Une semaine après le relèvement des prix des produits pétroliers (pétrole lampant, gasoil, essence et kérosène), les citoyens assistent, impuissants, à une hausse systématique des tarifs dans le transport en commun. Une manifestation contre la cherté de la vie n’a finalement pas eu lieu, samedi 4 juin, Place de l’indépendance. Des organisations de la société civile avaient demandé au gouvernement de revoir sa copie et, dans les pires des cas, à prendre des mesures d’accompagnement. Il est difficile de mesurer l’impact de cette hausse sur le pouvoir d’achat des Comoriens en l’absence d’un salaire minimum pouvant nous servir d’analyse.
La hausse (en vigueur depuis le 31 mai) des prix des produits pétroliers complique encore davantage les citoyens comoriens qui endurent déjà une inflation terrible depuis plusieurs mois. Le prix du gasoil a été relevé jusqu’à 44%. Un litre d’essence passe de 450 francs (0,91 euro) à 650 francs (1,32 euro). Le litre d’essence à 650 francs est désormais vendu à 750 francs (1,52 euro). Le pétrole lampant a connu une hausse de plus de 45%, passant de 250 francs (0,51 euro) à 350 francs (0,71 euro). Le kérosène (Jet A1) passe de 400 francs le litre (0,81 euro) à 520 francs (1,06 euro).
Les autorités justifient la hausse par la conjoncture internationale
Conséquence : la hausse des tarifs dans le transport en commun. Tous les secteurs d’activités ont également été touchés par cette mesure, la première de la nouvelle équipe gouvernementale. Des commerçants véreux ont profité du chaos régnant pour réajuster les prix au grand dam de la population. Les autorités ont justifié cette décision par la conjoncture mondiale marquée par une hausse du prix de baril qui passe de 65 dollars en septembre 2021 à près de 105 dollars en 2022.
« Le gouvernement n’avait pas le choix. Nous subissons la pression du marché international. Le pays a, jusqu’ici, supporté les coûts liés à la hausse depuis l’année dernière. La société des hydrocarbures vendait à perte depuis juin 2021. Nous sommes arrivés à un stade où il fallait prendre une décision », a expliqué le tout jeune ministre de l’Economie, Ahmed Ali Bazi, ancien président de l’Union des chambres de commerce des Comores.
De nombreux citoyens se sont élevés contre la hausse des prix. Des organisations de la société civile avaient demandé au gouvernement de revoir sa copie et, dans les pires des cas, de prendre des mesures d’accompagnement pouvant minimiser l’impact chez la population. La Fédération comorienne des consommateurs (FCC) a pris les devants pour dénoncer « une mesure unilatérale prise sans la moindre concertation », précisant que la hausse des prix des produits pétroliers aura comme conséquence d’aggraver la vie des citoyens et paupériser encore davantage les plus démunis.
Des citoyens n’ont pas pu exprimer leur ras-le-bol
Une manifestation contre la cherté de la vie n’a finalement pas eu lieu, samedi 4 juin, à la Place de l’indépendance à Moroni, officiellement car elle n’avait pas été déclarée. Moins de cinquante personnes avaient répondu à l’appel des organisations de la société civile. Mais le rassemblement n’a pas pu se tenir en raison de la forte présence des forces de l’ordre. Ces dernières avaient reçu l’ordre d’empêcher toute manifestation sur la voie publique. Une journaliste a vu son matériel de travail endommagé par un agent des forces de l’ordre qui avait interdit les gens de la presse de filmer.
Le ministère de l’Intérieur déplorait la démarche des organisateurs, précisant que « tout projet de manifestation sur la voie publique doit faire l’objet d’une demande d’autorisation auprès de la préfecture de la localité concernée”. Les autorités en charge de la sécurité publique avaient fait savoir, toujours dans ce même communiqué, que “nos services constatent qu’aucune demande n’a été faite à ce jour pour une manifestation à Moroni”.
Malgré le tollé général, il n’y a pas eu, à ce jour, des contre-propositions de cette mesure. Les rares analyses qui parlent du sujet accablent « une gestion chaotique » de l’unique entreprise qui a le monopole d’importation des produits pétroliers depuis 40 ans. « La hausse des prix n’est-elle pas la conséquence des choix hasardeux de la société ? », s’est interrogé le journal Al-watwan au lendemain de l’entrée en vigueur de la mesure.
Le gouvernement n’a toujours pas pris des mesures d’accompagnement comme le demandent les organisations de la société civile et les syndicats des travailleurs. Il est difficile de mesurer l’impact de cette hausse sur le pouvoir d’achat des Comoriens en l’absence d’un salaire minimum pouvant nous servir d’analyse.
A.S.Kemba, Moroni