Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) environ un tiers des jeunes âgés de 15 à 30 ans sont touchés par des troubles psychiques, 15 à 20 % d’entre eux consommeraient de l’alcool et/ou de la drogue, et beaucoup seraient frappés par la dépression avec notamment des pensées suicidaires, première cause de mortalité chez les 15-24 ans. Face à ce constat, il est plus que nécessaire d’agir en informant la population à tous les âges sur les enjeux de la santé mentale tout au long de la vie, comme l’explique le docteur Virginie Briard-Girard, cheffe de service de pédopsychiatrie au CHM : « La Semaine de la Santé Mentale est l’occasion de construire des interventions pour parler avec l’ensemble de la population. C’est un moment privilégié pour sensibiliser l’opinion publique sur ce thème. Cela permet aussi d’éviter les jugements et parfois le rejet de certains patients. Pour résumer, c’est être au clair avec la santé mentale et les troubles mentaux ! L’objectif étant avant tout d’informer les professionnels et les particuliers, de se rassembler et de parler ». Ainsi, tout au long de la matinée plusieurs tables rondes étaient organisées et animées par des professionnels. « Tous les âges de la vie vont être étudiés et abordés, du stade des 1.000 premiers jours du bébé, en passant par l’enfance et l’adolescence pour arriver au stade adulte », précise Virginie Briard-Girard.
La vie n’est pas un long fleuve tranquille…
Chaque personne au cours de sa vie est touchée par des émotions plus ou moins positives voire parfois négatives : mariage, divorce, naissance, deuil, joie colère, … rythment notre existence et génèrent des émotions, du stress, des inquiétudes qu’il est parfois difficile de surmonter seul. Cela peut conduire à une dépression, à une souffrance et peut se transformer en handicap. « Le poids familial, culturel, l’évolution dans le temps peuvent entrainer des troubles du développement, de l’apprentissage, de l’humeur, … et favoriser les addictions. Un individu souffrant de dépression peut être aidé par un professionnel, des médicaments afin que cette épreuve soit moins difficile à passer, indique la cheffe de service de pédopsychiatrie au CHM. Chacun peut connaitre une fragilité psychique face aux événements de la vie et certaines personnes sont plus fragiles que d’autres. Cela dépend, entre autres, de l’héritage biologique que l’on nous a transmis mais aussi de notre état psycho affectif tributaire de nos relations humaines, familiales et de l’environnement socio-culturel qui conditionnent, en quelque sorte, notre capacité à faire face aux durs aléas de la vie ».
En effet notre santé mentale dépend de notre capacité à faire face au stress, à s’intégrer dans une communauté et à trouver un juste équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Le docteur Briard-Girard a ainsi relevé des facteurs de risques pouvant entrainer une fragilisation psychologique de certaines personnes comme la récession économique, les guerres, les facteurs socio-économiques et géopolitiques, etc. Mais depuis quelques temps d’autres facteurs sont apparus. « Nous avons de plus en plus de cas d’éco-anxiété, à savoir des gens qui sont angoissés par la crise climatique qui est en train d’apparaitre. Il n’y en avait quasiment pas avant. Ou encore la crise de la Covid et le confinement qui ont eu des effets néfastes et alarmants pour les jeunes. J’ai eu l’occasion de rencontrer des jeunes de 8-9 ans quand j’exerçais dans l’Hexagone qui avaient des pensées suicidaires, c’est inquiétant », confie-t-elle.
Mayotte n’est malheureusement pas épargnée par ces problèmes même s’ils sont différents. « La pauvreté, la violence, les difficultés d’approvisionnement en eau, les inégalités sociales et de niveau de vie, les conflits intra familiaux sont autant de problèmes qui peuvent générer des troubles du comportement, assure la cheffe de service de pédopsychiatrie. A Mayotte la demande pour une consultation est énorme et la liste d’attente est très longue ».
Cette matinée autour de la santé mentale a ainsi eu le mérite d’informer le grand public sur cette pathologie, de proposer des moyens et des solutions mais aussi d’aborder cette thématique à tous les âges de la vie, car comme l’a rappelé la cheffe de service de pédopsychiatrie au CHM, « Nous sommes tous concernés, les risques peuvent se manifester à tous les stades de notre existence. Aussi, notre capacité à surmonter le traumatisme dépend de l’environnement psycho culturel, des interactions sociales, de l’éducation mais aussi à libérer la parole sur un sujet parfois tabou ».
B.J.