Il y a quelques années, des évènements de partage et d’échange entre musulmans et chrétiens étaient régulièrement organisés à Mayotte, notamment par Apprentis d’Auteuil, fondation catholique qui accueille, éduque et forme en France plus de 14.000 jeunes en difficulté.
Son nouveau directeur local, Guillaume Jeu, a décidé de relancer ces rencontres, source de compréhension mutuelle, ne serait-ce que sur la simple curiosité du culte, et plus si affinités. Et quoi de mieux qu’une fête telle que la naissance du prophète, Maoulida (Mawlid) qui sera célébrée ce mardi, pour se retrouver. Mercredi soir, ce fut donc une prière commune, célébrée par les musulmans de la mosquée voisine du centre de formation d’Apprentis d’Auteuil, dans la cour de l’église, à laquelle se sont joints des fidèles de la paroisse Notre-Dame de Fatima. « Nous souhaitons nous retrouver entre communautés pour de courts moments de partage, qui pourraient déboucher sur des projets plus développés au cours de l’année scolaire », rapportait Guillaume Jeu. Car participaient aussi à la prière, les jeunes internes du lycée LEA d’Apprentis d’Auteuil. Ponctuée de Hallelujah et de Amin, chacun pouvait y retrouver un peu de ses petits.
« C’est une expérience d’altérité, s’ouvrir à l’autre permet de se comprendre et de mener un dialogue inter-religieux », insiste le directeur d’Apprentis d’Auteuil. C’est ainsi qu’une délégation de 6 jeunes, et de 4 encadrants, deux musulmans et deux catholiques, vont se rendre à Lourdes, au moment du pèlerinage des 3.000 membres d’Apprentis d’Auteuil. Lourdes est le point de convergence des catholiques du monde entier, depuis les apparitions de la vierge Marie à Bernadette Soubirou. « Marie, Maryam pour les musulmans, qui a donné naissance à Jésus, est citée à de nombreuses reprises dans le Coran », rappelle Guillaume Jeu.
La déclaration du pape et d’un Grand Imam
Pour l’imam d’Apprentis d’Auteuil, Mmadi Youssouf, célébrer cette fête « qui fait revivre le prophète Mahomet, comme s’il était parmi nous » avec les catholiques, « c’est la preuve que le vivre ensemble c’est notre quotidien, surtout à Mayotte. »
Sur la même longueur d’onde, le père Bienvenu Kasongo, curé de la paroisse Notre-Dame de Fatima : « Nous sommes dans l’acceptation de l’autre à travers nos religions. Quand on les vit pleinement, elles ne peuvent nous séparer, seulement nous unir. Nous avons en commun l’amour du prochain. »
C’est par la lecture d’un extrait d’une déclaration conjointe du pape François et du Grand Imam d’Al-Azhar Ahmad Al-Tayeb, en février 2019, que Guillaume Jeu concluait le temps d’échanges. Par ce texte, les deux religieux condamnaient le terrorisme et la violence : « Dieu ne veut pas que son nom soit utilisé pour terroriser les gens », et invitaient les dirigeants du monde entier à « s’engager sérieusement à répandre la culture de la tolérance, de la cohabitation et de la paix ».
Les fidèles se quittaient après avoir partagés la dégustation d’un excellent pilao.
Anne Perzo-Lafond