Ce mardi matin, il y avait des girafes, des tigres, un ours et deux autruches réunis dans la salle numéro 8 du CUFR.
Alors non, le centre universitaire de Mayotte ne s’est pas transformé en ménagerie, en zoo ou en cirque. Ces animaux sont des symboles utilisés dans le cadre d’un atelier de l’association Mouvement pour une alternative Non violente (MAN). « On demande aux participants de s’associer à un animal et d’expliquer pourquoi », résume Christine Raharijaona, docteur en philosophie, vice-présidente du MAN et formatrice en communication non violence (CNV).
Le choix de ces animaux n’est pas un hasard. « La girafe est un symbole important en CNV, c’est le symbole de la bienveillance, celui qui prend de la hauteur. La girafe, c’est l’apprenti non-violent. »
Son opposé dans le vocable de la CNV, c’est le chacal « qui, lui, ne sait pas communiquer sans agressivité. Il grogne, et quand on grogne, on n’entend pas l’autre. On peut le remplacer par le crocodile, qui avec ses petites oreilles ne sait pas écouter. »
Car la violence, rappelle la formatrice, n’est pas que physique « elle peut être verbale, ou institutionnelle. Quand il n’y a pas assez de salles de classe, ou d’emplois, c’est de la violence. »
Devant un petit comité d’étudiants du CUFR, la philosophe a relaté l’origine de ce mouvement auquel elle se dédie. « La non violence vient du mot sanscrit Ahmisa, qui veut dire « ne pas nuire », que ce soit à la nature, un animal ou autrui. Ça vient de Gandhi ».
Un bref cours d’histoire s’en est suivi, rappelant la marche du sel de Gandhi, le mouvement des droits civiques de Martin Luther King, des personnages qui ont montré à l’Histoire que « la non-violence est une force, non une faiblesse. La désobéissance civile, c’est aussi une force de frappe. On promeut le fait de négocier avec ses adversaires en les respectant. On se doit de se respecter pour que la société fonctionne ».
Une goutte à la fois
Un échange que l’organisatrice a jugé « très intéressant » s’en est suivi avec les jeunes présents, chacun partageant ses connaissances historiques, culturelles ou cultuelles pour évoquer la communication, le respect. Interrogée sur ce que l’association pense pouvoir faire pour Mayotte, Christine Raharijaona estime qu’il n’y a « pas de petite action, nous devons tous contribuer à changer le monde dans lequel on est ».
Un bénévole de l’association a rebondi en illustrant ce propos par la métaphore de cet oiseau qui, face à un feu de foret, fait des allers-retours avec la rivière, jetant une goutte à la fois sur le feu qui fait rage. Face à l’hilarité des autres animaux qui moquent ce combat bien vain, l’oiseau leur répond « au moins je fais ma part ».
S’exprimer clairement, accueillir les propos de l’autre avec honnêteté, canaliser et transformer l’agressivité et la colère et apprendre à dire non sans agressivité sont autant de préceptes de la CNV que la formatrice invite à travailler. « Tout le monde et à tout âge peut pratiquer la non violence. Travailler sur soi n’est pas inné ni facile, c’est un travail de longue haleine. »
Présente depuis à peine deux ans à Mayotte, l’association rencontre un succès grandissant. Si les collectivités locales n’ont pas encore donné suite aux propositions d’intervention des bénévoles, ceux-ci travaillent déjà avec le centre pénitentiaire où le discours de non-violence fait mouche. « Ils sont très étonnés car ils ne connaissent pas. Mais la plupart adhèrent et demandent qu’on les prenne en charge de manière plus régulière. Il y a une demande qui est très forte. On fait avec les moyens qu’on a, mais on ne peut pas tout satisfaire, c’est frustrant. »
Contacts :
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Mail : man.oceanindien@nonviolence.fr
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Y.D.