Voilà désormais des années que l’idée d’une ligne maritime dédiée au transport de marchandises entre Longoni et Dzaoudzi est en suspens. Cette solution aux allures d’évidences serait-elle en passe d’être réalisée ? Il semblerait que les choses accélèrent selon le 3ème V-P Ali Omar (chargé de l’administration, des transports et de l’environnement), lequel porte le projet depuis son élection et tient d’ailleurs à le faire savoir. « Le mot d’ordre, c’est le désengorgement » nous assène-t-il d’emblée dans les couloirs du Conseil départemental, en aval d’une réunion où la presse, pourtant conviée, n’aura eu que le maigre loisir de contempler les bureaux de la capitainerie du dehors.
23 000 traversées de camions quotidiennes
A la genèse du projet, « j’ai constaté qu’il y avait beaucoup de passages de camions et que ceux-ci venaient essentiellement du Nord, soit de la zone de Longoni soit de la zone Nel, et essentiellement pour desservir la petite terre. Nous avons un peu de statistiques : 23 000 traversées de camions par an ». Soit plus qu’il n’en faut pour engorger tout le Nord d’une île qui rêve de développement et de piste longue, empêchant le transport des nombreuses premières pierres des structures prochainement appelées à naître…
Des travaux retardés, malgré l’anticipation avancée par le VP, en raison de la révision technique des deux barges, le Karihani et le Polé. Pourtant, les ennuis sont loin de s’arrêter là : « Maintenant les deux barges sont revenues, mais nous testons d’abord parce qu’il y a un problème de nouveaux moteurs sur les deux barges que nous ciblons, notamment le Safari et le Maorimawa, qui sont visées pour cette traversée de Longoni ». En d’autres termes, selon Ali Omar, les deux anciens moteurs du Polé et du Karihani iront désormais remplacer ceux plus vétustes des deux barges choisies pour cette ligne. Il s’agira néanmoins d’adapter la motorisation des véhicules : « ils doivent les paramétrer, c’est pour ça que le projet est décalé ».
L’heure est donc au recyclage des anciennes barges, une idée constructive, qui aura au moins le mérite de n’avoir pas à les brader à des sociétés malgaches, à l’instar des Salama Djema il y a quelques années.
Néanmoins, d’ici la motorisation des deux barges historiques en vue de l’ouverture de la ligne, Ali Omar explique qu’il a « tenu à ce qu’on fasse une simulation et qu’on étudie la possibilité technique de le faire, c’est le pourquoi de la réunion technique avec le port sur la faisabilité de la ligne ».
Avec leurs moteurs originels, il est estimé que le Safari et le Maorimawa feront la traversée en une heure. A terme, une fois remotorisés, le temps estimé avoisine les 45 minutes.
Quid de la capacité totale de poids ? Pas de réponse annoncée, mais environ 16 véhicules, « en fonction de la taille, je ne peux pas vous dire concrètement, c’est une donnée technique ». N’est pas technicien qui veut…
Quant aux quais d’embarquement, si l’un semble avoir été identifié au port, l’inexactitude est de mise pour le moment : « il faut traverser le port. Le quai qu’on cible est à l’intérieur du port, il est beaucoup plus sécurisé » déclare d’abord l’élu, avant d’évoquer « la jetée à l’extérieur ». Quant au quai de Dzaoudzi, il restera le même qu’à l’accoutumée, en attendant l’ouverture d’une jetée vers Badamiers dans le cadre du projet ZAC Petite-Terre selon l’élu.
Une ouverture à l’horizon janvier 2023
« Normalement de manière pérenne on a prévu en janvier », explique le 3ème VP quant à l’ouverture de la ligne. « D’après les services on pourra être opérationnels avec deux barges qui feront des rotations toute la journée ». Néanmoins, l’élu ignore encore leur nombre : « ce seront les mêmes rotations que ce qu’on fait ici, les fréquences seront je pense toutes les heures ».
Interrogé sur le risque que les deux barges mobilisées sur cette nouvelle ligne dédiée au transport de marchandises manque au réseau actuel, Ali Omar assure que non de sa convaincante nonchalance : et ce « puisque actuellement, deux barges sont en construction, Chatouilleuse et Imane (ndlr 6 millions d’euros chacune) (…) L’une sera livrée en février 2023, et l’autre en juillet 2023. L’arrivée de ces deux barges nous permettra de dégager totalement ces barges pour desservir le quais Longoni ».
La main d’œuvre en question
Qui dit nouvelle ligne dit nouveaux besoins en effectifs. Or le sujet des formations maritimes étant déjà suffisamment complexe sur le territoire, la question se posera rapidement. « Là vous anticipez » nous répond le Vice-Président. Néanmoins, pas tant que ça. « Nous avons déjà lancé un dispositif de contrat d’apprentissage, nous allons recruter des jeunes (…), il y a une convention qui va être passée avec Pole Emploi, le conseil départemental et le centre de formation Maritime avec l ’AFPA de la Côte d’Azur, nous allons en plus envoyer des jeunes là-bas pour étudier en fonction des besoins qu’on aura ». Ali Omar reprend : « Nous devons former des jeunes sur le contrat d’apprentissage, après il y a d’autres métiers, tout ce qui est entretien, peinture, sécurité, matelots, c’est d’autres métiers… Ici avec le centre de formation maritime nous travaillons avec eux, notamment sur les formations moyenne durée de six mois pour pouvoir les faire sur place ». Suffisamment d’effectifs d’ici janvier, donc ? A cela, l’élu répond que « Oui, on pourra au moins répondre aux premiers besoins de la Chatouilleuse ». L’idée d’envoyer des jeunes Au CNOI (Chantier Naval de l’Océan Indien) est également évoquée, présentée comme l’un des objets de la récente visite sur le territoire d’Ali Omar.
En somme beaucoup de zones de flou encore à cette heure, à l’aube du premier voyage inaugural de cette ligne dont on imagine aisément les nombreuses retombées positives.
Mathieu Janvier