« Il est reproché à une entreprise du secteur des services portuaires d’avoir abusé de sa position dominante sur le marché de la gestion et de l’exploitation des infrastructures et installations du port de Longoni en mettant en œuvre un ensemble de comportements visant à accaparer les marchés de la manutention portuaire. Il lui est également reproché d’avoir imposé aux importateurs mahorais un ensemble de conditions de transaction inéquitables ». Pour une fois, ce n’est pas le JDM qui écrit ces lignes, mais le rapporteur général de l’Autorité de la concurrence. Sans dévoiler l’identité de la société concernée par cet énoncé.
L’Autorité de la concurrence peut dévoiler les notifications de griefs, c’est-à-dire de motifs de plainte, mais pas sur la personne morale visée, « le Code du commerce nous l’interdit », nous rapporte son représentant que nous avons contacté.
Le motif pointe donc le gestionnaire et exploitant des infrastructures et installations du port, qui est le fait de Mayotte Channel Gateway (MCG). Nous ne savons cependant pas si la plainte porte sur cette entreprise, mais nous avions en revanche dévoilé que sa présidente avait modifié le code APE de sa société au lendemain de l’obtention de la Délégation de service public en 2013. Celle-ci portait sur la gestion, mais après modification, cela permettait d’œuvrer également dans le domaine de la manutention. Et de se positionner en concurrent de la société SMART (devenue CMAT) en créant Manuport ce qui lui permettait d’amortir ses investissements (grues, portiques) ce qu’elle faisait sur une courte période, engendrant des tarifs exorbitants. C’est notamment pour cela que la loi oblige à choisir entre la nomenclature 5224A (manutention portuaire) et 5222Z (gestionnaire). Cela avait induit des tarifs prohibitifs pour les entreprises du port, ce qui pourrait rejoindre le 2ème motif de plainte du rapporteur.
Que ces deux griefs d’abus de position dominante portés par le rapporteur de l’Autorité de la concurrence portent sur cette société ou sur une autre, ils seront suivis par un processus d’instruction par l’Autorité de la concurrence qui va faire ses observations. Se tiendra ensuite une séance contradictoire devant le collège de l’Autorité, au cours de laquelle la société incriminée va avancer ses arguments. « Le collège donnera ensuite ses propres conclusions sur le bien-fondé ou non des griefs », nous annonce-t-on. Une procédure qui peut durer « plusieurs mois ».
Quant à savoir qui est à l’origine du recours à l’Autorité de la concurrence, nous avons appris que celle-ci peut s’autosaisir, suite à un rapport de la Chambre régionale des Comptes notamment, ou être saisie par une autre entreprise ou par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF).
Tout ceci découle du recours perdu d’Ida Nel contre l’Autorité de la Concurrence qui l’avait verbalisé de 100.000 euros fin 2023 pour obstruction dans son instruction.
Anne Perzo-Lafond