Heureusement, la pluie des mangues est abondante cette année permettant de recharger les eaux de surface, notamment la rivière de Coconi d’où sont prélevés les mètres-cubes délivrés par la Sécurité civile. Parmi les premiers bénéficiaires de ceux-ci, les écoles. Et alors que celles de Koungou sont « les moins bien loties du territoire en termes de raccordement à l’eau », nous confiait l’inspecteur de l’Éducation nationale, c’est au cœur de celle de Longoni Bassin que les ForMISC de la Sécurité civile ont distribué de l’eau ce mercredi.
Nous l’avons rapporté à plusieurs reprises, des élèves de Majikavo ou de Koungou village n’ont cours d’un seul jour par semaine, leur école n’étant raccordée ni au ‘chemin de l’eau’ (connexion sécurisée par la SMAE), ni branchées à des cuves. Une maman nous confiait que sa fille scolarisée en CP avait été en classe lundi de cette semaine, « la maitresse nous a dit ‘ramenez la jeudi’, mais l’école de Koungou Maraicher étant en rotation, et le nouveau planning coupant l’eau à midi ce jeudi, elle n’ira plus en classe jusqu’au vacances scolaires ! ». Alors qu’en CP les premiers mois sont essentiels dans l’apprentissage de la lecture.
La mairie nous avait indiqué début septembre avoir été prise de court par le constat que plusieurs écoles n’étaient pas raccordées au ‘chemin de l’eau’, « contrairement à ce que nous avaient affirmé la SMAE et la DEAL », nous rappelle encore Louhenvelle Leroux-Delalande, adjointe au maire de Koungou, Chargée des Affaires scolaires, et présente à l’école Longoni Bassin ce 11 octobre : « Plusieurs écoles restent fermées les jours de coupure d’eau. Il s’agit de Koungou Baobab, Koungou Maraîcher, et 4 écoles de Majikavo Koropa. »
Un kit pédagogique comme au temps du Covid
Nous avons tenté d’en comprendre la raison puisque l’explication d’une pénurie de cuves ne semble pas être la bonne, à entendre le préfet de l’eau Gilles Cantal « suffisamment ont été commandées jusqu’à présent », qui explique, « souvent, elles sont sur place, mais des problèmes d’ingénierie compliquent les branchements sur certaines zones, il faut que les entreprises sachent faire. » En tout cas, tous nous certifient que « à la rentrée du 30 octobre, toutes les écoles seront dotées de cuves ».
En attendant, les écoles de la circonscription de Koungou Nord qui sont obligées de fermer – Koungou Maraîchers n’en fait pas partie – bénéficient toutes d’un suivi des élèves, nous assure Thomas Poisson, Inspecteur de la circonscription : « Il n’y a plus que deux écoles de la circonscription à être privées d’eau lors des coupures, et c’est en cours. Lorsqu’elles ne peuvent pas accueillir les élèves, des devoirs leur sont donnés et le travail récupéré selon un kit pédagogique similaire à la période de confinement Covid. »
L’extension de la plage de coupures de 48 à 54h corse encore un peu plus l’affaire, rapporte Gilles Cantal : « Aujourd’hui, nous venons de distribuer de l’eau à partir de jerricans livrés par la Sécurité civile, dans une école où la capacité de stockage n’est pas suffisante en fin de période de coupure pour les 700 élèves. » 11 cuves de 1.000 litres et une de 500 l sont disposées en linéaire et mises sous clé dans cette école. Cette fois, l’eau n’a pas été mise en sachet, mais arrive en jerricans apportés par la Sécurité civile, et a été versées ce mercredi matin dans les gourdes des élèves. »
Un plus qui permet de compléter son stockage habituel, se réjouit le directeur de l’école, M’bae Nassur : « Avec les cuves, nous pouvons travailler quatre jours sur cinq contre deux jours auparavant. » L’école n’est pas en rotation mais fonctionne en rythmes scolaires ce qui lui permet une meilleure adaptabilité et un meilleur temps de scolarisation des enfants, sur une journée. La distribution d’eau ce jour aura permis aux élèves de repartir avec chacun une gourde remplie, mais n’auront pu être scolarisés faute d’eau dans les cuves pour alimenter les sanitaires.
Sécuriser la production électrique
Le durcissement des coupures va rendre particulièrement prisée l’eau produite à Coconi par la Sécurité civile. En Grande Terre tout d’abord où le volume de stockage sera insuffisant. Mais pour tirer un vrai bilan, il faudra attendre. Du côté des écoles, ce sera après les vacances scolaires, qui commencent ce 14 octobre, que la capacité des cuves sera éprouvée. Pendant les vacances pour autant, la ponction sera la même sur la ressource, un enfant ayant les mêmes besoins qu’il soit en classe ou à la maison. Ce qui pourrait changer la donne par contre d’une baisse de pression sur la ressource, ce sont les départs massifs en vacances vers La Réunion ou la métropole d’une partie des enseignants.
Du côté de la Petite Terre, on passe d’un coup au régime pain sec à compter de ce lundi 16 octobre, en adoptant pour la 1ère fois le même rythme que l’ensemble de l’île. Mais avec la présence d’installations stratégiques. Ce qui va demander une certaine vigilance, nous explique le commandant Luc des ForMISC, présent avec ses troupes à l’école Longoni Bassin : « Nous mettons en place un dispositif stratégique notamment pour la centrale électrique des Badamiers qui a des besoins importants de refroidissement. Ils ont de quoi tenir la semaine, nous devons donc reconstituer son stock. Nous menons également un travail étroit avec l’aéroport qui ne peut être privé d’eau. » Le problème des centrales électriques se posait moins en début de crise de l’eau, la centrale des Badamiers de Petite Terre étant soumise à un rythme de coupure acceptable jusqu’à présent, et celle de Longoni étant « alimentée par une rivière dont le débit est suffisant », complète le militaire.
En termes de débit de rivière, celle de Coconi donne toute satisfaction, « tout est conforme, le débit et la qualité donnant de bonnes analyses », rassure-t-il.
Censée pallier les manques d’eau ponctuels dans les écoles ou autres établissements en demande, et donc les sites stratégiques comme les centrales, la production de Coconi sera-t-elle suffisante ? « En capacité de production, on est largement bon par rapport aux missions qui nous sont données. C’est plus les bras qui vont manquer pour distribuer à tous ! »
L’Etat s’organise donc face à la pénurie, avec un gros coup de pouce du ciel, puisqu’il pleuvait ce mercredi encore à Longoni.
Anne Perzo-Lafond