« Aujourd’hui c’est un point d’aboutissement avec la démolition de ces 160 cases dans le respect des décisions de justice qui vont permettre de redonner à ce site sa vocation initiale ». Sur les hauteurs de Doujani le préfet de Mayotte, Thierry Suquet, a salué le travail, de plusieurs mois, réalisé de concert avec la mairie de Mamoudzou afin de pouvoir procéder à cette opération de destruction de l’habitat illégal et insalubre.
Faire de Doujani le premier quartier connecté du chef-lieu
Au total, ce sont 50 hectares concernés par les démolitions. Si certaines familles ont porté l’arrêté préfectoral devant le tribunal administratif, ce dernier leur donnant raison, pour les autres l’accumulation des biens personnels en contrebas parle d’eux-mêmes. Meubles délabrés, matelas, bidons s’amoncellent, petits bouts de si peu. Néanmoins, assure le délégué du gouvernement, « 120 personnes » ont pu être mises à l’abri grâce aux enquêtes sociales réalisées au cours des mois précédents ayant permis de faire des propositions d’hébergement.
De ce quartier « très informel », note le maire de Mamoudzou, constituant une Zone d’aménagement concerté (ZAC), il s’agit désormais d’y ériger « 1000 logements » ainsi que « de construire des équipements publics que ce soit des écoles mais aussi deux salles de cinéma, des gymnases ». L’objectif attaché à ce quartier doit assurer un rééquilibrage du développement urbain de Mamoudzou. Ainsi, souligne le premier édile, « dans le cadre du projet Mamoudzou 2030, le but est de faire de ce quartier le premier connecté du chef-lieu ».
Lutter contre l’insécurité humaine et sanitaire
Cette « reconquête du foncier », selon ses dires, constitue une étape indispensable pour penser le futur de la ville mais également de tout le 101e département. « Très prochainement, au mois de mars prochain, il y aura des assises de la reconquête foncière qui permettront d’agréger tous les partenaires pour réfléchir ensemble à comment récupérer ce foncier », renseigne Ambdilwahedou Soumaila. Une manière aussi, selon lui, de lutter contre le désastre environnemental et sanitaire qui se joue sur les hauteurs de la ville avec la constitution « de déchetteries sauvages ». Les averses abondantes de la mi-décembre à Kaweni ont d’ailleurs rappelé, malgré elles, la problématique de la collecte des déchets dans les quartiers informels ; les averses charriant détritus et boue liée au défrichement et à l’érosion des sols. Puis, « nous sommes dans un territoire cyclonique, à tout moment il peut y avoir des pluies, des familles peuvent être emportées par cette boue. C’est en ce sens que nous devons collectivement récupérer tout le foncier et mettre à l’abri ces gens », abonde le maire.
Des propos qui corroborent sa vision de la situation exposée lors de la conférence de presse du 19 septembre dernier, alors qu’une vague de violence secouait le chef-lieu. L’insécurité y était présentée comme protéiforme aussi bien humaine, avec des habitations informelles risquant d’être emportées par les torrents de boue, que sanitaire avec la stagnation des eaux usées et des déchets. Toutefois, le maire s’y était montré lapidaire concernant les éventuels actes de représailles au regard des opérations de lutte contre l’habitat illégal et insalubre, soulignant que la question ne se posait pas de savoir s’il y avait de la violence dans la mesure ou « décasages ou pas, il y en a ».
Renforcement du dispositif de sécurité à Mamoudzou
Périlleux cependant de faire l’impasse sur le sujet au regard de l’ampleur de l’opération de mardi et de l’inquiétude des riverains. Aussi, en tant que chef de la Division de la prévention et de la sécurité urbaine (DPSU), le capitaine Chamassi a indiqué le renforcement de la surveillance « non seulement du quartier concerné mais aussi celle de la route nationale » ainsi que « de tous les sites sensibles tels que la mairie, la préfecture, la station essence, les mairies annexes ». Certes, si le risque zéro n’existe pas, « nous faisons le maximum pour éviter qu’il y ait des soucis ». Alors que l’opération de lutte contre l’habitat illégal se poursuit demain, le dispositif de sécurité est prévu pour durer une semaine, voire plus suivant l’évolution de la situation. « La police nationale a été appelée en renfort dans ce sens-là », informe-t-il. Dans le quartier, l’idée d’évoquer la nuit semblait, malgré tout, un sujet d’inquiétude certain.
Pierre Mouysset