Ils auront eu le chiffre du seuil de pauvreté au dessous duquel vit 84% de la population, auront entendu les spécialistes évoquer les problèmes de parentalité, ainsi que la place de la religion musulmane et le rôle des cadis. Tout un chapitre aura été consacré à l’insécurité, et aux messages de prudence.
Le préfet Frédéric Veau déclinait ainsi brièvement les premières avancées du Plan Sécurité, et se posait en conseiller touristique : « Pratiquez les randonnées en groupe, ne portez pas d’objets de valeur, d’originaux de titres officiels et en cas de mauvaise rencontre, ne résistez-pas. »
Stéphane Planchand, Directeur de cabinet du Vice-rectorat, dressait un tableau que la vice-recteur a voulu « sans déni, sans psychose », « il ne s’agit pas de faire dans la complaisance, mais il ne faut pas non plus tomber dans une psychose qui ne ferait qu’exacerber les sentiments qui peuvent déjà l’être par le fait de l’insularité. »
« Effet Bataclan »
Cette année encore, le vice-rectorat a fait une remontée systématique, « tous les soirs », au ministère de l’Education nationale, « Nous avons enregistré 272 incidents, en hausse significative sur la précédente année scolaire ».
En adéquation avec les chiffres donnés par le procureur, d’une multiplication par 2 des atteintes aux personnes, et par 1,5 aux biens. « Il y a aussi un effet thermomètre puisque nous avons demandé aux chefs d’établissement de relayer systématiquement les faits. »
Selon Stéphane Planchand, il y a un « effet Bataclan » dans les atteintes aux biens, « des jeunes tenaient des propos se revendiquant d’idées terroristes. » Quant aux atteintes aux personnes, ce sont des violences physiques ou sexuelles, « dont le nombre est talonné par celui des atteintes à la sécurité des établissements, par blocage ou intrusions. Nous en avons contenu la montée en puissance par une meilleure protection des établissements. »
Sanctionnés pour abandons de poste
75% des incidents sont ainsi cantonnés aux abords des établissements, « liés aux fréquents règlements de compte entre bandes. Vous serez aussi confrontés aux barrages ou aux blocages de route. »
Il invitait les enseignants à être à l’écoute des abus sexuels, mais aussi à ne pas en être les auteurs, citant un tract qui dénonçait ces pratiques.
En terme de devoirs, la vice-recteur lui emboitait le pas en rappelant qu’un certificat médical n’autorisait pas la sortie du territoire. Elle nous confiera que certains enseignants ont été sanctionnés pour abandon de poste cet été, « partis avant la fin de l’année, ils n’ont pas été payés. »
Stéphane Planchant ne pouvait passer sous silence les directives de rentrée de la ministre Vallaud-Belkacem sur les risques attentats : « Ce qui insuffle une nouvelle culture pour nous. Nous savions quitter un établissement en bon ordre en cas d’incendie, où y rester confiné en bon ordre aussi, en cas de risque chimique extérieur. Là, on nous dit qu’en cas de vigilance attentat, il faut se sauver ! »… Des rires fusent. Un référent sûreté sera nommé. Comme ce fut le cas pour la laïcité. Les maladies de ce début du XXIème siècle en somme…
Bac+3, voire +2
Stéphane Planchand concluait ce tableau peu engageant, mais réaliste, par des recommandations anti agression : « Ne laissez pas votre porte ouverte et ne téléphonez pas dans la rue. »
La vice-recteur Nathalie Costantini dresse au JDM le bilan d’une rentrée sans trop grande difficultés, après avoir bouché les trous des enseignants manquant : « Entre les partants et les entrants, nous avions un solde positif dans les deuxième degré », assure-t-elle, « mais les inscriptions scolaires en hausse constante nous a amené à créer des postes, et donc à recruter. Le constat de rentrée met d’ailleurs en avant 2.000 élèves supplémentaires, nous en aurions donc 95.000 cette année. »
En réponse, ils sont 1.600 contractuels à avoir été recrutés, « avec une exigence de Bac+3, et quelques uns en Bac+2. »
La réforme du collège se penche vers les jeunes défavorisés
Mayotte ne démérite pas, insiste-t-elle, avec 83,3% de réussite au Brevet des collèges 2016, « contre 75,5% en Guyane. » Contrant la question de l’harmonisation des notes, « cela se fait partout ailleurs, y compris en métropole et en Guyane. »
La grande nouveauté cette année sera la mise en place de la réforme du collège, « tous les enseignants ont été formés l’année dernière », et un bilan sera fait à la fin du premier trimestre. Une réforme qui impose de dresser un pont avec le Centre Universitaire, « dans l’idée d’une meilleure préparation post-Bac », ainsi que 4 université métropolitaine, et l’IEP de Lille.
Un travail sera fait avec Pierre Mathiot, délégué ministériel aux « Parcours d’excellence », pour accompagner des jeunes de milieux populaires vers l’enseignement supérieur, en commençant par viser les collèges REP+.
Enfin, l’accent sera mis sur le plurilinguisme, avec l’introduction du portugais, la poursuite avec le chinois, l’italien et l’arabe. Etaient d’ailleurs présent, les deux premiers enseignants mahorais diplômés en langue arabe.
Les dernières difficultés sont en passe d’être réglées, et un chiffrage définitif sur le nombre d’élèves et les besoins sera publié au 15 octobre.
La journée était ponctuée de prestations du champion loca du hip-hop Lil Styl’z, sacré meilleur show au Boty France 2015.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte