Pendant plus d’une heure et demie, les chaises sont restées désertes au siège du SMEAM à Kawéni. Les vœux du président du Syndicat Mixte de l’Eau et de l’Assainissement, SMEAM, ex-SIEAM, ont débuté à 17h quand les invitations étaient lancées pour 15h30. C’est peu de dire que les représentants de la DEAL et de l’AFD ont du partir, « on a du travail ». On a noté l’absence de la préfecture, dont le secrétaire général avait toutefois passé la journée à travailler avec les équipes de la maison sur les investissements à mener.
Pas de bilan exhaustif des 6 ans passés à présider la structure, pour Moussa Mouhamadi Bavi, le déficit est là, signe d’une gestion laxiste pointée par la Chambre régionale des Comptes. « La situation financière est très très difficile », pointait-il d’ailleurs en préambule de son discours. Les élections municipales de mars signent des vœux en forme d’adieux pour Bavi.
Un des événements de cette fin de mandature, c’est la bascule du SIEAM en SMEAM, le « i » d’intercommunal laissant la place au « M » de mixte, avec l’entrée dans la danse de la communauté d’agglomération CADEMA, Mamoudzou et Dembéni ayant délibéré pour lui transférer la compétence, la loi NOTRe les y incite.
Autre changement, c’est Ibrahim Aboubacar, l’ancien député, qui assure désormais les fonction de Directeur Général des Services, par interim certes, mais son arrivée en tant que chef de mission préfigurait cette évolution, Michel Jousset a donc cédé la place.
Financements à 100% de la préfecture
Ces 6 ans ont été marqués par des tensions. Celle de la renégociation, sans-arrêt avortée par le passé, avec Vinci, du contrat d’affermage sur l’eau potable, et l’externalisation de la régie d’Assainissement, déficitaire, vers Vinci toujours, « non encore achevée », à laquelle se sont vigoureusement opposés les agents. « Cela a suscité de l’incompréhension, mais nous n’avions pas le choix. » L’assainissement est en effet toujours quasi inexistant sur l’île, et le service fortement déficitaire.
Les grandes décisions politiques qui doivent permettre de mener à bien les deux chantiers, restent la sécurisation de l’approvisionnement en eau et la généralisation de l’assainissement.
Le premier fait l’objet de toutes les attentions désormais, « le cauchemar de la pénurie n’est pas derrière nous », met en garde Bavi qui reconnaît qu’elle a été évitée de justesse « grâce au Comité de suivi de la ressource en eau mené notamment par le préfet ». En réalité, les décisions sont allées bien au-delà, en décidant de revoir les investissements indispensables, comme nous le précise Ibrahim Aboubacar : « En décembre, nous avons signé avec la préfecture un Plan Pluriannuel d’Investissement révisé. Pendant trois mois, nous avons repris projet par projet en fonction de leur utilité. La mobilisation des crédits sera mieux suivie par la préfecture notamment, qui financera à 100%, à la condition que les travaux soient effectivement réalisés. » Le plan définitif de redressement financier sera acté début décembre.
Une 2ème usine de dessalement
Les travaux lancés pour accroitre la production d’eau potable sont notamment, la rehausse en cours de la retenue collinaire de Combani, le détournement de la rivière Mapoera vers la retenue de Dzoumogné, qui reçoit aussi les eaux brut de la rivière de Bouyouni, le lancement de la 6ème campagne de 6 forages supplémentaires, l’interconnexion entre la retenue de Dzoumogné et l’unité de production de l’Ourovéni.
En matière d’assainissement, celui de la commune de Bandrélé serait bouclé, et les réseaux du Centre, Sada, Chiconi, Ouangani, et de Mamoudzou sud, seraient en cours d’achèvement, rapporte toujours Bavi.
Et on reparle de celle qui est perçue dans les discours comme un objectif inatteignable, la 3ème retenue collinaire. Le foncier reste bloquant, et la Déclaration d’Utilité Publique visant à exproprier, date d’il y a trois ans. « Elle est réactivée, nous rapporte Ibrahim Aboubacar, le dossier est repris avec un nouveau partenaire, l’Etablissement Public foncier. » L’investissement se monte à 30 millions d’euros.
L’extension de l’usine de dessalement de Petite Terre est toujours à l’arrêt, en raison d’erreurs de conception. Vinci s’est engagé en comité de suivi, à la livrer en juin 2020. Et une deuxième usine est à l’étude, « le site est identifié », avec deux schémas possible, un fonctionnement à l’énergie électrique, or, ces usines sont énergivores, pour donc se tourner éventuellement vers le solaire.
Beaucoup de choses ont été remises sur les rails donc, ou plutôt sur le bon cap, pour reprendre la métaphore de Bavi : « Nous traversons une tempête mais en équipage responsable nous remettons le navire, certes avec des avaries, mais il n’y a pas eu de noyade. » Il n’y a pas eu noyade du syndicat, mais il l’a frôlé, et plusieurs membres d’équipage ont quitté le navire en route. « Je laisse la place à de nouveaux marins, pour de prochaines expéditions », concluait-il.
Anne Perzo-Lafond