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Mamoudzou

Le maire de Mamoudzou réclame que la construction de bidonvilles soit une infraction

Alors que sa commune était dévastée par le cyclone, Ambdilwahedou Soumaila n’a pas attendu, « Nous avons pris nos responsabilités », commentait-il devant les médias. Il a mis sur pied une vingtaine de cellules de crises thématiques

Après un choc sans précédent laissant les habitants de l’île en état de sidération, le constat d’un territoire dévasté impose de réagir. Chacun à son échelle, et le battant maire de Mamoudzou n’a pas tardé à dresser un plan de bataille. Il l’exposait ce lundi aux médias.

Une première conférence de presse depuis le passage du monstre Chido, « mais pas la première réunion dans cette salle Abdallah Houmadi où nous avons installé la cellule de crise dès le mercredi de la phase d’alerte, rapporte d’emblée le maire, il y a eu l’amont, puis le jour J et l’après-crise dès le samedi après-midi », donc dès l’après-midi de passage de Chido.

Saluant la mémoire des personnes décédées, « notamment le capitaine de gendarmerie qui a perdu la vie en venant secourir Mayotte ou une maman qui n’a pas survécu au constat des dégâts dans sa maison », et l’ensemble des personnes mobilisées, élus, associations, bénévoles, entreprises, professionnels de santé, secours, et la solidarité nationale, « je viens de raccrocher d’avec la maire de Cayenne », Ambdilwahedou Soumaila déclinait sa gestion de la crise, « avec la CADEMA ».

Dès l’alerte violette, il montait une cellule de crise et 19 sous-cellules thématiques : gestion des établissements scolaires réquisitionnés comme centre d’hébergement d’urgence, « 3.500 accueillis sur une capacité de 10.000 », écoute psychologique pour les agents de la mairie « dont 300 se sont mobilisés en laissant leur famille », gestion des déchets, recueil des dons extérieurs, diagnostic des établissements impactés, gestion de la centaine de volontaires ayant répondu à l’appel du maire dès le lundi suivant le cyclone, etc. Un appel toujours d’actualité, « nous avons besoin de monde pour distribuer de l’eau ».

20.000 repas par jour

Les toits se sont littéralement envolés

Une nouvelle cellule vient d’être créée pour recenser les personnes qui ont perdu un proche ou leurs biens.

Avec et sans le président Macron, le maire a fait le tour des villages de la commune, « pour constater les dégâts, beaucoup ont tout perdu ». Résultat, de Kawéni à Tsoundzou II, 20 sites ont été sélectionnés pour la distribution d’eau et de nourriture, 50.000 en-cas ont été distribués aux 22 centres, « on compte 20.000 repas par jour », et 30.000 bouteilles d’eau.

Autant dire que c’est la réponse à notre question sur la critique formulée par certains maires sur le manque de coordination avec les services de l’État dans la gestion de la crise. « Dans un premier temps, nous n’avions aucune connexion avec le COD* de Petite Terre en raison des dégâts sur les lignes, puis ensuite, nous avons géré en montant le Plan Communal de Secours. Je n’allais pas attendre que la préfecture nous donne de l’eau à hauteur de 13.200 bouteilles seulement vendredi, donc plusieurs jours après la catastrophe pour gérer, nous avons pris nos responsabilités, nous nous sommes tous mobilisés. »

Il y aura une distribution par jour sur les 5 sites de référence de Mamoudzou, « il faut tout calculer, les 4 jours d’acheminement par bateau, puis la sortie des containers, et la distribution », indique-t-il pour souligner que le rythme de croisière n’est pas encore atteint, « nous priorisons les centres d’hébergement dont nous avons la responsabilité et les personnes âgées ou handicapées, et nous gérons ensuite la distribution de l’eau embouteillée de l’État au Grand public ».

Un « hébergement de campagne » pour les sinistrés

Conseil municipal d’urgence ce dimanche

Il voit déjà plus loin, mi-janvier, et la rentrée scolaire. Les 22 établissements scolaires de la commune mués en centres d’hébergement, ont eux-aussi subi de gros dégâts. « Ils sont visités par les services techniques accompagnés par des architectes pour un diagnostic. Les travaux devraient commencer mi-janvier. » Des 3.500 personnes hébergées, il en reste encore. Où les envoyer ? Là encore, le maire a sa petite idée, « comme il y a un hôpital de campagne, on demande un hébergement de campagne pour eux. Un navire arrive avec des tentes embarquées à cet effet ».

Parmi les écoles, peu ont été épargnées, seulement 44% sont peu endommagées, les autres ont de gros dégâts. Une école qui avait résisté à Chido a été saccagée par les voyous, « ils ont mis le feu à T6 de Kawéni », et à Vahibé, c’est en entrant grâce à un pied de biche qu’ils ont tout dévasté. « L’éclairage est défectueux, et quand il marche, ils brûlent les caméras. Cela rajoute de la crise à la crise ».

Les élus font don de leurs indemnités

Prise en charge des personnes âgées

Pour tirer des leçons immédiates du monstre Chido, Ambdilwahedou Soumaila veut aller plus loin en indexant celle qui fut la plus meurtrière, la tôle. « Lors du dernier conseil municipal, et à l’unanimité des élus, nous avons demandé que la construction d’un bidonville devienne une infraction ». Il constate que ces ensembles de cases sont devenus des cimetières, « nous allons un jour ou l’autre subir un autre cyclone, si on laisse faire, nous serons comptables des morts à venir. » Ils sont beaucoup à avoir ainsi déjà reconstruit, « peut-être même au-dessus d’un corps enseveli, c’est indigne ! » Il demande que ce dispositif soit publié par décret ou inscrit à la « loi spéciale pour reconstruire Mayotte ».

Lors du conseil municipal d’urgence de ce dimanche, a également été approuvé le don par les élus de la commune de leurs indemnités aux actions dédiés à la gestion de la crise, en guise de soutien aux efforts de reconstruction et d’aide de la ville. Les services municipaux ont été habilités à organiser les actions liées à la réception et à la gestion des dons offerts par des particuliers et des structures solidaires, afin d’assurer une distribution efficace des aides.

A ce stade de la reconstruction du territoire, « mais aussi personnel, de chacun », il note dans l’opinion publique « un sentiment de frustration, d’impatience voire d’abandon », « ça a ramené le territoire 10 à 15 ans en arrière, il faut désormais reconstruire autrement ».

Anne Perzo-Lafond

*Centre opérationnel Départemental

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