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Grève chez Baltus Transports : le social se greffe aux violences sur les bus

Depuis jeudi dernier, une partie des bus de Carla Transport Baltus restent au parking. Une réaction aux agressions qu’ont subi deux chauffeurs la semaine dernière, mais pas seulement. Le ramassage est effectué pour l’instant, indique Matis. Carla Baltus s'exprime sur les revendications.

Le « débrayage illimité » qui a suivi les violences sur deux bus fut l’élément déclencheur de toute une série de revendications portées par les syndicats CGT Ma et CFE CGC.

« Au volant de mon bus de 22 places, je roulais en direction du nord, depuis Kawéni, avec du personnel ETPC qui loue cette prestation à Carla Baltus. Je suivais un bus Matis. En arrivant à Longoni, là où ils vendent du poisson, un jeune a jeté un vélo sur la route, le chauffeur de Matis a pilé, et j’ai braqué du côté du fossé. Un des jeunes a donné un coup de machette à l’arrière droit du bus. J’ai recommencé à rouler, mais je tremblais tellement, que je me suis arrêtée plus loin », nous raconte la conductrice, présente ce lundi sur le piquet de grève.

Au dépôt, l’entrée est barrée de banderoles, « Salaire misérable-prime de risque 200€», ou « non respect du code du travail-Travail dissimulé en bande organisé », dirigée contre Carla Baltus, à la tête de l’entreprise éponyme, et aussi présidente du Medef Mayotte. Derrière, les délégués CGT Ma et CFE CGC tiennent le piquet de grève. « Nous sommes passés d’un débrayage illimité à une grève illimitée », expliquent-il. « Deux jours après cette agression, un bus recevait des cailloux à Majicavo Dubaï. Un élève en a reçu un au visage. » L’évolution du mouvement a été signifié à Carla Baltus par mail, indiquent-ils, cette dernière n’étant pas sur le territoire.

La prime de risque de 200 euros figure en haut du tableau de revendications, ainsi que la réintégration de trois salariés « ils ont subi un licenciement abusif », critique Madi Hamourani, Chauffeur et délégué CFE CGC. Un bus qui avait des problèmes de frein a été programmé en sortie d’atelier alors que la réparation n’avait pas été faite, « mais au lieu de punir le chef d’atelier, le chauffeur, le mécanicien et l’aide-mécanicien ont été licenciés. » Un évènement qui s’est déroulé en janvier dernier.

La CGT dénonce la modulation de salaire

La vitre d’un des bus caillassé ©gendarmerie

Figure aussi une augmentation de salaire de 20%. Un montant qui n’a rien d’extravagant, juge Issihaka Abdou, suppléant du Délégué CGT Ma, et assistant exploitation dans l’entreprise, « nous sommes payés en modulation, certains ne touchent que 500 euros. Un accord que la CGT n’avait pas signé, et dont nous demandons la fin. »

Outre la demande de passage d’un psychologue dans l’entreprise, pour des « harcèlements », est noté, comme un rappel de l’accusation de « travail au noir » sur les affiches, que « chaque conducteur doit conduire le véhicule appartenant à sa société. » « Parce que si hier tous les bus étaient là, ce lundi matin, on constate que certains n’y sont plus, et que des conducteurs ont été sollicités ça et là. »

En raison de l’absence de la PDG, « elle revient le 25 mars », c’est le Bureau Prévention et Partenariat de la police national qui assure la médiation, nous expliquent-ils, « Thierry Lizola nous a appelés pour entamer des négociations individuelles, mais nous voulons des négociations ensemble, les deux syndicats, à la Dieccte ». Il agit ainsi en tant que médiateur professionnel, nous indique-t-il, « indépendant des personnes qui le saisissent et des enjeux. »

Les délégués syndicaux avancent 75% de grévistes. Nous avons contacté le gestionnaire du marché des transports scolaires, Matis, pour connaître l’état de perturbation du trafic. Son directeur Didier Fontaine, explique arriver à boucher les trous : « Pour l’instant, la majorité des élèves est transportée avec les moyens dont nous disposons en bus et en chauffeurs, en travaillant avec les autres sous-traitants. Nous assurons les rotations pour remplir l’obligation de continuité de service public qui nous incombe. »

« Ça rassure »

Les banderoles à l’entrée du dépôt de Kawéni

Sur le sujet des caillassages, il appelle à « continuer à maintenir une présence des forces de l’ordre sur le réseau, avec des patrouilles de police ou de gendarmerie, selon les zones. Ça rassure chauffeurs et élèves. »
De son côté la gendarmerie a indiqué que « la célérité des investigations menées pendant la journée du lendemain et leur parfaite connaissance de la population ont permis aux enquêteurs d’identifier et d’interpeller trois des auteurs en moins d’une journée, immédiatement placés en garde à vue. D’autres interpellations pourraient intervenir dans les jours à venir. » Et explique poursuivre « le déploiement des nombreux dispositifs de sécurisation des transports mis en œuvre, pour sécuriser au mieux leurs passagers et interpeller les irresponsables qui se rendent coupables de tels faits. »
Sur la ligne qu’elle exploite, la société Matis a connu un incident la semaine dernière, « un de nos bus a été gazé de l’intérieur. Un élève a déclenché une bonbonne de gaz lacrymogène, mais heureusement, le véhicule était sous vidéo-protection. Nous avons remis les images ce lundi matin à la gendarmerie, après avoir déposé plainte. Une enquête est en cours. Des élèves ont également fait remonter leurs témoignages. »

« Des fautes graves »

Carla Baltus (Image d’archives)

Bien que partie pour des raisons familiales en Guyane, d’où elle est originaire, nous avons pu joindre Carla Baltus. Elle conteste tout d‘abord le taux de 75% de grévistes, « la moitié du personnel a pu travailler, mais le dépôt est maintenant bloqué, empêchant toute reprise ! »

En ce qui concerne les violences qui ont initié le mouvement, elle rappelle que ce n’est pas le premier incident, « la société met toujours tout en œuvre dans la limite de ses capacités pour assurer la sécurité de ses salariés. Et nous réagissons systématiquement des qu’il y a une agression ou un incident. »

Quant aux trois licenciements, ils n’ont rien d’abusifs selon Carla Baltus, qui donne sa version des faits : « Le chef d’atelier était absent quand les deux mécaniciens ont affirmé avoir réparé les freins. Or, c’était faux ! Le chauffeur aurait pu provoquer un accident mortel, pour lui et ses passagers. Heureusement, il n’y a eu que des dégâts matériels, mais nous avons du changer le pont du véhicule. Ce sont des fautes graves. »

Et sur l’ensemble des revendications, si elle précise que « aucun des salaires n’est en dessous de 1.000 euros net », elle se dit ouverte à la négociation, « dès ce samedi autour des points de revendications mais pas sous la contrainte. Il faut reprendre l’activité sous peine de perdre des emplois, la grève doit s’arrêter dès ce lundi », explique-t-elle.

Anne Perzo-Lafond

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