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Mamoudzou

Une première pierre pour 24 classes, courage, il en reste plus de 800 à construire à Mayotte !

Mamoudzou est une des meilleures élèves en matière de volonté de constructions scolaires. La croissance démographique impose de les accélérer sur l’ensemble de l’île, or, elles n’ont pas suivi le rythme. La tendance pourrait s’inverser espère le recteur Gilles Halbout, qui avance des chiffres.

A son arrivée il y a trois ans et demi, le recteur Gilles Halbout chiffrait les besoins à 800 salles de classe pour scolariser tous les enfants, mais l’inflation démographique est passée par là, et on parle désormais de « plus de 900 », comme il nous le confiait. En s’expliquant : « La démographie en croissance continue à Mayotte nécessite des classes supplémentaires pour scolariser tous les enfants. Là, nous en avons pris 3.000 en plus dans le premier degré, et pareil à la prochaine rentrée, ce qui se traduit par un besoin de plus de 100 salles à chaque fois. Et il n’y a pas eu d’inauguration de nouvelles structures ».

Il s’agit d’une compétence des maires que voudrait leur voir retirer au profit de l’Etat, le syndicat FSU SNUipp, le temps d’une remise à niveau. Gilles Halbout poursuit la ligne qu’il a toujours défendu d’un maintien de la décentralisation dans les mains des élus, mais avec un accompagnement d’ingénierie, quasiment un encadrement, qu’il a plus que contribué à mettre en place avec la plateforme d’ingénierie comprenant l’AFD et la DEAL (l’Equipement). Et les premiers effets bénéfiques commencent à se faire sentir, nous indique-t-il : « Nous avons davantage de chantiers d’extension et de rénovation, une vingtaine, dont dix commencent à sortir. Pour la prochaine rentrée, nous pourrons compter sur 50 salles de classe en plus. Naturellement, il en faudrait 150 à 200 par an. Tout dépend de la volonté du maire. C’est pourquoi cette plateforme vient en appui pour les élus qui ont des difficultés, et c’est seulement dans les cas de résistances, que l’Etat pourra prendre la main. Mais je crois plus au mouvement d’entrainement qui fera bouger les réticents. » Un dispositif que Gilles Halbout résume en trois verbes, « responsabiliser, soutenir, entrainer ».

Ambdilwahedou Soumaila : « Construire une école, c’est une des missions les plus fortes de la vie d’une municipalité »

Car lui et le préfet ont bien conscience que c’est un véritable défi à Mayotte que de consacrer autant de budget, et si l’Etat alloue les 50 millions d’euros nécessaire par an sur les constructions scolaires, « l’effort politique demandé aux élus est sans précédent dans la République, disait Thierry Suquet, quand j’étais en poste à Bordeaux, un maire construisait une école comme celle-là dans un mandat. Ici, on vous en demande plusieurs ! »

Gilets jaunes, le retour par les parents

Une remarque qui aura réjouit le maire Ambdilwahedou Soumaila, pour qui, « construire une école, c’est une des missions les plus fortes de la vie d’une municipalité ». Pas seulement en raison des délais à rallonge de ce projet, au foncier pourtant sécurisé, comme l’expliquait la représentante du cabinet Idéphi (ex-Deltha), « cela a été long car lors de la passation du marché, il a fallu passer certaines offres en renégociation avant attribution ». Ce qui valait à l’ancien maire Majani, initiateur du projet, d’être présent lors de la pose de la première pierre.

Pour l’actuel maire Ambdil, le défi tient aussi dans l’enjeu : « Comme le disait Victor Hugo, ouvrir une école, c’est fermer une prison, et je ne dis pas ça parce que nous sommes à proximité de Majikavo ! Il s’agit de contribuer à construire les citoyens de demain, en érigeant des locaux qui doivent rester un véritable sanctuaire. Pour cela, nous avons travaillé étroitement avec les parents, expérimentant notamment leur présence rassurante aux abords des écoles. » Des parents identifiés par des gilets jaunes dont il faut saluer le grand retour dans le cadre d’un projet mené par les services de la ville.

Un des parents encadrant devant l’école Mhogoni à Passamainty

La sanctuarisation, un terrain sur lequel le rejoignait immédiatement le recteur, pour lequel la citation de l’ancien ministre de l’Education nationale Jean Zay (1936) colle particulièrement à Mayotte, « Les écoles doivent rester l’asile inviolable où les querelles des hommes ne pénètrent pas. » Et pour y arriver, Gilles Halbout répétait à la manière d’une anaphore, « L’école, faisons là ensemble », en impliquant également les parents, « l’école doit s’ouvrir aux parents et aux associations. » Ils sont attendus en filigrane sur de nombreux défis.

Prés de 500 millions pour les écoles sur 10 ans

Si le recteur conçoit que « l’éducation a beaucoup de retard à rattraper en matière de niveau des élèves étant donné que nous sortons d’un système où beaucoup n’avaient pas accès aux études », il ambitionne que « la massification tire tout le monde vers le haut. Beaucoup s’orientent désormais vers de grandes écoles, il faut amplifier cela. » C’est pourquoi cela commence par la levée des freins de l’apprentissage du français, et le parler à la maison y contribue, « pour beaucoup de mahorais, le français n’est pas la première langue ». D’où la méthode Dire, Lire et Ecrire dans laquelle a investi le rectorat, « pour que l’école soit un facteur d’égalité des chances ».

L’architecte Violaine Liétar, AROM, devant une coupe et la projection de ce que deviendra le groupe scolaire des Hauts Vallons

Gilles Halbout se réjouissait doublement de la pose de la première pierre de l’école T24 sur ses 4.300m2 à Kawéni, « les pierres, je préfère qu’on les pose plutôt qu’on les jette ! », ironisait-il.

Une école érigée au cœur de la ZAC du soleil levant, sur laquelle ont poussé de très nombreux immeubles aux habitants chanceux d’avoir une école à leur pied, « qui sera rebaptisé ‘Groupe scolaire des Hauts-Vallons’, doté d’une cantine », indiquait le maire. Un investissement de 13 millions d’euros, financés à 88 % par l’Etat et 12 % par la ville de Mamoudzou, pour sortir 24 classes, dont 9 en maternelle et 15 en élémentaire.

A l’image de Koungou qui a annoncé 42 millions d’euros pour ses écoles en 10 ans, le maire Ambdilwahedou nous faisait part de ses projections, en adéquation avec le schéma territorial, nous assure-t-il : « Nous bouclons le Schéma directeur des constructions et rénovations des écoles sur 10 ans d’un montant de 500 millions d’euros environ, avec une partie du foncier sécurisé, puisque pour certaines, il va falloir déconstruire pour refaire en plus grand et selon les normes. » Celles qui ont été construites dans les années 90 n’ayant pas été rétrocédées aux communes faute de validation par la commission de sécurité. Enfin, la commune va innover en matière de construction dans le primaire, « en imitant le rectorat sur l’emploi de modulaires tant que nous serons dans l’urgence. Nous avons une subvention de 7 millions d’euros pour cela. » Il donnait rendez-vous au 1er semestre 2024 pour l’inauguration du groupe scolaire.

Anne Perzo-Lafond

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