusement, pour l’instant, Habit’âme n’est technologiquement pas en mesure de recycler le PET des bouteilles d’eau, mais l’ingénieur nous a confié que l’entreprise réfléchissait à un moyen d’y parvenir en faisant venir des machines plus performantes.
L’association Kaza, quant à elle, reconditionne et revend à prix solidaire du matériel numérique. « Pour le moment nous ne sommes qu’à 15 reconditionnements par mois. C’est peu, mais nous espérons pouvoir augmenter prochainement nos capacités de production », confie son responsable. L’ESS se révèle un modèle prometteur pour la préservation de l’environnement, mais il est récent à Mayotte et la petitesse des structures actuelles ne permet pas encore de l’envisager comme solution immédiate au problème des déchets. La filière Responsabilité Elargie du Producteur, plus vulgairement appelé « principe du pollueur payeur », se met progressivement en place. Elle obligera sous peu les fabricants à prendre en charge la fin de vie de leurs produits sous peine de payer une amende.
Nora Godeau